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Les Illusions perdues de Kazuo Ishiguro | | | Kazuo Ishiguro Quand nous étions orphelins Gallimard - Folio 2001 / 7.60 € - 49.78 ffr. / 512 pages ISBN : 978-2-07-035946-2 FORMAT : 11cm x 18cm
Première publication en août 2001 (Calmann-Lévy). Imprimer
Plus de dix ans après Les Vestiges du jour, magistralement adaptés au cinéma, le cinquième roman de Kazuo Ishiguro paraissait en France en 2001 (aujourd'hui en poche chez Folio). Un des événements de la rentrée littéraire, nous assurait-on. Ce genre de rumeur place toujours les livres dans une position inconfortable. Ne sont-ils pas tout à fait à la hauteur de nos espérances, et voilà quils se voient durement critiqués, même par les plus indulgents
Quand nous étions orphelins en décevra sûrement beaucoup. Une intrigue assez pauvre, peu de descriptions (les villes de Shangaï et de Londres où évolue le héros sont à peine évoquées), des dialogues pas toujours captivants, laissent le lecteur sur une impression dinachevé, le sentiment quil y a là une matière romanesque qui naurait pas vraiment pris corps.
Mais justement, cette matière romanesque existe. Ishiguro a veillé à la rendre la plus discrète possible, de sorte que la forme ne prenne jamais le pas sur le sens quil voulait donner à son livre. Avec une remarquable économie de moyens, lécrivain est parvenu à dessiner un monde à la lisière du réel et de lunivers mental du héros, sans jamais verser ni du côté du réalisme ni du côté de lonirisme. Ishiguro - Quand nous étions orphelins rejoignant ici Les Vestiges du jour - semble avoir banni lérotisme de ses romans. Comme si celui-ci était étranger à ses personnages qui évoluent dans lair purifié de lidéal. Est-ce là une manière de renouer avec une certaine tradition romantique ?
Christopher Banks est le héros dun roman de formation dont le mouvement est à rebours, tout à la quête dun passé à la fois politique, familial et individuel. Il sagit de ressaisir la genèse de sa vocation de détective, à laquelle il a donné le sens dune mission : celle de "déraciner le mal dans ses formes les plus perverses". Et lévénement inaugural de cette quête nest rien moins que la disparition de ses parents, sur fond daffaire politico-financière, dans la Concession internationale du vieux Shangaï.
Quand nous étions orphelins est en quelque sorte les "Illusions perdues" de Kazuo Ishiguro, qui joue ici savamment sur un va-et-vient temporel, loscillation entre le monde des adultes et celui de lenfance. Les pages sur lamitié comme sur limaginaire enfantin toujours enclin à interpréter le monde du côté du merveilleux, sont parmi les plus belles du livre.
Sans jamais verser dans le manichéisme, ce roman apparaît comme une fable sur les rapports de linnocence et du mal, dans une intimité plus profonde quon ne veut le croire et l'accepter.
Thomas Regnier ( Mis en ligne le 16/12/2009 ) Imprimer | | |
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