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Bande dessinée -> Réaliste |
| Baru L’Enragé (tome 2) Dupuis - Aire Libre 2006 / 14 € - 91.7 ffr. / 64 pages ISBN : 2-8001-3800-9 FORMAT : 23,5 x 30,5 cm Imprimer
Suite et fin de lépopée violente et belle dAnton Witkowksi. Le jeune rebelle des banlieues est désormais au sommet de la gloire. Champion du monde de boxe, il roule en Corvette rouge, fréquente la jet-set et fait la une de tous les magazines branchés. Rock-star qui aurait troqué sa guitare contre des gants, Witko est devenu en quelques années le héros dune génération et symbolise pour les enfants des cités la réussite la plus totale, le triomphe qui fait rêver. Cette ascension fulgurante, Anton la doit à la force de ses poings mais surtout à cette incroyable rage qui le pousse depuis le début. Le jeune homme est seul dans sa colère et sa frustration. Une mère absente, un père violent et rustre, Anton garde tout en lui et explose sur les rings. Prétentieux, orgueilleux, charismatique et froid, il est le héros bad boy des grands drames américains. Ses parrains sont Marlon Brando dans LEquipée sauvage ou le Al Pacino de Scarface.
Le premier tome, magistral, de cette série laissait clairement deviner que la carrière dAnton subirait quelques accidents de parcours. Arrivé tout en haut, la descente est désormais inévitable.Voilà en effet aujourdhui le boxeur sur le banc des accusés, impassible, son regard fixe et perçant renvoyant à tous ceux qui lobservent toujours la même violence sourde et prête à éclater. Mais si Anton est trahi par ses proches, il bénéficie aujourdhui du soutien inconditionnel de tous ses admirateurs. Pour son dernier combat, le plus difficile, Anton devra enfin apprendre à compter sur les autres.
Sans doute pour éviter quelques clichés, ce second opus prend une direction quelque peu inattendue, hélas parfois proche de linvraisemblable et ce que lon gagne en originalité est perdu en émotion. Le personnage dAnton, un peu laissé de côté, devient le symbole dune jeunesse paumée, et le récit du jeune boxeur prend une tournure quasi spirituelle : lidole devient martyr, exemple à suivre (de loin) pour une jeunesse en panne de motivation. Baru confronte le parcours de son héros à des réalités sociales très fortes. Il y a dun côté les soirées huppées aux côtés dun Beigbeder allumé et de lautre les quartiers difficiles, comme on les appelle, prêts à sembraser encore une fois si on les attise un peu trop. Cest dans ce changement de focale, de lindividu au général, que la série perd malheureusement un peu pied et la dernière partie, où il sagit de déboulonner laffreux méchant cupide, fait retomber toute la colère jusque-là moteur de luvre au profit dune intrigue beaucoup plus convenue.
Mais Baru est un roc, et à défaut dasséner le knock-out, il gagne facilement aux points. Lhomme a du métier et ses albums ont désormais cet extraordinaire mélange de force et de maturité. Comme ces acteurs qui prennent de lépaisseur avec les années, les livres de Baru ont cette tranquille assurance dans leur développement et une force intérieure qui ravage tout. Inutile den faire des tonnes, pas de découpage compliqué ou de couleurs explosives. Il sagit juste de raconter une histoire avec tout ce que la bande dessinée peut apporter comme ressources narratives. Génial portraitiste, il donne à chacun de ses personnages une belle épaisseur. Jusquaux seconds rôles qui mériteraient le César, tous les acteurs de cette histoire sont parfaitement campés.
Une demie réussite donc, mais une belle série pleine de qualités formelles et narratives.
Alexis Laballery ( Mis en ligne le 06/05/2006 ) Imprimer
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