|
Poches -> Histoire |
| Antony Beevor La Chute de Berlin Le Livre de Poche 2004 / 7.50 € - 49.13 ffr. / 634 pages ISBN : 2-253-10964-9 FORMAT : 11 x 18 cm
Première édition en 2002 (Bernard de Fallois) Imprimer
La Chute de Berlin nest pas seulement le récit de linexorable mouvement de lArmée Rouge vers la capitale du Reich entre la fin de lannée 1944 et les premiers mois de 1945. Cest aussi la chronique dune débâcle militaire et politique sans précédent, celle de lAllemagne nazie, ses derniers soubresauts, la fin dune société, tandis que lOurs soviétique se rue impitoyablement vers lOuest dans un combat qui préfigure déjà ce que seront les années qui suivront la capitulation allemande.
Antony Beevor, ancien officier et historien britannique (qui sétait déjà essayé dans le registre de lhistoire des grandes batailles avec un brillant Stalingrad), a un don incontestable de conteur. Car le mérite premier de cet ouvrage est de ne pas lasser le lecteur avec la simple énumération des offensives, contre-offensives, percées et reculades, des différents et nombreux corps darmées en présence, marchant donc pour les uns vers Berlin (Américains et Soviétiques), défendant pour les autres ce qui peut encore lêtre (Wehrmacht, Waffen SS allemands et étrangers).
La Chute de Berlin sattache aussi à décrire les univers, finalement pas si dissemblables que cela, dans lequel se meuvent les hiérarques politiques et militaires (lesquels dailleurs se confondent) soviétiques et allemands. Berlin, dans lesprit du soldat russe, cest la revanche de Stalingrad, avec, pour pendant, la loi du Talion : 1941 ne restera pas impuni. Les Allemands le devinent dailleurs, la propagande ne manque dailleurs de le leur rappeler, doù cette course gigantesque et effrénée des populations vers lOuest. Et il est vrai que les premières régions traversées par lArmée Rouge, Prusse Orientale ou Silésie, gagnent, dans le sang et la souffrance, leurs galons de martyres : viols, meurtres, pillages et destructions sy succèdent avec frénésie. Il faudra encore quelques mois pour que les autorités de Moscou commencent à sinquiéter des exactions dune armée naturellement indisciplinée et stoppent une propagande qui faisait de lAllemand linhumain absolu, tout cela pouvant en effet nuire à leur future politique de colonisation de lEurope de lEst.
Côté allemand, le lecteur est convié, par des témoignages nombreux et variés, de lhomme de troupe à lattaché détat-major, à vivre les dernières heures dans les caves de Berlin ou dans le Führerbunker. Il flotte dans ce dernier comme une ambiance fin de règne, où se mêlent sexe et alcoolisme débridés, avant les trahisons (Himmler), les adieux, le poison et les suicides des derniers survivants qui ont porté le Reich depuis 1933. Alors que les derniers débris de lArmée allemande, se battent pour lhonneur, non plus pour un régime quils ont appris peu à peu à abhorrer, mais pour ne pas tomber aux mains des «Ivans».
Antony Beevor excelle à nous retranscrire les différentes ambiances, quelles aillent des beuveries des hommes de troupe aux orgies des états-majors affolés. En même temps, son récit annonce les grandes lignes de partage de laprès-guerre, idéologiques, militaires et politiques. On regrettera avec lui lincroyable cécité américaine (celle de Roosevelt, il est vrai mourrant, celle dEisenhower) devant le mensonge et la paranoïa soviétiques (Staline, Beria) posés en système de gouvernement, tandis quun Churchill, sans doute plus visionnaire, se battait, mais en vain, pour que la course vers Berlin soit gagnée par les forces alliées occidentales. La face de lEurope sen serait trouvée changée. Mais cest une autre histoire !
Alexis Vialle ( Mis en ligne le 07/10/2004 ) Imprimer | | |
|
|
|
|