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''Les pas de l’arpenteur continuent d’ébranler le monde''
Marie Rouanet   L'Arpenteur
Albin Michel 2012 /  15 € - 98.25 ffr. / 192 pages
ISBN : 978-2-226-23838-2
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Marie Rouanet construit de façon discrète une œuvre originale (plus de 20 romans, des films documentaires), un univers personnel très fort, fait de sensations d’un quotidien pleinement vécu. Elle vit dans le Rouergue dont elle aime la beauté sévère et âpre et où elle situe son roman. En épigraphe de L’Arpenteur, cette phrase du poète occitan, Ives Roqueta: «C’est en force qu’il faut écrire ou bâtir. Il n’y aura pas de pitié pour les artificiers ou les brodeurs d’arabesques. Ces morts le savent, cette muraille le crie. Et moi, j’essaie de me le mettre en tête». Et c’est en force que passe le héros, surnommé l’arpenteur par le narrateur, dès la première phrase : «Celui auquel je donnais déjà le nom d’arpenteur pour l’avoir vu passer au loin est entré dans ma vie un soir de bise noire».

Ce notaire, rude, laid, brutal, mal aimable parce que mal aimé, venu du «Nord»: l’Auvergne à 300 km, un étranger en somme. Étranger à qui l'on ne fait que peu confiance, si ce n’est par obligation : le notaire est toujours un personnage essentiel dans cette société rurale, où la terre est le bien le plus précieux. Enfant confié dès sa naissance à une nourrice, Eutargie, qui seule sut l’aimer et le voir beau, remarquablement intelligent, différent par son physique du reste de sa famille de notables, Charles vécut toute sa vie à part. Notaire comme son père, marié puis séparé, il marche avec sa colère et sa tendresse dans les étendues quasi sauvages du pays qu’il a fait sien et dont il connaît chaque pierre, dont il est le seul à connaître l’histoire pour avoir écouté les vieux, regardé, observé chaque reste ténu des habitations détruites au fil du temps. Il y a aussi la nature et Marie Rouanet excelle depuis toujours à faire ressentir à son lecteur l’impression de froid, de chaleur, de saisons qui se succèdent : «Aujourd’hui c’est l’automne dans toute sa grâce. L’Arpenteur marche sur le sol inégal des chemins de terre et des raccourcis, passe devant les érables jaunes vif ou roses, des cerisiers rouges essaimés à travers les pentes d’une ferme aujourd’hui disparue» (p.39).

Il fascine le narrateur, fils de paysans, employé dans une banque, qui est revenu à la ferme familiale, a trié les souvenirs, tout rangé dans de grandes caisses au grenier. Et grâce au notaire, ''l’arpenteur'', son pays prend sens, les souvenirs vivent, il retrouve une réalité ancienne, disparue, oubliée, une époque où les habitants étaient nombreux. L’Arpenteur lui fait découvrir la carte de Cassini dressée entre 1750 et 1815, carte si proche et si éloignée des cartes actuelles. Chaque ferme, chaque bâtiment y est dessiné, et le passé brusquement devient présent, tous les habitants des siècles passés revivent d’un coup : «J’entrevis l’épaisseur complexe de tout ce qui m’entourait, le peu que je tenais dans ma tête, et l’immensité de mon ignorance. Inquiet, agrandi, béant, nu et ébloui, ce soir là j’ai cessé de devenir vieux».

Il ne se passe rien - ou presque - en apparence, et tant de choses pourtant : l’amitié entre trois hommes solitaires, une amitié fondée sur une estime réciproque, un regard partagé, des connaissances qu’ils sont seuls à posséder, une amitié de taiseux qui ne s’exprime que par gestes minuscules. La vie qui s'écoule, la nature qui toujours reprend ses droits, l’incompréhension des autres, des pressés, de ceux qui passent sans voir.

Un beau roman à savourer de façon gourmande.


Marie-Paule Caire
( Mis en ligne le 06/02/2012 )
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