| Eric Corbeyran Fabien Laouer Les enquêtes de Goirïd et Leôdhas (tome 1) - Une proie pour l’ombre Delcourt - Terres de légendes 2004 / 12.50 € - 81.88 ffr. / 48 pages ISBN : 2847890521 FORMAT : 23 x 32 cm Imprimer
Le fantastique parodique est assez rare : à part quelques albums réussis (La quête des réponses, Lessayeur des anneaux
), le genre ne tente guère les scénaristes. Aussi est-il bon, lorsque lon trouve un album de ce genre, de le déguster. Et avec Les enquêtes de Goirïd et Leôdhas, on peut dire que le plat est assez réussi. Un Tolkien revu et corrigé par Groucho Marx, une version impertinente de Sherlock Holmes, perdu dans un monde fantastique.
Car bien sûr, il y a un crime : lors dune conférence au sommet entre des représentants des sept races (nains, gobelins, elfes, humains, hibbots
), lambassadeur gobelin Cole ONeil Moot Hard est assassiné dans sa chambre, avec un chandelier (toute allusion à un célèbre jeu denquête
). Le meurtre étant non seulement inexplicable, mais surtout dérangeant pour léquilibre entre les peuples, on fait appel au meilleur détective du coin, le mage-nécromant Léôdhas (un elfe, « chasseur de dragon » impénitent) et son aide Goirïd (un hibbot équivalent du hobbit maladroit, trouillard, mais fidèle : Watson, version gag). Le problème est que le criminel nest pas nimporte quel elfe noir de bas étage, mais une entité démoniaque nommée Quaalude, le fléau majeur, le mal quasi absolu (et dur à vaincre de surcroît). Et il faut toute lastuce et un peu de chance de Leôdhas pour mettre à jour cette vérité. Le duel peut commencer, mais il faut compter avec les assassins plus ou moins doués, les complots divers, les policiers incapables et hargneux, et surtout la maladresse des hibbots.
Le scénario de Corbeyran est expérience oblige excellent : les héros, comme les personnages secondaires, sont très réussis, et quelques trouvailles viennent confirmer, sil en était besoin, le talent dun scénariste réputé (la « chasse au dragon », allégorie de la drogue chère au détective de Baker Street, les allusions nombreuses au fantastique en général, ou aux histoires de détectives
). Bref, une promenade plaisante dans un univers fantasy à lhumour décapant, dont les amateurs goûteront laspect parodique. Le graphisme de Fabien Laouer, pour sympathique quil soit, est en revanche encore un peu vert : ce premier album atteste dun talent certain, avec des trouvailles excellentes, une mise en scène très cinématographique, mais aussi des visages, des attitudes parfois bâclées. Surtout, les couleurs sont décevantes : il aurait fallu des teintes plus nuancées, des contrastes moins violents. Bref, voilà un bel essai qui reste à transformer, dautant que le fléau majeur court toujours.
Gilles Ferragu ( Mis en ligne le 31/10/2004 ) Imprimer | | |