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Un grand architecte français
Jean-Louis Cohen   Urban Textures - Yves Lion
Editions Birkhäuser 2005 /  48 € - 314.4 ffr. / 159 pages
ISBN : 3-7643-6301-0
FORMAT : 21x30 cm

Ouvrage en anglais.

L'auteur du compte rendu : Emmanuel Cros étudie l’architecture au Bauhaus de Weimar en Allemagne.

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Un livre paraît sur cet architecte français seulement tous les dix ans; un premier en 1985 chez Electa, puis un deuxième en espagnol chez Gustavo Gili en 1992 et voilà ce troisième en anglais chez Birkhäuser en 2005. Ce dernier encore prouve la qualité et la modestie de ce grand architecte, urbaniste de talent, dont la valeur s’avère mieux reconnue par les éditeurs étrangers.

Si bon nombre de monographies de contemporains paraissent à but promotionnel, cet ouvrage-ci ne fait pas étalage de projets, telles des perles enfilées sur un collier, retaillées pour mieux briller. L’auteur Jean-Louis Cohen, propose sous forme d’un essai une interprétation de l’œuvre développée sur plus de trois décennies en France et au delà, passionnément autour de la Méditerranée. Il distingue plusieurs thèmes qui parcourent et renouvellent le travail de cet architecte né à Casablanca en 1945, établi à Paris depuis ses études à l’Ecole des Beaux-Arts.

L’un de ses domaines d’élection s’impose d’évidence : le logement. Le premier chapitre y est entièrement consacré, sous le titre “Modern Comfort”. C’est que peu d’architectes français parviennent comme Yves Lion à réussir le confort dans l’habitat, surtout s’il est collectif. Ce souci ne se limite pas à l’espace domestique, chez cet «Amateur of housing» (p.38), comme le rappelle J-L Cohen à propos de la rénovation des galeries de peinture espagnoles et italiennes du Louvre, ou du grand hall du palais des congrès de Nantes par exemple (p.48). Voyez l’entrée de la Maison Européenne de la Photo à Paris, comparable à la réception d’un grand hôtel, sans recours à des moyens exceptionnels.

Certains indices identifient les bâtiments d’Yves Lion. Le volume compact, souvent en plot ou en bande, le toit débordant, plat et mince, la régularité des façades par l’ordonnancement des baies, la fenêtre «habitée», une palette réduite de matériaux, la pierre sobrement appareillée, des balcons, des terrasses, sont des caractères de ces architectures. Tous ses bâtiments ont une clarté formelle, perceptible par tous, parfois avec un faux semblant de banalité.

L’auteur rapporte l’intérêt particulier de Lion pour ce qu’il nomme les «bâtiments de série B», remarquables mais négligés, singuliers et non spectaculaires, pourtant acteurs permanents de la ville bien plus que figurants (pp.54-66). Avec cette architecture de «série B», c’est aussi un peu de la banlieue qu’il s’agit. Celle-ci fut et reste pour Lion un terrain de découverte, d’apprentissage, de proposition et de consécration. L’ensemble de logements du quartier des Hautes Bruyères à Villejuif en est une réussite architecturale indéniable.

Cet architecte n’est pas un dogmatique. Jean-Louis Cohen écrit : «Yves Lion refuses to be seen as a theoretician and often makes a point of operating by instinct» (p.28). Hors de toute doctrine, Lion n’en est pas moins actif dans le débat architectural et ses prises de positions publiques comme son enseignement marquent les esprits. Fondateur avec des enseignants de Paris Tolbiac de l’Ecole d’Architecture de la Ville et des Territoires à Champs-sur-Marne à l’ouest de la capitale (1997-2001), il concrétise là encore un travail d’équipe d’une manière presque sportive, comme auparavant lors de plusieurs consultations d’urbanisme. Ainsi on retiendra le groupe Eupalinos Corner pour le concours des Coteaux de Maubuée à Marne-la-Vallée en 1974 (3000 logements et leurs équipements, 2ème prix) et celui d’Hippodamos 93 pour le vaste projet urbain du réaménagement de la Plaine St Denis, débuté en 1991.

Depuis les années 90, l’agence Lion intervient sur des projets d’urbanisme de grande échelle. Nombreuses de ces commandes d’études urbaines découlent d’abord de la décentralisation en marche en même temps qu’apparaissent des rapports différents entre banlieue et nouvelles périphéries. Dans ces projets, Yves Lion vise à établir une «cohérence urbaine» pour résoudre les disparités des urbanisations alentour des agglomérations. La reconquête des particularités géographiques des lieux et des territoires, ces «Urban textures», grâce à une reconnaissance profonde des sites et une pensée de l’espace public élargi – de la route aux bâtiments publics – dirigent ses travaux. Des interventions qui ambitionnent d’étendre l’idée de confort à la ville entière.

«attention aux situations concrètes», aux «pré-existences» (p.52), qui marque une sensibilité particulière envers le contexte s’agissant des projets architecturaux se retrouve également dans les réponses urbaines. Cette confrontation sans conflit dessine une «troisième voie», celle de la «connivence, de la complicité, de la civilité» (p.144) pour étudier des règles d’urbanisme alternatives au laissez-faire croissant ou au contrôle excessif et arbitraire d’une pensée néo-haussmanienne par exemple. C’est dans cet esprit qu’Yves Lion a proposé de construire à nouveau des tours à Paris, autres que des «objets solitaires et hiératiques» (p.126), correctement situées sur le périmètre de Paris, son boulevard périphérique, qui ne cesse d’intéresser l’architecte sur les liens entre le centre et ce qui l’entoure.

Pour exposer cette démarche, J-L. Cohen distingue dans les projets urbains d’Yves Lion trois niveaux de conception. L’un, stratégique, permet d’identifier une situation, l’autre, tactique, de déterminer les interventions nécessaires, enfin l’opérationnel doit guider les multiples intervenants au fil de la réalisation sans les contraindre dans des formes figées (p.146). Les dernières pages de l’ouvrage illustrent cette élaboration méthodique par la présentation décomposée de quatre grands projets actuels (pp.148-151), dont le vaste programme de la Cité de la Méditerranée dans le port de Marseille.

Jean-Louis Cohen, à qui l’on doit de nombreux ouvrages de références, livre ici une publication remarquable en adéquation avec l’œuvre de l’architecte. Depuis la précédente monographie qui lui était consacrée, Yves Lion a étendu ses domaines d’intervention et exploré de nouvelles dimensions. Ces réalisations témoignent d’une grande maîtrise, telle l’Ambassade de France à Beyrouth achevée en 2002, affichée en couverture.


Emmanuel Cros
( Mis en ligne le 09/01/2006 )
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