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L'Inde et ses ombres
Tarun Tejpal   Histoire de mes assassins
Le Livre de Poche 2011 /  8 € - 52.4 ffr. / 604 pages
ISBN : 978-2-253-13350-6
FORMAT : 11x18 cm

Première publication française en Septembre 2009 (Buchet Chastel)

Traduction d'Annick Le Goyat

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Un casting sordide et varié compose ce roman de l'auteur indien Tarun Tejpal, Histoire de mes assassins : d'abord, Mr Sarbacane, éminent journaliste qui, à son bureau comme chaque dimanche matin, apprend à la télévision qu'il a été victime d'une tentative d'assassinat. Les journalistes et la police le questionnent, sondent ses réactions et essaient de découvrir les motifs de l'agression. Mais blasé, Mr Sarbacane continue à mener sa vie, pendant que les autres font de l'évènement une véritable affaire. Par la suite, au tribunal de Delhi, l'homme aperçoit ses assassins, alignés au fond de la grande salle et menottés les uns aux autres. Il s'en moque résolument, alors que sa maîtresse, Sara, s'attache à enregistrer leurs histoires, un effort grâce auquel celles-ci pourront être racontées, au fil de quatre chapitres alternant avec le récit de Mr Sarbacane.

Avec tout d'abord l'histoire de Chaku, garçon chétif qui apprend l'art du couteau pour se venger contre l'injustice empoisonnant sa vie ; puis celle de Kabir M, garçon délicat, issu d'une famille musulmane, qui apprend de son père l'art de la clandestinité... et la peur, car son père a peur, marqué pour toujours par le massacre de ses cousins lors de l'exode massif qui fit suite à la partition de l'Inde. Kabir apprend le larcin comme moyen de sentir la liberté, et s'intègre grâce à ses talents de voleur dans un gang, pour fuir la peur au contact de leur arrogance, et, enfin, se sentir en sécurité derrière les barreaux de la prison, où il s'efforce de rester le plus longtemps possible. Le récit de Kaliya et de Chini est le troisième du roman : Kaliya vient d'une famille nomade de gardiens de serpents ; Chini a débarqué un jour à la gare de Delhi, abandonné dans un train venu de Chine. Tous deux vivent avec un gang d'enfants sur les quais de la gare. Le dernier assassin est Hathoda Tyagi, surnommé «curry de cervelle» parce qu'il manie le marteau pour venger le viol de ses sœurs...

La narration de Mr Sarbacane amuse ; personnage cynique et désagréable, il dépeint un monde sous les couleurs d'un cirque où se mettent en scène politiciens, puissants et avocats. Ces derniers, au tribunal, sont ainsi à ses yeux avant tout des «pingouins». Sa perspicacité n'éclaire certes pas tout de sa propre vie, mais elle offre une peinture acide de la corruption, de l'avidité et de l'absurdité fondant cette société. Les histoires des différents assassins offrent le même regard mordant et extrêmement perspicace, mais leurs teintes sont moins claires et ne se distinguent pas toujours du récit de Mr Sarbacane. On entre dans le vie de chacun de ces parias, autant d'existences contraintes par les forces politiques, économiques et sociales : emblématiques des classes laborieuses, ils n'en sortiront pas...

D'où cette empathie voulue par l'auteur. Tarun Tejpal parvient à communiquer pour chacun de ces assassins un réel sentiment de respect chez le lecteur, pour les souffrances endurées, pour les combats menés, pour les décisions prises. On saisit chaque existence, et l'on comprend ces émotions et circonstances qui ont poussé chacun de ces hommes au crime. L'identification opère pour chacun des assassins.

Cependant, ces récits ne sont pas aussi intéressants qu'ils auraient pu l'être, étant donné le sujet du roman, l'Inde dans son entier. Les histoires des assassins suivent toutes à peu près la même trame ; plutôt linéaires, elles commencent avec l'enfance - le temps de l'innocence - quand la cruauté de la vie entame son travail sinistre ; est ainsi dépeinte la chute progressive dans la criminalité. Après qu'on a saisi la formule, celle-ci devient répétitive et le fond commence à lasser. On peut également reprocher au roman sa représentation de la violence et des femmes. Certaines descriptions révèlent en effet une fascination ambiguë pour la violence, dépeinte d'une manière dérangeante. Quant aux femmes, si le roman cherche à anoblir les assassins, elles ne recueillent quant à elles aucune dignité. Le personnage de Sara, femme pourtant très forte et toujours fidèle à ses convictions, est assombri par le mépris de son amant Mr Sarbacane dont les fantaisies sexuelles la réduisent à l'état de simple objet, impuissant et sans valeur.

De la sorte, Histoire de mes assassins révèle dans son entreprise d'éclairage sur l'Inde, en partie réussie, ses propres parts d'ombre...


Lisa Jones
( Mis en ligne le 30/05/2011 )
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