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Histoire & Sciences sociales  ->  Moyen-Age  
 

Un mal social
Valérie Toureille   Vol et brigandage au Moyen Age
PUF - Le noeud gordien 2006 /  28 € - 183.4 ffr. / 310 pages
ISBN : 2-13-053970-X
FORMAT : 15,0cm x 21,5cm

L'auteur du compte rendu : Historienne et journaliste, Jacqueline Martin-Bagnaudez est particulièrement sensibilisée aux questions d’histoire des religions et d’histoire des mentalités. Elle a publié (chez Desclée de Brouwer) des ouvrages d’initiation portant notamment sur le Moyen Age et sur l’histoire de l’art.
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Un titre d’ouvrage plus prometteur que son contenu : le propos – il s’agit de la publication d’une thèse soutenue à Paris-I Panthéon Sorbonne – porte sur des comportements délictueux à travers une analyse de sources essentiellement juridiques et dans la France du Nord des XVe et début XVIe siècles. Voilà qui recadre le sujet dans des limites raisonnables et rassure sur la qualité et le sérieux de l’étude proposée, loin de vastes généralisations approximatives. Car c’est bien d’une analyse de cas qu’il est question. La méthode suivie tout au long de l’étude est constante : à la suite de l’exposé général d’une constatation, des exemples précis et développés de ce qui vient d’être dit sont apportés, exposés, disséqués, explicités. Procédé bien sûr efficace et convaincant quant aux conclusions qui en sont tirées, puisqu’il n’autorise aucune contradiction, sauf à avoir la même connaissance des sources que l’auteur.

L’un des premiers mérites de cet ouvrage est de bien préciser de quoi on parle. Grâce à une étude sémantique poussée, le sens des termes est défini. Nombre de lecteurs apprendront avec quelque surprise que le qualificatif de «voleur» n’apparaît qu’en 1451 ; «crime» et «délit» de même sont des expressions inconnues. Car ce qui continue à primer, à l’époque considérée, c’est un vocabulaire (en latin comme en langue vulgaire) qui reflète la signification morale et sociale de l’infraction. Celle-ci est vécue et pensée comme une tromperie, une trahison, d’autant plus grave qu’elle se fait au détriment d’une autorité naturelle. Par exemple celle du souverain si elle viole l’ordre public des chemins, celle de qui est au service de la société si elle lui ôte son outil de travail (le soc d’une charrue par exemple), l’autorité du père ou du maître dans le cas des actions commises à l’intérieur des familles, etc. S’y ajoute dans le vécu collectif la sensation – correspondant d’ailleurs fréquemment à la réalité – que le malfaiteur agit de nuit, en cachette ; il en devient l’auteur d’une authentique trahison. On comprend dès lors que le vol devient dans certains cas une faute pire que le meurtre, lequel peut parfois être légitime ; de même il n’y a pas pire injure à prononcer contre un adversaire que proférer à son égard quelqu’une de ces expressions qui qualifient le vol.

Au fil des pages, l’auteur guide son lecteur selon une progression logique qui conduit de la description d’une délinquance qu’on qualifierait aujourd’hui de «proximité», - celle commise majoritairement par des hommes jeunes -, à la «grande criminalité», celle des brigands, fréquemment représentée par des soldats revenus à la vie civile et qui n’ont jamais connu pour vivre que violence et pillage. À tous sont promis la répression et le châtiment. Et V. Toureille montre bien que ceux-ci sont fort variables, selon les juges dont le choix semble être inspiré par le plus grand arbitraire. La peine de prison n’est pas de l’époque ; existent des compensations financières, quand elles sont possibles, des châtiments corporels allant du fouet ou de l’exposition à la peine de mort. Quant aux mutilations, fréquemment appliquées et plus ou moins visibles et invalidantes, elles joueront, après leur exécution, le rôle de «casier judiciaire» indélébile permettant d’identifier le récidiviste, toujours plus sévèrement châtié. Au total, la justice se révèle plus démonstrative qu’efficace. Et les motifs de «rémission», eux aussi, échappent à toute cohérence. Mais ils reflètent la montée du rôle du pouvoir royal, comptable à partir du XIVe siècle du maintien de l’ordre public.

Ce livre de haute tenue scientifique, appuyé nous l’avons dit sur de solides références, fait pénétrer dans le quotidien de la vie. On pourra regretter que la méthode thématique suivie se prête peu à faire ressortir une évolution dans le temps, d’éventuelles différences dans les lieux. La documentation est quelque peu traitée comme un tout. Mais dans le concret des situations exposées, nul doute qu’un romancier trouverait matière à raconter des personnages souvent hauts en couleurs, des situations allant du plus cocasse au plus tragique. Reste qu’à travers une étude juridique se trouve dessiné un tableau, combien concret, d’une société, appréhendée dans ses conditions quotidiennes de vie, dans sa mentalité et ses attitudes morales et religieuses.


Jacqueline Martin-Bagnaudez
( Mis en ligne le 28/04/2007 )
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