| Serge Pey Le Trésor de la guerre d’Espagne - Récits d'enfance et de guerre Zulma 2011 / 16.50 € - 108.08 ffr. / 170 pages ISBN : 978-2-84304-561-5 FORMAT : 12,5cm x 18,9cm Imprimer
Le trésor de la guerre dEspagne, est-ce ce tas de lingots dor enterré en France par des vétérans républicains, et que, vingt ans après, une fine équipe de survivants aussi hétéroclites que discrets mais pas tant que ça finalement cherche à coup de pelles sur la plage dArgelès ?... Serait-ce plutôt lamitié, la fraternité qui lie un groupe de rescapés de la guerre et des prisons franquistes ? A moins que ce ne soit les inventions merveilleuses qui planent dans ce petit recueil de nouvelles, à commencer par les échecs olfactifs et alcoolisés de Chucho et Floridor ?
Des trésors, il y en a à foison dans louvrage que Serge Pey a consacré à une guerre vécue par sa famille, une guerre inscrite dans sa mémoire denfant et retranscrite telle quelle, sans le tamis du regard adulte dans cet ouvrage. Des bijoux vivants (et parfois meurtriers), des vengeances si subtiles quelles semblent de lorfèvrerie de haine, des parties déchecs héroïques à travers des murs de prison, une société secrète dont lemblème est lhippocampe, un enfant caché au plus profond de la terre
Les motifs sont variés, les récits courts, plus ou moins poétiques, plus ou moins tristes. Des histoires de vie et aussi de morts, au cur dune guerre civile.
Est-ce de la mémoire enfantine retranscrite sans retouche ? Est-ce de lhistoire réinventée ? Serge Pey propose, dans ce recueil de nouvelles (qui finissent par trouver leur cohérence dans la nouvelle qui donne son titre au recueil
), une relecture de la guerre par le regard de lenfance, et par les souvenirs
Cela donne à son écriture un tour poétique, qui parfois simplifie les choses complexes (lévasion de deux hommes narrées sous la forme dune promenade dalcooliques), parfois aussi rend incompréhensible des affaires simples. Une sorte de réalisme magique à la sauce mémorielle en somme, qui confère aux évènements les plus graves comme une teinte pastel, celle des yeux denfants sur les affaires des adultes.
Du reste, le jeu, et notamment les échecs, revient fréquemment, comme une vie en réduction, permettant déchapper à la grande, la réalité. Certaines nouvelles sont alors assez hermétiques, centrées sur un personnage flou, ou trop dissimulé pour que le lecteur puisse vraiment lentrevoir. Dautres nouvelles évoquent des faits héroïques, des fous magnifiques comme ce charmeur de scorpions vindicatif ou ce couple de joueurs déchecs résistants , autant dhistoires qui portent le lecteur, lemmènent dans un autre temps, ou une autre guerre dEspagne, aussi terrible mais plus ambiguë. On retiendra enfin le personnage solaire de Floridor, qui transforme la manière de jouer aux échecs pour y inclure une beauté nouvelle.
Un recueil agréable, à destiner aux amateurs déchecs, de poésie et de mémoire.
Gilles Ferragu ( Mis en ligne le 10/06/2011 ) Imprimer | | |