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Personnellement, Moi, Je...
Christophe Tison   Résurrection
Grasset 2008 /  17,90 € - 117.25 ffr. / 283 pages
ISBN : 978-2-246-72881-8
FORMAT : 13,0cm x 20,5cm

L'auteur du compte rendu : Essayiste, romancier, Jean-Laurent Glémin est titulaire d’un troisième cycle en littérature française. Ayant travaillé notamment sur les sulfureux Maurice Sachs et Henry de Montherlant, il se consacre aujourd’hui à l’écriture de carnets et de romans. Il n’a pas publié entre autres Fou d’Hélène, L’Imprésent, Fleur rouge, Chair Obscure, Continuer le silence.
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Christophe Tison (né en 1961) raconte Christophe Tison dans un récit autobiographique qui revient sur son passé difficile de drogué et d’alcoolique. Vivant comme un zombie, dépendant des cachets, des boissons et de substances illicites le privant indéniablement d’une vie familiale et professionnelle acceptable, il décide courageusement de se faire désintoxiquer en se rendant dans un centre psycho-médical où thérapie, abstinence et vie de groupe seront les facteurs essentiels d’une guérison assurée. Là-bas, il rencontre des paumés, des sosies, des alcooliques anonymes avec qui il parviendra tant bien que mal à se sortir de cette spirale obsessionnelle qu’est la dépendance à la drogue et à l’alcool.

Si l’on a de l’empathie pour ce pauvre garçon abandonné à ses addictions, victime très jeune d’abus sexuels répétés et dont le parcours plutôt chaotique - bien que réussi (il est devenu journaliste et écrivain) - met mal à l’aise, on ne peut que déplorer ce déballage narcissique dénué de profondeur littéraire, de distanciation juste, et de talent d’écrivain. Le lecteur assiste à un banal témoignage comme on en lit des centaines sur la misère humaine en pays riche, celle des petits-bourgeois, des bobos, des festifs, des noceurs qui brûlent leur vie par les deux bouts jusqu’à ce qu’ils finissent par se consumer eux-mêmes. Si l’extrême sensibilité de ces personnes n’est pas mise en cause, la pauvreté formelle et sémantique de leur texte, elle, pose réellement problème dans le monde littéraire actuel.

Pourquoi 286 pages quand 30 auraient suffi ? C’est le mystère de l’écrivain qui écrit pour ne rien dire, qui remplit des feuillets pour ne rien signifier, qui déballe sa vie et ses tracas, qui affiche ses problèmes existentiels et personnels au lecteur devenu le temps de cette ennuyeuse lecture, un psychanalyste de comptoir. Bien sûr, l’expérience littéraire est un exutoire dans lequel on peut chercher une thérapie. Mais pensez, s’il vous plaît, à l’expérience du lecteur qui s’attend à de la littérature et non à un formulaire médical à tendance psychologisante.

Comme tout bon narcissique, Tison assassine les autres personnages du livre en les effleurant à peine de la plume, car ils servent avant tout à parler de lui. Lui, lui, toujours lui et ces mêmes scènes de dépendance à l’alcool déclinées selon sa biographie. Alcoolisme au travail, alcoolisme en vacances, alcoolisme avec les enfants, alcoolisme à Noël, alcoolisme dans une péniche, comme une version junky de la série des Martine... Tout cela n’a aucun intérêt. Ni pour un écrivain, ni pour un lecteur, ni pour un curieux, ni même pour un médecin. Car même si l’on reste dans le registre du témoignage sincère, le récit est bien trop banal, le thème tellement ressassé que personne n’apprendra rien de nouveau. Exemple, page 212 : «Après la défaite, j’achetais le nouveau Géo : «Sur la route Mandarine, de Hanoi à Saigon.» À l’intérieur, le type qui y était allé, sur la route mandarine, écrivait : «C’est un serpent de mousson qui s’étire sur 1600 km, entre mer et montagne sous la lumière argentée des cieux d’Orient.» Ça me laissa muet dans mon café pourri de bled pourri de vie pourrie.»

Car entre des digressions propres aux confessions de Tison devant le groupe de toxicomanes, le lecteur assiste péniblement au roulement de la vaisselle, du nettoyage du carrelage, ou à quelques parties de foot sans oublier les balades dans le village le plus proche. Cela ne serait rien sans les histoires d’amour foireuses qui naissent fatalement dans ce style de cadre, notamment avec Eva, le canon fragile du groupe, qui s’éprend de l’auteur.

La littérature est un art où exigence et distance sont la base pour tenter de comprendre quelque chose dans ce bas monde. Là, Tison utilise les données grammaticales du langage pour raconter sa pauvre histoire. Quand le langage devient un prétexte et non un enjeu, voir même un moyen d’arriver à ses fins, il faut fermer le livre. Et c’est ce que nous faisons. Si le but n’était que de raconter bêtement un moment tragique de sa vie (comme dans n’importe quelle émission compatissante du service public), il y est parvenu, mais si l’on commence à publier dans cet unique but, alors l’ennui éditorial (que nous vivons de plein fouet depuis une vingtaine d’années) a de belles années encore devant lui.


Jean-Laurent Glémin
( Mis en ligne le 21/04/2008 )
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