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La chute de l'ange
Sylvie Germain   L’Inaperçu
Le Livre de Poche 2010 /  6.50 € - 42.58 ffr. / 245 pages
ISBN : 978-2-253-12951-6
FORMAT : 11cm x 18cm

Première publication en août 2008 (Albin Michel)
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Tout commence un vingt-deux décembre. Ce soir-là, le chemin d'un curieux père Noël croise celui d'une jeune mère au bord de la crise de nerfs. Elle ne le connaît pas ; pourtant, peu de temps auparavant, les enfants de cette femme ont posé avec lui à la sortie des Galeries Clasquins, accompagnés par leurs grands-parents. En début d'après-midi, il ne savait rien de la famille ; quelques heures et deux rencontres fortuites plus tard, le regard de Pierre Zébreuse s'était posé sur chacun des Bérynx, et ce qui aurait dû n'être qu'un banal échange va bouleverser leurs existences.

Dans cette famille bourgeoise des années 1960, la mort de Georges a planté des germes étranges, a fait voler en éclats le fragile équilibre de la tribu. En effet, en s'écrasant contre un platane, le fils de Charlam et d'Andrée, le mari de Sabine, le père d'Henri, des jumeaux Hector et René, de Marie, a laissé un vide : de cet abîme, certains s'échappent et continuent de vivre tandis que d'autres y croupissent, d'autres y meurent. Surgissant d'une façon imprévue, Pierre introduit dans le foyer une bizarrerie qui exaspère les uns et stabilise paradoxalement les autres ; double fantômatique de Bobi, le jongleur errant aux multiples talents campé par Jean Giono dans Que ma joie demeure, il partage avec lui la patience, le goût du rire et du silence, la fantaisie – et des failles aussi douloureuses que soigneusement cachées, par où s'engouffre une angoisse terrible.

Arrivé de nulle part, il ne s'installe pas vraiment dans la maison familiale. Il en est plutôt le bon génie, celui qui dessille les yeux et ouvre les coeurs. Et, comme sur les hauts plateaux provençaux, le prophète vagabond offre aux autres un bonheur dont il est dépourvu. En donnant à chacun la force d'accomplir ses rêves, Pierre Zébreuse a révolutionné plus que l'existence des Bérynx.

Saga familiale brodée sur une puissante trame sociale, L'Inaperçu propose une réflexion multiple sur le thème de la fragilité. Chaque personnage révèle ainsi, peu à peu, les blessures que le secret a empoisonnées. Des correspondances entre «petite» et «grande histoire» sur fond de folie et d'amour viennent rythmer le récit ; corps et âmes mutilés échangent des souffrances, des peurs, des espoirs. L'Inaperçu, c'est une vision de l'invisible, les mots de l'indicible quand la famille est détruite à sa racine, par la mort ou par la folie, par l'incapacité à se conformer aux conventions ou par la soumission muette à des règles implacables, et que ses membres disloqués à leur tour ne savent plus comment vivre. Ceux qui décident d'échapper à l'enfermement auquel les programme la société doivent supporter d'être rejetés à sa marge, sans ménagement ; ceux qui s'y résolvent entrent dans une hibernation morbide.

Saisir le monde par le langage devient impossible quand la personne, privée de toute filiation, flotte sans attache ; elle dérive alors portée par des fictions dans lesquelles elle se noie en même temps. L'image acquiert dans ce contexte une valeur particulière. Sans doute est-ce la raison pour laquelle photographie, dessin et peinture – avec de magnifiques développements sur les toiles et la philosophie de Rothko – prennent tant de place dans ce roman où la perception fugitive est au cœur de l'intrigue. Elles immortalisent des sentiments humains et englobent l'individu dans un cadre qui le dépasse. Elles évoquent l'harmonie et la beauté. Elles sont autant d'éclats du passé dans le présent, de rupture dans la chaîne du temps.

Avec cet ouvrage savamment construit, Sylvie Germain entraîne donc le lecteur dans une sarabande un peu fantasque, un conte mettant en scène des émotions à fleur de peau et des projets mûrement réfléchis, la mesquinerie absolue et le désintéressement le plus pur ; l'écriture est au service de ces variations de ton, et L'Inaperçu exhale en dépit de tout une joie de vivre contagieuse.


Aurore Lesage
( Mis en ligne le 10/06/2010 )
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