|
Poches -> Littérature |
| |
Le diable s’appelle Jean-Louis | | | Marc Lambron Théorie du chiffon Le Livre de Poche 2011 / 6 € - 39.3 ffr. / 160 pages ISBN : 978-2-253-15787-8 FORMAT : 11cm x 18 cm
Première publication en janvier 2010 (Grasset) Imprimer
On aime, on a beaucoup aimé Marc Lambron, son élégance distante, sa nonchalance affectée, son style de chroniqueur mondain passé par Normale Sup, cette nostalgie discrète qui souvent teinte ses textes. On attendait donc avec gourmandise son nouvel ouvrage, dautant quil se passe dans les milieux de la mode, et que, le sachant naguère éditorialiste au Figaro Madame, on se réjouissait davance.
Hélas, une fois nest pas coutume, ces attentes sont déçues. Marc Lambron construit sous forme de dialogue entre une journaliste de mode (Hélène Dumas) et un grand couturier (Jean-Louis Beaujour), un ensemble de remarques qui se veulent profondes à force dêtre légères sur le monde de la mode, la société, les princesses et les bourgeoises, les femmes et leurs courtes ambitions. En écho lointain, le souvenir des Liaisons dangereuses. Quelques formules font mouche («les très jolies filles ont un destin de footballeur, on a tendance à les mettre à la retraite après lâge de trente cinq ans»), mais le romancier sy essaye de façon tellement visible, tellement systématique, que le lecteur (la lectrice ?) est vite rassasié et que le découragement sinstalle.
De quoi veut-il nous convaincre ? Que lunivers de la mode nest qu'apparence ? On sen doutait un peu... Que largent ne fait pas le bonheur ? Sans doute... Quun couturier est un artiste, créateur - du moins certains ? Qui le niera ? Son couturier simpose et les dernières pages veulent persuader les lecteurs quil est démoniaque : le diable shabille, etc
Certains chercheront avidement des clés, Marc Lambron en brandit quelques-unes, dissimule davantage les autres mais, de toute façon, le manège sépuise assez vite. La société celle-ci du moins - est frivole, certes ! Il y campe avec drôlerie une galerie de femmes : la divorcée («Les divorcées, je les reconnais. La perte de poids et les jupes plus courtes. Elles flottent, elles ont lair de descendre du bateau avec le mal de mer, on dirait quelles ont entortillé leur ressort. Beaucoup sont en deuil de leur proie préférée, elles viennent souvent me parler comme si je tenais une agence de rencontres. Au bout de quelques mois, elles redeviennent radioactives
On les voit se promener parmi les maris des autres comme des chasseresses dans un parc de daims»), la femme émancipée, la quadragénaire, la néo-quinquagénaire attendrissante de puérilité romantique, et même la femme idéale. Les clichés se déclinent tout au long des Séquences suivies de chiffres romains, qui remplacent les trop communs chapitres. La Séquence VI inclut même quelques paragraphes érotiques : homme de goût, le couturier est aussi bibliophile et commente à son interlocutrice les gravures dune édition rare
Marc Lambron comblera sans doute les attentes de la majorité des lectrices, réconfortées de découvrir que les riches ne sont pas forcément heureux ni intelligents, que les contes de fées sont épuisés et que les machines à rêve tournent fou ; cela ne fait pas pour autant des deux héros des gens profonds.
Un texte vachard, intelligent et même brillant mais ce nest pas suffisant pour faire un livre. Passons et reportons notre espoir sur le prochain ouvrage
Marie-Paule Caire ( Mis en ligne le 25/07/2011 ) Imprimer
A lire également sur parutions.com:Les Menteurs de Marc Lambron Mignonne, allons voir... de Nicolas Ducimetière Une saison sur la terre de Marc Lambron | | |
|
|
|
|