| Madonna Yakov et les sept voleurs Gallimard Jeunesse 2004 / 12 € - 78.6 ffr. / 32 pages ISBN : 2-07-055941-6 Imprimer
Le troisième des cinq contes pour enfants de Madonna est aussi le meilleur. Les Roses anglaises nous avait laissé perplexe ; Les Pommes de M. Peabody était déjà plus intéressant ; Yakov et les sept voleurs est sans doute le plus abouti. Lhistoire est celle dun homme, Yakov, dont le fils Mikhaïl est gravement malade. Yakov et sa femme donneraient tout pour sauver ce petit dont on voit «dans ses yeux quil sapprête à quitter ce monde». En désespoir de cause, Yakov sadresse au vieux sage dont on dit quil «parle avec les anges» et fait des miracles. Les prières du sage ne parviennent pas à guérir lenfant ; il décide alors de faire appel aux plus ignobles voleurs des alentours : leurs prières, unies à la sienne, sauveront Mikhaïl, car «quand nous cessons de nous conduire mal pour accomplir de bonnes actions, comme lont fait les voleurs en priant, nous tournons la clé des portes du paradis. Et nous recevons ainsi bienfaits et fortune.»
Il ne faut pas chercher la moindre trace de provocation ni de second degré chez Madonna-la-conteuse. Après une première histoire sur le thème de la jalousie, une deuxième sur les dangers dun jugement hâtif et les dégâts de la rumeur (deux thèmes qui parlent delle, finalement !), Yakov et les sept voleurs parle de la force de la prière et de son pouvoir de rédemption. Madonna naura sans doute jamais tant mérité son prénom ; dommage, au moment même où elle vient den choisir un nouveau, Esther ! Le propos nest pas à proprement parler religieux, puisque lon peut bien sûr extrapoler : il sagit avant tout de foi en soi et en lautre, et daccepter le mal pour le dépasser. Donneur de leçon ? Sans doute, mais après tout, pourquoi pas. Le ton de lhistoire est très doux, loin du style des Roses anglaises, où lauteur interpellait souvent son lecteur dune manière que lon pouvait juger quelque peu agressive, en tout cas déplacée pour un si jeune public («Et maintenant, arrête de minterrompre.»). Cette douceur est accentuée par le choix de lillustrateur, le Russe Gennadi Spirin. Soulignons dailleurs quil sagit encore une fois dun très bel objet.
Que reprocher alors à Madonna ? Peut-être son insistante générosité envers la Spirituality for Kids Foundation, à laquelle iront une fois de plus les droits de cet ouvrage ainsi quune partie des recettes de sa tournée mondiale, qui fera escale à Paris début septembre. Cette fondation est une émanation du Kabbalah Centre de Los Angeles, qui enseigne la sagesse de la kabale, la mystique juive, à la sauce californienne (rappelons que la kabale est un ensemble de textes dont létude est censée nêtre accessible quà des religieux érudits). De plus en plus de doutes pèsent sur cette organisation, que certains nhésitent plus à qualifier de secte. Madonna, qui est une fidèle du Kabbalah Centre depuis quelques années, est devenue une véritable publicité vivante pour les uvres du rabin Berg, et un de ses plus généreux sponsors.
Anne Bleuzen ( Mis en ligne le 02/08/2004 ) Imprimer
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