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Bande dessinée  ->  Réaliste  
 

Nostalgie des années 80
Pierre Christin   Annie Goetzinger   Portraits souvenirs (tome 2) - La voyageuse de Petite Ceinture - Charlotte et Nancy
Dargaud 2003 /  19.80 € - 129.69 ffr. / 136 pages
ISBN : 2-205-05468-6

Préface de Pierre Christin.
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Le succès actuel de la bande dessinée se traduit notamment par une vague de rééditions d’albums encore récemment presque introuvables. Tel est le cas de ces Portraits souvenirs que Pierre Christin et Annie Goetzinger ont publiés au début des années 1980. Après la réédition, dans un même tome, de La Demoiselle de la Légion d’honneur et de La Diva et le Kriegspiel, voici donc le deuxième tome, qui réunit à son tour deux albums distincts : La Voyageuse de Petite Ceinture et Charlotte et Nancy.

Si la logique des rééditions échappe parfois, on voit bien ce qui a commandé celle des Portraits souvenirs. Ceux-ci ont marqué, incontestablement, une date dans l’histoire de la bande dessinée. Certes, ce milieu passablement machiste comptait déjà dans ces rangs une femme d’importance : Claire Brétécher, qui avait commencé à publier au milieu des années 1960 et était devenue célèbre grâce aux Frustrés (dont le premier album était paru en 1975). Mais Annie Goetzinger fut la première femme, à la fin des années 1970, à œuvrer dans le dessin réaliste. Ne serait-ce que pour cette raison, ses albums — et particulièrement ceux issus de sa collaboration avec Pierre Christin, qui comptent parmi les meilleurs — ont fait date.

Les deux histoires regroupées ici sont celle de Naïma, d’une part, celle de Charlotte et Nancy, de l’autre ; trois jeunes femmes, donc. Naïma est « la voyageuse de Petite Ceinture ». La Petite Ceinture est cette voie de chemin de fer qui fait le tour de Paris et qui fut fermée en 1934. Le long de ces 32 kilomètres de traverses cabossées, où poussent les mauvaises herbes et où passent encore quelques vieilles draisines, Naïma s’est construit un monde à part, qui fait le tour du monde réel sans jamais le rejoindre, et qu’elle arpente nuit et jour, tâchant d’échapper à ceux qui n’en voulaient qu’à son corps, que ce soit pour le discipliner (ses parents, ses maîtres) ou pour en jouir (Lucien, Saïd).

Nancy et Charlotte, elles, sont deux jeunes Bordelaises montées à Paris, le bac en poche pour la première, issue de la grande bourgeoisie du vignoble, sans rien pour la seconde que ses cartons à dessins, grâce auxquels elle espère percer dans le monde de la mode. Toutes deux réussiront, même si les formes de la réussite bourgeoise laissent à Nancy un goût amer que ne connaîtra pas son amie Charlotte.

Pierre Christin, qui préface cette réédition, dit s’attendre à ce que ces albums du début des années 1980 aient vieilli ; et il faut bien lui donner raison. Des audaces de l’époque n’apparaissent plus telles aujourd’hui. Il en va ainsi du fait d’avoir choisi pour héroïne une jeune Arabe, ou d’avoir entrepris la satire du monde de la publicité (La Voyageuse de Petite Ceinture) ou de celui des mannequins et des défilés (Charlotte et Nancy) — pour ne rien dire de quelques scènes d’un érotisme qui nous semble aujourd’hui bien modeste.

En revanche, les décors de la Petite Ceinture, contrairement à ce que semble craindre Christin, n’ont rien de désuet. Certes, ils ont été transfigurés en vingt ans : les immeubles vétustes qui longeaient la voie ont disparu et il est dorénavant impossible d’arpenter la voie elle-même. Joliment, Christin écrit : «Parfait, sans doute. La ville n’a pas encore terminé sa métamorphose en décor de film parisien n’ayant jamais existé». Mais, loin de rendre obsolète l’histoire de Naïma, ces décors aujourd’hui disparus l’ancrent dans un passé charmant, qui intrigue le lecteur.

Finalement, ce qui semble avoir le plus vieilli est ce qui pouvait légitimement faire la fierté d’Annie Goetzinger au début des années 1980 : l’extrême attention qu’elle portait aux phénomènes de mode (elle avait étudié le dessin de mode à l’école des arts appliqués de Paris de 1967 à 1971), qu’il s’agisse des vêtements ou des coiffures. Si cela gêne moins pour Charlotte et Nancy, qui a pour cadre le milieu de la mode, on ressent un certain malaise dans La Voyageuse de Petite Ceinture, précisément parce que la mode n’en est pas le sujet, et que le souci du détail semble alors l’emporter sur la volonté de faire vivre l’histoire. Cela est encore renforcé par le trait de Goetzinger qui, pour aimer les courbes, peine à rendre le mouvement. On a un peu l’impression de voir un film des années 1970, dans lequel des acteurs aux costumes démodés et aux coiffures improbables se déplacent avec une lenteur irritante, eu égard aux nouvelles habitudes de vitesse prises ces vingt dernières années.


Sylvain Venayre
( Mis en ligne le 05/01/2004 )
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