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Bande dessinée -> Science-fiction |
| Moebius L’Homme est-il bon ? Les Humanoïdes associés 2006 / 15.50 € - 101.53 ffr. / 56 pages ISBN : 2-7316-1776-4 FORMAT : 24 x 32,5 cm Imprimer
Après Arzach et Le Garage Hermétique, Les Humanos continuent de rééditer, dans le désordre, les grandes uvres de Moebius, de plus en plus difficiles à trouver depuis quelques années. Grand format, qualité dimpression et unité graphique sont donc au rendez-vous de ces belles éditions qui rendent parfaitement honneur au travail du génial artiste. On regrettera juste, mais rien na changé depuis les années 70, un assemblage dhistoires qui ne respecte pas la chronologie, rendant encore plus labyrinthique limposante oeuvre de Docteur Giraud et Mister Moebius ! Les collectionneurs puristes et méthodiques seront donc prévenus, cette nouvelle édition propose un sommaire encore différent des précédentes, de quoi rendre fou nimporte quel bibliographe.
LHomme est-il bon ? regroupe six histoires, de deux à seize planches, dessinées entre 1974 et 1980 et publiées essentiellement dans « Métal Hurlant ». Dans lhistoire qui donne son titre au recueil, Moebius donne, lair de rien, un nouveau cours magistral sur la narration et la mise en pages, tout en rigolant derrière son pupitre parce que tout cela, forcément, nest pas très sérieux. Dans lenvoûtant et bucolique « Ballade », il met en scène limprobable rencontre entre Arthur Rimbaud et Fredric Brown. Et dans « The long tomorrow », scénarisé au pied levé et la tête dans les étoiles par Dan OBannon, cest une bonne partie du cinéma de science-fiction des trente dernières années qui est déjà là, ainsi que quelques esquisses dune future série à succès scénarisée par un certain Jodorowsky.
Moebius se connaît bien lui-même, preuve de son incontestable maîtrise sur son travail, et dans la belle introduction qui ouvre lalbum, il compare ces suites dimages à une écriture. Tout le génie de Jean Giraud est là en effet, dans ce dessin fluide et sans contrainte, capable de partir dans des directions improbables à tout moment, souple et évident, empreinte graphique dun morceau de free-jazz. Au-delà de la technique, forcément parfaite, il y a cette passion du dessin présente dans chaque case, dans chaque point même. Moebius ne cède jamais à la facilité, et si son trait sépure, il ne sappauvrit jamais. Et même si le ton adopté dans ces pages a perdu de la force novatrice qui faisait une part de son succès à une époque où la bande dessinée se cherchait encore, le pouvoir dévocation de ces histoires est toujours présent. On y voit un Moebius imaginatif et brillant, faisant de la bande dessinée comme dautres respirent, élaborant une SF à la fois poétique et crue, drôle et visionnaire. Lauteur sapproprie le genre comme quelques années auparavant son double semparait du western ; il y met toute sa force et fait de chaque nouvelle page un centimètre de plus sajoutant aux autres pour former cette fameuse distance étalon auprès de laquelle viendront plus tard se comparer Bilal, Loisel, Miyazaki et tant dautres.
Cet album, sil nest certes pas le tout meilleur de son auteur, reste une mine qui, trente ans après, na toujours pas fini de révéler tous ses passages secrets et déviations soudaines vers des ailleurs étonnants.
Alexis Laballery ( Mis en ligne le 18/03/2006 ) Imprimer
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