|
Littérature -> Romans & Nouvelles |
| Belinda Cannone Le Don du passeur Stock 2013 / 16 € - 104.8 ffr. / 160 pages ISBN : 978-2-234-07471-2 FORMAT : 13,5 cm × 21,5 cm Imprimer
En treize chapitres qui sont autant dentrées aux titres évocateurs («La chambre», «Létrangèreté», «La maison commune», etc.), Belinda Cannone rend hommage à son père mort en 2006, un homme au grand cur, un original extrêmement généreux, respectueux et soucieux des autres, des choses et de la nature. Elle évoque tous les affects quil lui a transmis, tous ces traits de caractère quelle a hérités de lui, elle montre le «don de ce passeur», donc.
Pour ce faire, ce sont les anecdotes qui prédominent. Elle raconte, par exemple, comment son père a recueilli un ex-légionnaire pourtant raciste, se vantant même de ratonnades, ce qui est surprenant pour cet être si doux et si humain. Mais, justement, être humain, cest être capable daider un tel individu «démuni» et «misérable». Sur un autre plan, il aide aussi, à sa mesure, les auteurs aux rencontres organisées par la librairie Ombres blanches où «il achetait toujours louvrage que lauteur présentait : il naurait jamais supporté quun écrivain venu parler ne signe pas assez et reparte déconfit ou frustré». Et pourtant, cet homme a peu damis et sest mal remis de léchec amoureux de sa vie : le départ de sa femme avec ses enfants a provoqué un jeûne de quarante jours.
Les associations de souvenirs créent des digressions à chaque fois balisées par le titre du chapitre. Dans «Létrangèreté», la promenade près dune maison abandonnée nommée «Le Grand Khan» génère ce sentiment d«étrangèreté», et, par suite, celui de se sentir comme des étrangers face à cette maison, puis face à cette terre, réflexion qui permet dévoquer lorigine sicilienne de sa famille. Au milieu des souvenirs liés au père, peuvent aussi surgir des questionnements formels. Belinda Cannone sinterroge notamment sur la mise en forme de son récit : «Je naurais pas soupçonné quil fût si difficile, surtout pour moi qui prends généralement plaisir à organiser et ordonner les idées, de décrire une personne». De même : «Aussi : pour restituer la bonté et lexceptionnalité qui sincarnèrent ici, je gomme les miasmes qui polluaient la relation avec lhomme concret. Il faut les exposer pourtant, sans quoi jaurai lair davoir inventé un être selon mon cur».
Souvenirs et portrait permettent de mieux cerner le père et les questionnements formels donnent quelque vitalité au livre. Pourtant, même si ce que Belinda Cannone dit de son père, et quelle relie à sa propre vie, peut savérer intéressant, cela ne reste quau stade de lanecdote. Lécriture, scolaire et appliquée, sans envergure littéraire, ne parvient pas à transcender cet être apparemment formidable. Ce livre intéressera sûrement les admirateurs de lauteure pour ce quil apporte déléments biographiques. Pour les autres, il présente peu dintérêt littéraire novateur. Belinda Cannone le rapporte dailleurs dans ses notes intégrées au récit (et semble même sexcuser de sa forme) : «Ce classicisme, je le retrouve avec inquiétude en me relisant ces jours-ci (juin 2012), dans la langue et dans la forme, et men étonne. Le verbe serait-il moins libre quand il évoque le père ?»...
Xavier Briend ( Mis en ligne le 21/10/2013 ) Imprimer
A lire également sur parutions.com:L’Ecriture du désir de Belinda Cannone Entre les bruits de Belinda Cannone | | |
|
|
|
|