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Architecte arpenteur
Roland Simounet   Dialogues sur l’invention
Le Moniteur - Questions d’architecture 2005 /  20 € - 131 ffr. / 174 pages
ISBN : 2-281-19248-2
FORMAT : 13x19 cm

L'auteur du compte rendu : Emmanuel Cros étudie l’architecture au Bauhaus de Weimar en Allemagne.
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Les Dialogues sur l’invention forment un recueil de sept textes d’entretiens avec l’architecte Roland Simounet (1927-1996), parus dans des revues françaises, réunis et présentés par Richard Klein, spécialiste de l’œuvre. Ces interviews couvrent une période de 17 années de la deuxième carrière de Roland Simounet, celle poursuivit à Paris après une vie en Algérie jusqu’à l’Indépendance.

C’est dans cet intervalle entre 1978 et 1995 que l’architecte réalise ses projets majeurs tels le musée de la Préhistoire de Nemours, un îlot du centre ville de Saint-Denis dédié au logement, le musée d’Art moderne de Villeneuve-d’Ascq, le musée Picasso à Paris, l’Ecole nationale de danse de Marseille. Deux entretiens portent sur une œuvre en particulier, l’un sur le Musée de Nemours présenté à l’occasion d’une conférence en 1981, l’autre sur l’ensemble de logements dans le secteur de rénovation Basilique à Saint-Denis; texte illustré de très nombreux croquis où s’élaborait le projet.

Ici les illustrations des textes — reproduits dans leur intégralité en respectant la chronologie des parutions — varient de leurs publications originales. Au travers de cette iconographie en partie renouvelée, ces entretiens mis bout à bout offrent un panorama de l’œuvre construit qui s’ajoute aux quelques ouvrages sur Roland Simounet. Là encore les photos sont toutes en noir et blanc ; ces architectures ne furent que rarement montrées en couleurs, par choix de l’architecte semble-t-il.

Sur la sélection opérée ici, Richard Klein écrit dans son introduction : «Cette relation à la pratique fait l’intérêt de ces textes, mais aussi leurs limites : elle les cadre dans une pensée qui semble strictement appliquée à l’architecture. Les considérations générales ou, à l’inverse, les souvenirs intimes y sont rares.» (p.8). Il note aussi que «l’assemblage de ces entretiens construit un récit allant à rebours vers la Méditerranée» (p.16).

On lit donc dans ce recueil sur l’ensemble des réalisations de l’architecte. Aussi d’autres de ses projets marquants y sont expliqués : la Cité de transit de Djenan el-Hasan en Algérie dans les années 1950, la résidence universitaire de Tananarive à Madagascar dans les années 60, une petite maison de vacances sur une plage corse, l’Ecole d’architecture de Grenoble dans la décennie 70. Roland Simounet a exploré deux champs principaux que sont le logement et le musée, plus largement les programmes culturels. Son activité algérienne fut essentiellement consacrée à l’habitat.

«J’ai toujours travaillé de la même façon, mais, au début, je n’avais pas conscience d’avoir une méthode…» (p.29) observait rétrospectivement Simounet au milieu de sa carrière en 1978. Les textes aujourd’hui réunis montrent une remarquable continuité de pensée et une évolution fine des convictions profondes de l’architecte, que ne démentent pas ses réalisations maîtrisées par une longue maturation. Cette constance est un trait net de la manière de Roland Simounet.

Il rappelait s’être forgé sur le terrain de son premier travail — l’étude approfondie d’un bidonville d’Alger, Mahieddine — une règle morale indéfectible: «Ne rien détruire avant d’être sûr de proposer mieux» (p.156). Cette attention particulière aux conditions préexistantes informera toutes ses réalisations. Symptomatiquement, le lieu du projet est toujours un «terrain», pas une «parcelle». Affirmant «Je crois à l’ancrage» (p.84), Simounet insistait sur le relief et la végétation comme fondations du projet.

A propos de l’établissement dans un site, plusieurs pages rappellent qu’il fut le fondateur désigné de villages et d’une ville nouvelle en Algérie, l’agglomération de Timgad sur les contreforts des Aurès, près des ruines de la cité romaine (lire pp. 74, 115-116, 122-123).

Cette sensibilité envers le sol et les traces qu’il conserve produisit des constructions issues des lieux, savamment implantées. Simounet saisissait avec intuition la topographie en arpenteur ingénieux. Le chemin de l’eau est dans toute son œuvre un thème récurent et distinctif, celui de l’eau de pluie en particulier. Ce souci de la mise en forme de l’écoulement rappelle l’architecte mexicain Luis Barragán (1902-1988), ingénieur de formation, expert en hydraulique.

Ses réalisations architecturales partagent un «aspect sculptural et massif» (p.12), sous des formes souvent monolithiques. C’est une architecture d’épaisseur qui consacre la préférence du mur et affirme son introversion ; puise ses racines aux sources méditerranéennes. «La vérité des matériaux, l’adaptation au site, la préoccupation du vieillissement et d’une architecture «sans âge» sont des constantes de mon travail» (p.138) et résumaient un savoir/construire éclairé et simple à la fois.

Cette ambition de justesse trouvait dans le dessin un temps et un moyen de développement précieux. On compte des notes à profusion, des milliers de croquis à main levée sur des carnets avec des côtes empruntées au Modulor, le système de dimensions harmoniques mis au point par Le Corbusier. Un détail encore qui marque un attachement filial au Mouvement Moderne, dont il interprétait avec sensibilité l’héritage. «Je revendique tranquillement mon appartenance au Mouvement Moderne, (…) même s’il a pu dériver au cours du temps, a su aussi s’enrichir» (p.136). Simounet a tout son mérite dans ce prolongement réussi vers une Modernité "située".

Il a écrit en 1982: «(…) il n’y a pas de création. Il y a invention. Invention au sens où le laboureur et l’archéologue sont inventeurs de l’objet — quelquefois du trésor— qu’ils découvrent. Dégagée peu à peu, par couches successives, par persévérance, patience et passion, l’architecture vient des stratifications de la mémoire.»


Emmanuel Cros
( Mis en ligne le 16/11/2005 )
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