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Qu’est-ce donc qu’un père ?
Gaspard-Marie Janvier   La Trace du fils
Fayard 2014 /  18 € - 117.9 ffr. / 219 pages
ISBN : 978-2-213-68230-3
FORMAT : 13,5 cm × 21,5 cm
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Telle est la question qui hante La Trace du fils, formulée par celui qui porte le même nom que l’auteur. C’est dire, d’emblée, combien il est question de la filiation, à tous les sens du terme !

Les enfants, pourtant, Cecil Janvier sait ce que c’est : il en a eus trois, d’une première union, avec celle que, désormais, il ne nomme plus que «Big mother». Cette femme, il l’a quittée, pour vivre avec Bénédicte, elle-même mère de deux enfants, dont le père, Didier, un alpiniste hors pair – «baron du ciel, don juan des alpages, flambeur génial au paradis de l’or secret» (p.39) – est mort en montagne. Hérédité ou quête des origines, c’est précisément vers les hauteurs que décide de fuir Abel, l’un des fils d’adoption, après que son père de substitution a commis une faute considérée comme impardonnable : «Cecil n’avait pas su arriver à l’heure à la finale des Poussins» (p.14). Débute alors, pour Cecil, une longue poursuite, «aux trousses d’un fils qui n’était même pas le sien» (p.58)…

Mais, déboussolé et dépassé par les événements, c’est surtout à la rencontre de lui-même que ce père tente, laborieusement, d’aller, voyant autour de lui s’effriter ce qui, jusqu’alors, avait constitué une vie bien réglée. Et, plus l’enfant reste introuvable, plus le monde des adultes se fissure pour livrer toute sa fragilité : «L’enfant, dans son intuition d’enfant, n’était-il pas parti tracer le chemin à sa mère ?» (p.56). Car c’est bien cela que redoute par-dessus tout le «héros» – qui l’est décidément si peu ! – : l’abandon, c’est-à-dire «le processus de bigmozérisation» (p.199), qui fait d’une femme une mère.

D’une telle aventure, autant dire que les hommes ne sortent pas grandis ! Incapable de raisonner autrement qu’en faisant appel à l’Emile de Rousseau, le pauvre Cecil se montre aussi complaisant avec lui-même que ce cher Jean-Jacques : «Il n’était qu’une imposture de père, un usurpateur de paternité, même, et surtout, pour ses grands enfants, qu’il n’avait su qu’abandonner à la chronique d’un monde en décomposition» (p.200).

Naturellement, questionner la paternité, dans une époque où celle-ci n’a jamais été aussi remodelée («Que reste-t-il de la paternité d’un homme s’il n’a plus la même femme, plus les mêmes enfants, plus le même toit ?», p.73), c’est aussi questionner l’acte d’écrire pour mieux se l’approprier et le réinventer. Là encore, quelle déception ! Au fil des pages, avec les paysages alpins, ce sont des clichés éculés qui sont déroulés : le contraste entre le citadin cultivé mais égoïste et le paysan rustre mais doté d’un grand cœur, entre le courage du fils et la vacuité du «père B» (p.51), entre la personnalité brillante du père biologique, sportif audacieux, et celle, bien terne, du beau-père, intellectuel lâche et complexé. Au tableau, il ne manque plus que Caïn, en écho à Abel !

Convenus voire dépourvus de sens, les aphorismes peinent également à convaincre : «Les pères ont été enfants, les enfants n’ont pas été pères» (p.14), «La jalousie, comme la femme, remonte à la plus haute antiquité» (p.19), «les chiens expriment toujours les névroses de leur maître» (p.64), «les hommes n’oublient jamais de se conduire comme des enfants» (p.133).

Et, si le texte n’est pas dépourvu d’humour – notamment dans l’évocation finale des amours d’un Roméo et d’une Juliette canins –, force est de reconnaître que l’origine de celui-ci est souvent bien fortuite. Ainsi, cette perle authentique, que chacun appréciera : «C’est comme pour l’exercice de la prostitution. Si l’on part du principe que le mal est inévitable, mieux vaut le tolérer dans des lieux bien circoncis (sic !) afin d’être en mesure d’intervenir en cas de menace pour la sécurité publique» (p.142). Superbe lapsus, qui nous offre une conclusion facile : La Trace du fils, ou le sexe du «ma[â]l[e]» dans tous ses états !


Sarah Devoucoux
( Mis en ligne le 03/10/2014 )
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