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Eros et Thanatos malmenés
Agnès Desarthe   Dans la nuit brune
Seuil - Points 2011 /  6.50 € - 42.58 ffr. / 232 pages
ISBN : 978-2-7578-2469-6
FORMAT : 11cm x 18cm

Première publication en août 2010 (L'Olivier)
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Ça commence exactement comme une pièce de théâtre, dont le drame initial serait la locomotive qui entrainerait troubles et résolutions à venir. Ça pose, sans cesse, de nouveaux problèmes. Ça se termine comme une fin de séance chez le psychothérapeute. On n’a pas le sentiment d’avoir tout compris, mais ça va mieux parce que c’est terminé.

A première vue, le livre d’Agnès Desarthe ressemble à un joli «roman de femmes», en ce qu’il insiste sans violence mais avec compassion sur les thèmes de la prise de conscience, les émotions et les relations entre les êtres. L’évocation de ces enjeux humains requiert des qualités d’écriture sinon féminines en tout cas de surexposition du système nerveux, en même temps qu’une extrême délicatesse. On s’attend à souffrir avec les personnages, et c’est d’abord en cela que le pari est tenu. Dans la nuit brune est le roman de l’oubli et de la perte. Oubli de son histoire personnelle ; perte du sens à lui donner. Cette visée risquée se révèle au fil des pages assez scabreuse dans son traitement.

La romancière raconte l’histoire de Jérôme, père de famille célibataire d’une jeune fille, Marina, 18 ans, qui vient de perdre son petit ami, Armand, dans un terrible accident de moto. Ce deuil va bouleverser Jérôme au point qu’il ne comprenne pas pourquoi. Il va se mettre à réfléchir sur ses origines familiales, à son mariage raté, au sens qu’il donne à sa vie morne et silencieuse, à son destin d’enfant trouvé dans la forêt. Puis Jérôme rencontre Vilno Smith, la belle Écossaise incongrue qui deviendra sa maîtresse. Et l’inspecteur Alexandre Cousinet, son «ami», qui aurait bien voulu être son amant, qui mène l’enquête sur la mort d’Armand, presque concomitante avec la disparition d’une jeune fille dans la même commune. A toutes ces initiales complications se noue une histoire peu claire de Juifs persécutés pendant la Seconde Guerre mondiale. C’est un peu le bouquet final et l’engrenage prévisible des romans émouvants. La mère adoptive de Jérôme était juive et, dans sa première vie, elle a perdu un mari et des enfants en déportation. Ça devrait faire le bruit d’une porte qui claque, ou au moins le grincement. Ça nous enfonce simplement dans un pathos auquel on ne souhaite vraiment plus croire. La porte est mal fermée, et le roman, mal fini.

L’intrigue de Dans la nuit brune ressemble à celle d’un roman policier, mais on y décèle trop d’onirisme pour que l’irrationnel ne vole pas la vedette à l’énoncé brut des évènements. Qui plus est, tout cela est évoqué dans un style assez psychologisant et quelque peu infantilisant. Des dialogues ou des formules emphatiques ralentissent les phrases ; en cherchant à les adoucir, elles sont rendues molles. Dans un roman policier, tout fait compte. Dans le roman d’Agnès Desarthe, tous sentiments, souvenirs, impressions ou émotions servent à assembler ce puzzle complexe. Sa genèse semble souffrir ici et là d’un manque de tenue, d’une vitesse narrative négligée, d’événements inconsidérablement trainés en longueur, d’autres qu’on aurait souhaité voir explicités. Une impression bancale de traumatismes à répétition brassés dans le mélodrame étreint le lecteur jusqu’à la dernière page. La complaisance psychanalytique à toute épreuve (clés perdues, avortements et Juifs gazés, fausse grossesse, os retrouvés, rêves d’enfant, etc.) achève de faire de ce roman, s’il a au moins été agréable à écrire, un pénible exercice de lecture.

Un livre «difficile». Éros et Thanatos mis à l’épreuve du cliché.


Sophie Labouheyre
( Mis en ligne le 21/10/2011 )
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