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Plus près de vous, mes dieux… | | | Katia Chapoutier Lost in Jérusalem Le Passeur 2013 / 18.90 € - 123.8 ffr. / 256 pages ISBN : 978-2-36890-006-2 FORMAT : 14,0 cm × 20,5 cm Imprimer
En juillet 2011, Katia Chapoutier, journaliste fraîchement séparée, atterrit à Jérusalem pour un séjour dune semaine. Au menu, découverte de la ville et idéalement de ses habitants. Et là, patatras, elle attrape un virus touristique : le syndrome de Jérusalem, une fascination (forcément maladive) pour la ville trois fois sainte.
Mais qu'on se rassure, elle est porteuse saine, cest-à-dire que dans son cas, le syndrome se résume à une belle histoire de curiosité et dempathie avec la ville, ses habitants et ses quartiers, une histoire quelle nous fait partager dans ce journal de voyage et de découverte.
Les premiers pas de Katia Chapoutier à laéroport de Jérusalem ne donnent pourtant pas envie daller plus loin : accueil rébarbatif et méthodes dictatoriales. Aussi faut-il déjà reconnaître à cette jeune femme une belle volonté, en dépit des obstacles et des méfiances. Ses déambulations au milieu de sociétés très conservatrices, où la femme seule, enceinte est suspecte, laissent sans voix. En particulier, la description du milieu haredim les ultra orthodoxes du quartier de Mea Sharim vaut par lexotisme et la complexité des pratiques. Il ne faut heureusement pas sen tenir à ce seul aspect de louvrage, même si un lecteur occidental sétonnera des murs, coutumes et traditions parfois singulières, où la femme, létranger, sont clairement ignorés. Une découverte de la ville par ses lieux les plus fameux (le Saint Sépulcre, lEsplanade des Mosquées, le Mur des Lamentations) autant que par ses habitants.
Et syndrome de Jérusalem oblige - lauteur revient périodiquement à Jérusalem : avec sa fille, son nouvel ami, en villégiature, en colocation, chez des surs. Et elle visite, bois des cafés glacés, déjeune dans toutes les langues, prie, se promène, discute avec qui veut bien discuter (commerçants, journalistes, chercheurs, touristes), ouvre les yeux et les oreilles, et surtout, nous fait partager ses déambulations, sans artifices.
Car cest sans doute là lun des atouts, et lune des réussites de ce livre : il ne sagit ni dun guide vert des plus beaux sites, ni dun guide gastronomique
mais du récit simple, chaleureux ou étonné, dune jeune femme qui découvre une ville, sy perd, se trompe dans les bus, se heurte aux coutumes locales et interdits religieux et qui, inlassablement, apprend, communique, se fait expliquer afin de comprendre. Une démarche salutaire, bienveillante même, qui ne peut que séduire le lecteur. En effet, il eût été si simple de juger : Katia Chapoutier observe, note, ne sinterdit pas une réflexion, une comparaison mais accepte lAutre. Ce qui ne se traduit pas non plus par de la complaisance : le tableau des vexations infligées à la communauté arabe par Israël est sans appel et sans excuses, de même que lintransigeance des rapports entre religions.
Dans cette ville trois fois sainte, la religion semble plus une suite de conflits larvés et de mesquineries quune communion avec le divin
Il est vrai que foi et religion sont à distinguer, ainsi que le démontre une fois de plus ce journal de voyage, qui oppose des figures lumineuses de croyants ouverts (une sur hospitalière, un apprenti rabbin londonien, un taxi palestinien, etc.) et des fanatiques bornés. Au final, la religion, à Jérusalem, divise plutôt quelle ne rassemble et ce en dépit de vrais moments de grâce, comme cette fin de Ramadan dans les rues de la vielle ville, cette prière de Sabbat avec quelques amis juifs libéraux ou encore cette soirée passée dans le Saint Sépulcre. Chaque petit moment de grâce, figé par lécriture, est une invitation à dépasser les frontières.
Un bel ouvrage, tout simple, à recommander à ceux qui cherchent une première approche de Jérusalem et de ses complexités.
Gilles Ferragu ( Mis en ligne le 03/05/2013 ) Imprimer | | |