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| Bande dessinée -> Fantastique |
| Rotomago Julien Noirel Nyarlathotep
Akileos 2007 / 15 € - 98.25 ffr. / 54 pages
ISBN : 978-2915168532
FORMAT : 24x32 cm
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Howard Phillips Lovecraft fait partie de ces auteurs fantastiques classiques donc intemporels souvent lus et appréciés mais difficiles à adapter. En bande dessinée, on a certes quelques belles réussites (LÎle des morts de Mosdi et Sorel, Lovecraft de Enrique Breccia, Hans Rodionoff et Keith Giffen), mais dans lensemble, la production BD est un peu maigre en comparaison avec la masse de nouvelles et de romans
Chaque nouvelle adaptation est donc à saluer, comme un nouveau défi à lunivers onirique et délirant de lécrivain de Providence. Mais le pari est-il remporté ? Nyarlathotep est une création classique de Lovecraft, qui laffuble de plusieurs titres étranges : le chaos rampant, la chèvre noir aux milles chevreaux
On voit cette entité apparaître dans le mythe lovecraftien où il apporte, comme tant dautres créatures du même genre, la révélation (de divinités extra-humaines, maléfiques et nuisibles) et la mort (dans la folie)
bref, que du riant. Avec cet album assez court, le Grand Ancien trouve une belle illustration pour lun des thèmes favoris de Lovecraft.
Il sagit en fait de la mise en image dun poème écrit en 1920. Lhistoire dun mystérieux oriental, illusionniste aux pouvoirs démentiels, qui plonge une cité américaine et ses habitants dans un cauchemar éveillé avant, tel le joueur de flûte des contes, de les mener droit vers leur anéantissement. Certes, ce bref résumé impressionne peu
Ladaptation de Rotomago est efficace, mais lessentiel est dans la mise en image, très réussie et fort bien adaptée à lunivers glauque de Lovecraft. Les cases sont de grandes tailles, couvrant toute la page : raison de plus pour faire attention aux détails suggestifs qui précisent lambiance. En particulier, le final et lévocation de lantre et des entrailles du monstre savère très efficace
dans les limites du genre, Lovecraft lui-même ayant souvent joué de descriptions floues pour suggérer plutôt que faire voir. Julien Noirel, dans un style très réaliste, sans effets particuliers, a su donner à son trait une force particulière, en dévoilant progressivement la folie qui gagne les personnages (dont les rictus saffirment peu à peu), et en jouant de petits détails (une végétation galopante, des ombres environnantes, des foules inertes) pour faire glisser les héros, et le lecteur, dans une atmosphère de plus en plus malsaine, angoissante, jusquau dénouement final. Le travail des couleurs renforce largement cette impression : usant de tons verdâtres, de violet sombre et de toutes les tonalités de gris et de noir, il restitue à chaque lecteur ses terreurs nocturnes denfant dans un monde où la couleur prend une teinte maladive. Un album stimulant, angoissant, qui plaira aux admirateurs de lécrivain autant quaux amateurs dun fantastique finalement assez original en bande dessinée.
Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 03/03/2007 )
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