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Bande dessinée -> Autre |
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Rencontre du troisième type et de sa copine | | | Manuele Fior L’entrevue Futuropolis 2013 / 24 € - 157.2 ffr. / 176 pages ISBN : 978-2-7548-0583-4 FORMAT : 21,5X29 cm Imprimer
Par bien des côtés, Manuele Fior est lauteur de bandes dessinées modèle. Celui qui maîtrise dun bout à lautre le processus de fabrication dun album. Tout dabord, il dessine bougrement bien, ce qui est un bon début ; ensuite parce quil sait trouver une histoire intéressante ; et enfin parce quil sait la raconter brillamment grâce à tous les mécanismes narratifs proposés par la bande dessinée. Il ny a quà voir quelques pages de ce nouveau livre. Il y a ces séquences remplies de petites vignettes (dynamisme, accélération), qui débouchent sur une grande image (révélation, arrêt brutal de ce rythme effréné). Il y aussi ces moments de silence, laissant les seules vignettes et leur agencement instaurer une ambiance, un rythme oscillant entre contemplation et simple description. Il y a encore ces moments de noir total, lorsque lon devine ce qui se passe malgré tout. Il y a ces zooms et ces dézooms, lorsque laction insiste sur un événement ou au contraire cherche à sen éloigner. Il y a enfin ces « plans fixes », lorsque le cadrage ne change pas dune case à lautre, marquant aussi bien lennuyeux temps qui passe que le parler pour ne rien dire. Tous ces éléments sont parfaitement utilisés par Fior et bien entendu ce découpage ne « se voit pas », et le lecteur, emballé, glissera sur ces pages et ces procédés avec la simple impression de voguer naturellement, de façon aussi efficace quévidente, porté par un récit tout à la fois mystérieux, poétique et surprenant.
Lhistoire est celle de Raniero, un psychologue dune cinquantaine dannées qui doit faire simultanément face à trois événements importants : un divorce, une jeune patiente attirante, et une apparition mystérieuse dans le ciel. La jeune malade, cest Dora, qui elle aussi a été témoin de ces signaux étranges. De drôles de lumières qui volent sans bruit comme annonciatrices de quelque chose dimminent, dimplacable et bouleversant. Et si les hirondelles font le printemps (comme on le voit dans une très belle double page), les OVNIs peuvent-ils changer le monde ?
On le voit vite à la lecture, la science-fiction dans ce récit nest pas ce qui intéresse le plus Fior. Le futur est ici simplement résumé à quelques petits changements: des voitures télécommandées, un mur dimages au-dessus du lit... les visions anticipatrices nintéressent pas Fior, on napprend dailleurs que vers les dernières pages à quelle époque se situe réellement ce récit. Il en résulte une impression dinquiétante étrangeté, lorsque ce quotidien que lon pensait connaître savère finalement subtilement différent. Le genre est ici un décor pour faire avancer le récit qui parle avant tout de personnes et de relations intimes. Cest comme chez Resnais (Je taime, je taime), Tarkovski (Solaris), ou même Vehlmann (Les Derniers Jours dun Immortel, également chez Futuropolis), de la science-fiction de poésie, de la SF molle et pas hardcore pour un sou. Une science-fiction à limage de ces soucoupes volantes, sorte de cocottes en papier lumineuses qui flottent dans lair avec grâce. Sans doute les plus beaux OVNIs de la bande dessinée !
Fior sintéresse avant tout à ses personnages, et en première ligne, Raniero, un monsieur tout-le-monde moustachu un peu bedonnant, gentil, travailleur, mais aussi un peu perdu. Le voilà confronté à une jeunesse néo-hippie, légère et sans complexes et ses idéaux naïfs. Dabord méfiant, lhomme se sent de plus en plus titillé par la nouveauté, la différence.
Constamment plongé dans des gris doux, le beau graphisme feutré de Fior termine de donner à cet album des allures doeuvre-phare, mètre étalon dune certaine bande dessinée daujourdhui.
Alexis Laballery ( Mis en ligne le 22/04/2013 ) Imprimer | | |
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