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La fée des Carpates, été 1976
Lola Lafon   La Petite communiste qui ne souriait jamais
Actes Sud - Babel 2015 /  8,70 € - 56.99 ffr. / 320 pages
ISBN : 978-2-330-05120-4
FORMAT : 10,5 cm × 17,5 cm

Première publication en janvier 2014 (Actes Sud)
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Montréal, 17 juillet 1976, une enfant prodige s’élance, le monde découvre la grâce et la perfection de Nadia Comaneci, petite gymnaste roumaine de 14 ans.

Auteur de plusieurs romans dans lesquels, entre autres choses, elle dénonce le capitalisme, Lola Lafon, qui a grandi en Roumanie avec des parents professeurs et militants, explore dans cette très belle biographie fictive de Nadia Comaneci (c’est un roman) la manipulation d’une sportive par le système communiste mais aussi par celui du marché. La construction du livre est équilibrée par le dialogue fictif entre la gymnaste et la narratrice qui essaie de reconstituer son parcours jusqu’en 1990.

C’est un livre sur le corps, le temps qui passe et le transforme en objet de désir, sans comprendre. Mais Nadia échappe au temps, dérange les règles et les certitudes, elle est ailleurs dans son monde. Ce roman retrace le destin d’une fée gymnaste qui, dans la Roumanie des années 80 et sous les yeux émerveillés de la planète entière, vient mettre à mal la guerre froide, les ordinateurs et les records.

Tout commence par l’image incroyable d’un ordinateur devenu fou, attribuant la note de 1,00 au lieu de 10, note pas encore paramétrée, la perfection n’étant pas au programme. Personne n’a jamais vu une telle grâce et une telle puissance chez une enfant de cet âge. Mais le sport de haut niveau est une folie et une souffrance : «On lui bande les chevilles. Son tendon d’Achille est gonflé et forme une excroissance protégée d’une mousse retenue d’un scotch, stigmate des nombreuses fois où elle a heurté du pied la barre la plus basse. Ses genoux s’infiltrent de liquide, une réaction aux chocs répétés. Il fait veiller à ce que les ampoules ouvertes de ses paumes ne s’infectent avec la poussière du sol et de la magnésie».

Elle vient d’un pays que, en 1976, personne ne connaît, accompagnée d’un entraîneur mythique hongrois, Bela Karolyi. Nadia est une héroïne du travail socialiste, choyée par les Ceaucescu ; lui, dictateur implacable dans son pays (la Securitate écoute tout le monde, la délation est récompensée), sympathise avec Washington et irrite Moscou. Les Roumains doivent l’appeler «Etoile polaire pensante» ; Elena son épouse, plus dure que lui, est «la plus grande scientifique de renommée internationale» grâce à une thèse falsifiée sur les polymères. Il n’est pas facile pour une enfant de tenir sur une poutre dans ce monde anormal où, malgré les hivers glaciaux, la température des habitations est limitée à 14°. «Les gymnastes mangeaient peu, elles étaient très rentables trop jeunes pour émettre une opinion sur ce qui se déroulait dans le pays, elles ne demandaient pas l’asile politique à l’occasion d’une quelconque compétition à l’Ouest».

Ce sont des robots communistes fabriqués. Pendant que la petite fée apparaît sur la scène médiatique, à l’Ouest apparaissent deux poupées de douze ans, apprenties prostituées trop maquillées dans Taxi Driver pour Jodie Foster et La Petite pour Brooke Shields, qui alimentent les fantasmes masculins. Ce sont des filles libres alors qu’à l’Est le corollaire est un régime alimentaire insensé, pas de vie sexuelle ni de vie sociale. Mais c’est la seule fois où les petites filles de l’Ouest veulent ressembler à une fille de l’Est.

Puis c’est le passage du corps d’enfant à celui de femme, «la petite fille s’est muée en femme, verdict : la magie est tombée», titre Libération en 1980. C’est un procès hormonal fait à une fille qui n’a pas le droit de grandir. C’est le portrait d’une enfant puis d’une femme évadée de la pesanteur, et dont l’existence est dévolue à la recherche de la perfection. «Je suis le produit de ce système-là, je ne serais jamais devenue championne dans votre pays (…) tout a été gratuit, l’équipement, l’entraînement, les soins (…) Pendant les années 90 il était de bon ton de haïr notre passé comme s’il n’y avait rien eu de bon du tout sous le régime communiste».

On connaît la fin de l’histoire : Nadia fuit aux USA le 28 novembre 1989 et, fin décembre, les deux dictateurs sont déchus et assassinés.


Eliane Mazerm
( Mis en ligne le 27/05/2015 )
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