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Histoire & Sciences sociales -> Antiquité & préhistoire |
| Alexis Leonas L'Aube des traducteurs - De l'hébreu au grec : traducteurs et lecteurs de la Bible des Septante IIIe s. av. J.-C. - IVe s. apr. J.-C Cerf - Initiations bibliques 2007 / 29 € - 189.95 ffr. / 239 pages ISBN : 978-2-204-08035-4 FORMAT : 14,0cm x 22,0cm
L'auteur du compte rendu : Emmanuel Bain est agrégé dhistoire ; il est actuellement allocataire-moniteur à lUniversité de Nice Sophia-Antipolis, où il prépare une thèse en histoire médiévale sur «les fondements bibliques du discours ecclésiastique sur riches et pauvres aux XII-XIIIe siècles». Imprimer
La Bible des Septante fait lobjet dune actualité éditoriale riche et régulière depuis qua été lancé le projet de sa traduction complète en français, sous le titre de Bible dAlexandrie. Cest en effet à proximité de cette ville, dans lîle de Pharos, quen soixante-douze jours, selon la légende, soixante-douze savants réunis par le roi Ptolémée dans soixante-douze huttes différentes, auraient traduits en grec la Bible hébraïque, donnant miraculeusement tous la même traduction. Le but dAlexis Léonas dans cet ouvrage nest pas de rétablir le déroulement historique pour dénoncer les mythes, mais détudier leur genèse et leur fonction. Ce nest donc pas une introduction à la Septante, mais plutôt une réflexion sur les conceptions de la langue et de la traduction dans le monde antique.
Louvrage développe principalement trois thématiques : la réflexion antique sur le statut de la langue sacrée ; la pratique de la traduction et linterprétation du texte traduit. Les quatre premiers chapitres traitent principalement de la conception antique de la langue sacrée. Il apparaît que lui est reconnue une nature spécifique, marquée par la distance, larchaïsme et le hiératisme. Ces caractéristiques sont aussi reconnues au texte biblique, servi en outre par lantiquité de son langage. Or la traduction est en revanche perçue comme une déformation du texte ; cest ce qui explique le recours au miracle pour légitimer le changement de langue. Le cinquième chapitre, au centre du livre, est une tentative pour mieux connaître le milieu des traducteurs à travers létude de leur travail et de leurs connaissances linguistiques, qui montre une coexistence de lhébreu et de laraméen. Les quatre derniers chapitres étudient la réception antique de la traduction grecque de la Bible. Après une introduction générale sur la lecture dans lantiquité, il montre notamment les réactions face à létrangeté de la langue ainsi produite, et face à lobscurité du texte biblique, qui conduisent à la mise en place de méthodes exégétiques en partie nouvelles, en parties héritées de lhellénisme.
Ce résumé très succinct ne fait queffleurer la richesse de la réflexion développée par Alexis Léonas. Sa connaissance linguistique impressionne. Cest en effet un exemple rare de livre où lantiquité est prise en compte dans sa pluralité, au croisement de plusieurs langues (lhébreu, le grec, mais aussi le latin ou encore laraméen) et de plusieurs cultures (juives, hellénistique, romaine, chrétienne). En revanche, bien quil soit publié dans une collection dinitiation, cest un ouvrage dune lecture complexe. Malgré les conclusions partielles qui aident à retrouver le fil du raisonnement, celui-ci nest pas toujours aisé à suivre, surtout pour un lecteur qui ne serait pas familier des langues anciennes. De plus, pour profiter de ces analyses, des connaissances préalables sur la réalisation et la diffusion de la Septante sont nécessaires. Cest donc une lecture enrichissante, mais exigeante.
Emmanuel Bain ( Mis en ligne le 26/10/2007 ) Imprimer | | |
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