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Le récit d’une vie ? Non, 10 romans d’aventure !
Claude Lanzmann   Le Lièvre de Patagonie
Gallimard - Folio 2009 /  10.20 € - 66.81 ffr. / 768 pages
ISBN : 978-2-07-043778-8
FORMAT : 11cm x 18cm

Première publication en mars 2009 (Gallimard - Blanche)
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L’autobiographie de Claude Lanzmann commence avec le récit poignant des années de guerre et de traque pour une famille juive. L’un des passages les plus marquants est celui des exercices de simulation de fuite, organisés par le père de Claude Lanzmann : le père joue le rôle de la Gestapo et Claude et son frère doivent réussir à s’échapper de la maison en quelques secondes et à se cacher, le tout sans se faire repérer. Glaçant. Et haletant, à l’image de beaucoup d’autres passages du livre.

Les années qui suivent sont beaucoup plus légères. Les activités du beau-père (Monny) et de la mère de Claude Lanzmann amènent le jeune homme à rencontrer un grand nombre de personnalités, écrivains ou philosophes. Le récit de ces années, ponctués d’épisodes savoureux tels que le vol de livres chez les PUF se lit avec intérêt et plaisir, d’autant plus que l’auteur reprend un récit chronologique, infiniment plus réussi que les sauts dans le temps des premières dizaines de pages. On le suit dans son amitié avec Jean Cau, lequel devient le secrétaire de Jean-Paul Sartre. C’est de cette manière que Claude Lanzmann rencontre le grand homme ainsi que Simone de Beauvoir, dont il reste l’amant officiel pendant de nombreuses années. Commence entre lui et le couple mythique une longue amitié, interrompue par la mort. C’est avec eux qu’il entreprend de nombreux voyages, contés avec force détails pour notre plus grand plaisir. Citons à cette occasion le récit hilarant des séances épiques d’alpinisme avec Simone de Beauvoir !

Mais il faut dire quelques mots du métier de l’actuel directeur des Temps modernes, le journalisme. Claude Lanzmann rentre à France-Soir chez Pierre Lazareff comme «rewriter». Il propose régulièrement au journal des articles issus de reportages visiblement très librement choisis et menés, d’ailleurs publiés par d’autres quand Lazareff les refuse. Le récit des voyages qui donnent lieu à ces reportages est toujours instructif, parfois palpitant. Les deux expéditions en Corée du Nord sont particulièrement intéressantes, celle entreprise en RDA également. Du fait de son métier et de ses amitiés, Claude Lanzmann côtoie un nombre impressionnant de figures littéraires, artistiques, politiques, françaises ou étrangères, certaines avant leur heure de gloire.

L’un des aspects importants du livre est le rapport de Claude Lanzmann au judaïsme et à Israël, qui a plusieurs fois fait débat par le passé. Et en effet, il est assez particulier : son admiration béate pour les soldats de Tsahal laisse parfois pantois. Quelle que soit son opinion, sa position singulière en fait un témoin particulièrement intéressant, et il décrit très bien cette situation : «Une chose est certaine, la posture de témoin qui a été mienne dès mon premier voyage en Israël, et n’a cessé de se confirmer et s’engrosser au fil du temps et des œuvres, requérait que je sois à la fois dehors et dedans, comme si un inflexible mandat m’avait été assigné». En effet, Claude Lanzmann est à la fois juif et assez étranger à la culture juive : il est bien à la fois dehors et dedans et c’est ce qui en fait un témoin privilégié. C’est sans doute dans cette position particulière que se trouve entre autres l’explication de la démarche unique de l’auteur dans le film Shoah. Et le récit de la longue fabrication (12 ans) du film est – forcément – passionnant.

La vie de Claude Lanzmann est un véritable roman : on a peine à croire qu’un seul homme ait vécu toutes ces aventures. D’ailleurs, si c’était un roman, on trouverait que c’est trop, que c’est irréaliste. Claude Lanzmann a rencontré et fréquenté tant de personnages marquants de la deuxième moitié du vingtième siècle que sa petite histoire se confond avec la grande. On pourrait presque le donner à lire aux écoliers comme une histoire subjective de la deuxième moitié du vingtième siècle. Et une histoire bien écrite, haletante, avec des rebondissements et du suspens. Car Claude Lanzmann sait parfaitement tenir un lecteur en haleine et susciter tous les sentiments possibles : angoisse, joie, ressentiment…

Il reste un curieux sentiment à l’issue de cette lecture : celui que le livre n’aurait pas dû être écrit par lui. Il est fort difficile, quand certains protagonistes sont encore vivants, de ne pas tomber dans l’autojustification, et ces passages sont un peu désagréables à lire. On y a l’impression que Claude Lanzmann se donne bien souvent le beau rôle, ce qui ne serait probablement pas du tout le cas si le récit était de la main de quelqu’un d’autre. Ces réserves faites, on ne peut que se réjouir que Claude Lanzmann se soit lancé dans cet exercice de l’autobiographie, qui éclaire utilement de manière parfois inédite, de nombreux pans de la vie d’un intellectuel de la deuxième moitié du vingtième siècle.


Cécile Obligi
( Mis en ligne le 07/09/2010 )
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