| Christian De Metter Vers le démon Casterman - Un Monde 2006 / 13.75 € - 90.06 ffr. / 56 pages ISBN : 2203391472 FORMAT : 24 x 32 cm Imprimer
Elle en aura inspiré, des auteurs, cette mythique Route 66 qui traverse les Etats-Unis de part en part, et Christian de Metter appartient désormais à cette cohorte derrants, nostalgiques dun far-west à la Kerouac, avec ses stations services datant des années 50 (personnel compris), ses auto-stoppeurs forcément « sur la route », équipés dune guitare (accessoire indispensable), ses paysages désertiques et majestueux, ses vieilles américaines bardées de chrome et aux couleurs pastels (je parle des voitures)
bref, une Amérique figée dans un stéréotype certes, mais qui fera toujours un peu rêver et flatte les désirs daventure. Et bien évidemment, le fameux 66 inspire également les histoires sombres, les romans tristes, les chansons dures
lombre du démon plane toujours sur cette route semble-t-il ? Cet album entraîne donc le lecteur sur la route 66, à la poursuite dun hypothétique assassin, et tout en fuyant un autre assassin hypothétique
Au volant, Jack, un homme brisé par la mort de son fils, et décidé à le venger en traquant celui quil croit être son assassin, « lindien », qui vient dêtre libéré de prison après avoir été innocenté. Assise à ses côtés, Sarah, une jeune femme ramassée sur le bord de la route, poursuivie par un mari violent qui entend bien rejouer à sa version de Duel
Un couple denquêteurs improbables, liés par linfortune. Mais voilà, tout nest pas aussi simple quau cinéma, et au fil de la route, des rencontres diverses (classique : camionneurs, serveuses et voyous divers) et des amis croisés en route (Niels, un auto stoppeur qui, logiquement, ne va nulle part), chacun finit par trouver sa vérité, qui na pas toujours un goût de happy end.
Au cinéma, on appellerait cela un « road movie », et un bon : Christian de Metter a su créer une atmosphère particulière, comme une longue balade en voiture, quelque chose de lent, dinsidieux, une nonchalance qui, par moment, se heurte à la réalité
on sy croirait pour tout dire, et sans nourrir daffection particulière pour les personnages, on finit par sattacher à leur histoire, jusquà un dénouement inévitable mais pas forcément attendu. Bref, un scénario bien mené en ce quil sait, par petites touches, instaurer une forme de connivence entre le lecteur et les personnages. En outre, les fans de lAmérique éternelle, celle de James Dean et des grosses américaines, apprécieront cet hommage nostalgique à la route mythique.
Le graphisme est à laune du scénario : déconcertant au début, puis simposant peu à peu. Le trait est flou, la couleur provocante, violemment contrastée, en particulier pour les ambiances de nuit, les bars louches, le désert. Lattention aux visages, aux expressions, est constante, au point den oublier les corps, les décors : de fait, lintrigue repose en partie sur la psychologie de chacun, et suppose une certaine empathie avec les personnages. Mais par moment, lauteur prend du champ et se paie un canyon, une mégalopole, un pont
Lalternance est plaisante. Au final, un album bien mené, fidèle à lesprit (sil existe ?) de la Route 66.
Gilles Ferragu ( Mis en ligne le 31/03/2006 ) Imprimer
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