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Poches -> Littérature |
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Chant pour une terre perdue | | | Mathieu Belezi C'était notre terre Le Livre de Poche 2010 / 7,50 € - 49.13 ffr. / 507 pages ISBN : 978-2-253-13333-9 FORMAT : 11cmx18cm
Première publication en août 2008 (Albin Michel) Imprimer
Mathieu Belezi nest pas un auteur très connu du public, même sil a déjà publié quelques textes. Cétait notre terre devrait faire découvrir au grand public un auteur original.
Un texte ambitieux et fort, qui se déploie comme un chant incantatoire à six voix. Chacune dit, crie, pleure sa vérité sur la terre commune : lAlgérie perdue, lAlgérie des années 30, celle des années 60. Six voix : Hortense, fille de colons aisés, les Saint André, qui a hérité du domaine de Montaigne à Cassagne, aujourdhui Zoubir, née en Algérie et qui y mourra. Hortense dont la vie a été un vaste gâchis, et qui saccroche jusqu'à la fin à une Algérie imaginaire construite par ses aïeux. Ernest son mari, un incapable, qui oublie sa médiocrité en courant la nuit les bordels du bled et en senivrant le jour. Les deux filles, Marie-Claire et Claudia, aux destins opposés : lune nonne sans véritable vocation, et lautre épouse respectable, deux survivantes sans espoir, murées dans leurs folies personnelles, cherchant à tout prix à retenir le temps, à retrouver une belle époque définitivement perdue, quelles évoquent dans un décor de pacotille. Antoine, le fils qui refuse le destin quon lui assigne et sengage pour la cause du FLN. Fatima, la servante au cur simple, qui accompagne la famille tout au long de son histoire.
Six voix qui se répondent au-delà de la mort, au-delà des mers, au-delà des années, qui disent la beauté de la terre algérienne, la joie des souvenirs ensoleillés denfances heureuses, lhorreur de la guerre civile, la violence constante et la folie qui sinstalle progressivement, le rêve ultime et vain de repartir, de retourner au pays, en dépit de tout.
Un beau roman sur la dépossession, sur les différentes formes de misère, qui ne saccompagnent pas nécessairement de pauvreté matérielle ; un texte qui sinterroge sur le «rapatriement» : comment peut-on être «rapatrié» alors quon na quune terre, celle de sa naissance, quon laime ou quon la haïsse ? Un texte aussi sur lenfermement, la succession impitoyable des générations et des rapports de domination, la répétition inexorable. LAlgérie sous toutes ses facettes, jour et nuit, chaleurs écrasantes, sirocco étouffant
terre de beauté et de terreur.
Un texte obsédant, obsédé, des phrases aussi interminables que les souvenirs qui se déroulent, qui remontent pour dire la douleur, la folie, les folies des différents acteurs, et raconter sous plusieurs angles lhistoire de la perte de lAlgérie. Six voix déchirées et contradictoires, qui saffrontent. On simmerge dans ce texte - presque fait pour être lu à haute voix -, qui malgré quelques longueurs et quelques facilités, fascinera.
Marie-Paule Caire ( Mis en ligne le 31/03/2010 ) Imprimer
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