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Comédies goldoniennes
Carlo Goldoni   Le Café - Les Amoureux
Flammarion - Garnier Flammarion 2001 /  8.24 € - 53.97 ffr. / 352 pages
ISBN : 2-08-071109-1
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Carlo Goldoni (1707-1793) est l’homme qui, au milieu du XVIIIe siècle, révolutionna le théâtre comique italien. En ce temps-là, la commedia dell’arte tournait en rond et s’épuisait On sentait l’urgence de renouveler à la fois la technique théâtrale et les sujets, la forme et le fond. Aux environs de la quarantaine, Goldoni entreprit de s’y employer, progressivement mais résolument, après avoir exercé des activités diverses dans plusieurs grandes villes d’Italie (étudiant en droit à Padoue, avocat à Venise où il était né, puis à Pise, secrétaire d’un ambassadeur à Milan, consul de la République de Gênes…) et couru bien d’autres aventures, amoureuses, financières et même militaires. De cette existence fantasque et mouvementée il tirait une expérience étendue et concrète des hommes et des choses, qui allait nourrir longtemps une oeuvre abondante (150 comédies), variée et largement originale.

Son champ d’observation, c’est la bourgeoisie montante, cette classe nouvelle qui était déjà entrée dans la littérature en France un siècle plus tôt par la voie, inconfortable pour elle, de la satire, mais qui, en Italie, tardait à y pénétrer. Installé principalement à Venise, où la classe des marchands tenait le haut du pavé (ou la berge des canaux), Goldoni va en faire à la fois sa matière et son public. Mais aussi, en quelque sorte, sa cible pédagogique. Car sa conviction est que le théâtre n’est pas seulement un spectacle, mais une action capable d’améliorer le comportement des hommes en dénonçant leurs ridicules et en leur donnant confiance dans leurs possibilités. Exploration psychologique et sociale, la comédie goldonienne se pense comme une oeuvre dynamique, un moyen d’identifier les responsabilités humaines à l’égard du réel et d’insuffler à l’homme l’énergie nécessaire à la fois pour se regarder en face, pour maîtriser les situations qu’il rencontre ou qu’il crée, et pour s’efforcer au progrès.

En un siècle où se répandent les "Lumières" et où le persiflage est l’un des beaux-arts, les armes de Goldoni sont la lucidité et l’humour, servis par une technique théâtrale neuve (abandon du canevas au profit du texte entièrement écrit ; disparition des masques au profit des vrais visages) et par un goût et une connaissance profonde des exigences de la scène et du métier d’acteur. Toutes ces qualités ont rencontré un succès considérable, malgré les vives attaques d’adversaires obstinés.

Dans ses dernières années de fécondité, toutefois, Goldoni dut ressentir, en même temps que la victoire de sa révolution dramaturgique, l’échec de son effort social. Cette bourgeoisie italienne, qu’il espérait contribuer à promouvoir, n’était pas promise dans l’immédiat au rôle majeur que la sympathie du poète lui assignait : elle était trop fragile, trop entichée du style décadent de l’aristocratie, trop fermée à un peuple vigoureux seul capable de la vivifier. Lorsqu’il finit par quitter Venise pour tenter de conquérir Paris, à 55 ans, Goldoni était désenchanté ; il le fut bientôt davantage en constatant que Paris, loin de lui apporter un second souffle, le marginalisait sans beaucoup d’égards pour son passé. Il trouva refuge à la cour de Versailles, où il enseigna l’italien à la fille de Louis XV puis aux soeurs de Louis XVI, et se consacra enfin à la composition de ses Mémoires, écrits en français, pour faire revivre dans la seule langue européenne de l’époque ce grand passé enfui.

Flammarion réédite, en édition bilingue, deux pièces très différentes, dont chacune illustre un aspect caractéristique de ce théâtre si riche. La première, Le Café (1750), se propose de peindre pour la première fois, comme nous l’explique le présentateur et traducteur de l’oeuvre, Norbert Jonard, non pas une passion ou un caractère, mais un milieu, les relations tissées entre les personnages, leur appartenance sociale et professionnelle. La seconde, Les Amoureux (1759), composée en quinze jours, est à l’inverse une étude de caractères qui met en scène "un amour partagé et néanmoins autodestructeur", de sorte que les deux amants éclipsent les autres personnages et deviennent "les sujets principaux de la comédie". Ces textes sont d’autant plus attachants que la traduction de N. Jonard est très enlevée et très vivante : un dialogue incisif, naturel, sans fioritures "littéraires" ; une histoire qui court allègrement. La présentation est fouillée, la bibliographie, suffisante.

On regrette un peu que les notes, en tout petit nombre, soient renvoyées en fin de volume, et que la vie de Goldoni ne fasse pas l’objet d’un récit détaillé à la place d’une brève chronologie. Mais il reste que Le Café et Les Amoureux sont deux excellents exemples, bien qu’ils aient vieilli, d’un talent qui fut reconnu en son siècle et qui peut encore procurer un réel plaisir.

NB. On trouve dans d’autres volumes de la même collection Arlequin serviteur de deux maîtres, La Locandiera, Les Rustres, La plaisante aventure, La manie de la villégiature, Barouf à Choggia, L’Eventail, Le Bourru bienfaisant.


Guy Bégué
( Mis en ligne le 02/05/2001 )
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