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Après Iéna...
Michael Gregorio   L’Enquête prussienne
JC Lattès 2011 /  22,50 € - 147.38 ffr. / 476 pages
ISBN : 978-2-7096-2832-7
FORMAT : 14cm x 22,5cm

Marie Boudewyn (Traducteur)
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«Ce que je crains, c’est ce qui m’arrive ; ce que je redoute, c’est ce qui m’atteint. Je n’ai ni tranquillité, ni paix, ni repos, et le trouble s’est emparé de moi». Extraits de la Bible, ces quelques mots ont été placés en exergue de L’Enquête prussienne, le dernier roman historique de Michael Gregorio paru aux éditions JC Lattès. La citation reflète tout à fait l’atmosphère aussi bien sombre que palpitante que l’auteur a voulu donner à cette histoire. Les apparences sont toutefois trompeuses : derrière ce pseudonyme se cache en effet un tandem d’auteurs italiens, Daniela de Gregorio et Michael G. Jacob, qui sont en fait mariés depuis trente ans et vivent à Spoleto, en Ombrie. Alors que la première est professeur de philosophie, le second enseigne à la fois l’anglais et l’histoire de la photographie.

Dans ce véritable thriller, l’intrigue se joue en Prusse, que les troupes de Bonaparte viennent de défaire et d’envahir. A la suite de la célèbre bataille d’Iéna, le philosophe Hegel célébra d’ailleurs «la fin de l’histoire» que les armées révolutionnaires étaient censées apporter au monde. Devinant le sentiment d’humiliation que ressentait alors son épouse, un Prussien précise au début du roman que «l’affaiblissement de notre nation, les changements que nous imposaient les Français, alors que les défaites succédaient aux défaites et les déroutes», peinaient le pays tout entier.

En ces temps particulièrement troublés par les affres de la guerre, les dépouilles de trois enfants prussiens sont découvertes dans une chaumière au beau milieu de la forêt. Ils ont été massacrés. Mais ce n’est pas tout. Peu après, le cadavre de la mère de ces jeunes victimes réapparaît quant à lui dans un entrepôt laissé à l’abandon. Les circonstances de ces disparitions sont sombres. L’affaire ne manque pas de susciter la perplexité des autorités, lesquelles sont bien décidées à faire la lumière sur cette macabre série de meurtres.

Pour élucider ces mystérieux assassinats, un magistrat prussien est rapidement chargé de l’enquête. Disciple de l’autre grand philosophe allemand, Emmanuel Kant, il s’appelle Hanno Stiffeniis. Les choses ne restent pas longtemps au point mort. Bientôt, tout s’emmêle et malheureusement les complications se multiplient pour l’enquêteur prussien. Pour remplir sa délicate mission, Hanno Stiffeniis doit composer avec Serge Lavedrine, colonel de la Grande Armée et surtout criminologue très réputé, qui entend résoudre l’affaire seul.

Au cours de l’enquête, le procureur prussien est envoyé sur la frontière russe, où se trouve une forteresse très isolée dans laquelle il doit rencontrer le mari de la disparue. A son arrivée, hélas, l’homme est déjà mort et enterré car il avait été tué lors de manœuvres militaires. Que penser de cet évènement ? S’agit-il d’une tragique coïncidence ? Ce nouveau rebondissement ne manque pas de plonger le Prussien dans le doute : doit-il se résoudre à faire confiance au criminologue français et à coopérer avec lui ? Le ressentiment anti-français des Prussiens ne contribue pas à lui rendre la tâche plus aisée, loin s’en faut. Dans cette triste affaire, les incertitudes sont décidément nombreuses…

Écrite et traduite dans une belle langue, l’histoire est passionnante et tout à fait réaliste. Elle plonge le lecteur dans le contexte de l’époque. Les détails sont nombreux. Il est ainsi notamment question des difficultés des Juifs prussiens, de celles de l’armée d’occupation et naturellement de celles des autochtones. Bref, un excellent roman !


Jean-Paul Fourmont
( Mis en ligne le 21/10/2011 )
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