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Bande dessinée -> Humour |
| Benoît Sokal Une enquête de l'inspecteur Canardo (tome 14) - Mariée noire Casterman - Ligne rouge 2004 / 9.50 € - 62.23 ffr. / 48 pages ISBN : 2-203-33556-4 FORMAT : 22,6 x 30,3 cm Imprimer
Nouvelle enquête de linspecteur Canardo, croisement improbable de Donald Duck, de linspecteur Colombo et dune canette de bière. Un des protagonistes de cette nouvelle histoire le définit sommairement : «un détective privée à la moralité alcoolisée». Nous voilà donc replongés dans lunivers de Sokal, avec ses beaux dessins et ses reflets, ses étranges corps humains surmontés de ces têtes danimaux si incongrues et auxquelles pourtant il nous a habitués, son atmopshère un peu triste.
Pour ceux qui connaissent déjà les enquêtes de Canardo, Marée noire est, pour ce qui est de lhistoire, une suite logique de LAmerzone (on retrouve dailleurs la belle révolutionnaire Carmen). Pour ce qui est de lambiance, Sokal retrouve plutôt celle de LÎle noyée qui demeure probablement, à ce jour, lalbum le plus abouti de la série des Canardo.
Par un curieux effet de contraste, en effet, leau réussit bien au canard alcoolique
Marée noire prend pour cadre les faits divers de ces dernières années : naufrages de pétroliers, dégazages sauvages au large des côtes, cortège de bénévoles récupérant les boulettes de mazout, etc. Pour commenter cette sinistre actualité, les personnages de Sokal y vont tous de leur petit proverbe. Le commandant dun pétrolier justifie les dégazages au large des côtes déjà mazoutées : «Quand les gros chient on nentend pas les petits péter. (Proverbe panaméen.)». Le président de la République désigne ainsi le brave commissaire qui deviendra bénévole et fera le travail à la place de lEtat : «Un con qui a le sens du devoir, cest souvent un pléonasme». Il y a du Audiard dans cet opus de Canardo.
Pourtant, Sokal nabuse pas du texte. Pour lui, les plus bavards sont aussi les plus bêtes et, à ce petit jeu, une fois de plus, la télé lemporte largement. Que ce soient les journalistes ou ceux quils interviewent, on peut être sûr que la vérité némergera pas de leur absurde logorrhée, dans laquelle tout se confond. Qui donc affirme au journaliste «Je dois dire que mes gars sont très affûtés ! Ils ont hâte den découdre ! A lentraînement, on a beaucoup insisté sur le collectif
» ? Vous ne voyez pas ? Le commandant en chef des forces antiterroristes.
Le nud de lhistoire, cest un vieux dictateur subclaquant qui saccroche à la vie, alors que Carmen veut le faire juger par un tribunal révolutionnaire. Là encore, Sokal nest pas avare de sentences délicieuses : «Ces vieux dictateurs sont coriaces : en ce moment, ce sagouin doit serrer les fesses pour empêcher les métastases de son colon de lui remonter jusqu'au cur» ; «Les vieux salopards sont toujours un peu branlants quand ils doivent passer au tribunal»
On pense à Franco, on pense à Pinochet. On partage bien un peu les «scrupules de petit bourgeois» de Canardo (cest Carmen qui le dit), mais une fois de plus avec Sokal, on se dit quon na pas perdu notre temps à réfléchir aux lugubres problèmes de lAmerzone.
Sylvain Venayre ( Mis en ligne le 18/05/2004 ) Imprimer | | |
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