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Bande dessinée -> Manga |
| Keiji Nakazawa Gen d'Hiroshima (tome 3) Vertige Graphic 2004 / 15.00 € - 98.25 ffr. / 259 pages ISBN : 2-908981-86-6 FORMAT : 17 x 24 cm Imprimer
Gen et sa mère Kyo poursuivent leur errance sans fin dans un Japon apocalyptique post-atomique. Ils sont finalement recueillis par Kimié, une amie denfance de Kyo. Comme cette dernière narrive pas à trouver du travail, Gen se voit obligé daccepter de veiller sur le frère dun riche propriétaire, gravement irradié lors de lexplosion du 6 août. Le bourgeois est prêt à le payer grassement pour cette tâche ingrate et repoussante. Le premier contact avec Seiji se révèle calamiteux : celui-ci se montre odieux envers Gen, linsultant et le violentant sans ménagement. Mais peu à peu, le masque tombe et Seiji se confie au jeune garçon. Le mourant sait quil est un poids pour sa famille. Son entourage attend sa mort avec impatience et chacun a peur dêtre contaminé par sa maladie, crainte irrationnelle qui lisole chaque jour un peu plus. Et Seiji ne veut en aucun de la pitié des autres
Par ailleurs, Gen recueille Ryûta, un jeune orphelin quil arrache à la police et prend sous son aile, probablement à cause de sa ressemblance avec son frère disparu. Tous deux vont sattacher à survivre, avec pour moteur le désespoir et la rage. La famine, les maladies et la mort accablent le pays et cest dans lanarchie la plus totale que le Japon capitule enfin.
Nakazawa poursuit ici son travail autobiographique, en mêlant, avec plus ou moins de succès, humour et réalisme. Il décrit avec sévérité la peur que suscitent les victimes de la bombe chez les bien-portants, perçus comme des monstres dont la déshumanisation permet dautant plus facilement le rejet. Lauteur aborde également des thèmes qui lui sont chers : solidarité, travail, pardon, etc. Mais à cette dénonciation en bonne et due forme de labsurdité de la guerre sopposent hélas des moments dun grand manichéisme, soutenus par des illustrations toujours aussi naïves. On reste souvent insensible aux douleurs des personnages qui nexpriment leurs sentiments que par des onomatopées ridicules et des larmes de crocodiles agaçantes. Ces caricatures démotions rendent le récit (qui se voulait poignant) peu crédible, voire franchement bizarre : on frôle lobscénité lorsque Gen et Ryûta posent nus pour Seiji, image dautant plus malsaine que lauteur a délibérément attribué à ses protagonistes des physiques de poupons plutôt écurants. On retrouve
aussi une fascination dérangeante pour la mort, notamment lorsque la mère de Gen conserve les crânes de son mari, son fils et sa fille sur sa table de chevet. Certes, Nakazawa fait ainsi figurer le devoir de mémoire et son importance pour tous les rescapés du 6 août, mais la méthode a de quoi surprendre...
En revanche, la personnalité de Gen saffirme un peu plus et il nous est présenté comme un enfant perdu dans la tourmente, impulsif, et révolté par la méchanceté et linjustice. Mais ce jeune garçon possède aussi sa part dombre, cédant parfois à la violence, voire à des pulsions quasi meurtrières. Enfin, le personnage de Ryûta se révèle pour sa part attachant : drôle de petit homme insolent, insouciant et faisant preuve dun grand cynisme, lorphelin reste la plupart du temps indifférent au malheur des autres et dédramatise les situations, comme pour mieux sen préserver.
Océane Brunet ( Mis en ligne le 09/04/2004 ) Imprimer
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