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Histoire & Sciences sociales  ->  Période Moderne  
 

Le Parlement de Bordeaux au XVIIe siècle : reprise en main ou soumission ?
Caroline Le Mao   Parlement et parlementaires - Bordeaux au Grand Siècle
Champ Vallon - Epoques 2007 /  29 € - 189.95 ffr. / 378 pages
ISBN : 2-87673-457-5
FORMAT : 15,5cm x 24,0cm

L'auteur du compte rendu : Matthieu Lahaye est professeur agrégé et poursuit une thèse consacrée au fils de Louis XIV.
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En 1661, l’une des dernières instructions laissées par Mazarin à Louis XIV concernait les parlements. Il fallait, lui dit-il, les honorer en dépit de leur compromission dans la Fronde (1649-1653), tout en les obligeant «à se tenir dans les bornes de leur devoir». Caroline Le Mao, jeune historienne, montre dans un ouvrage issu de sa thèse de doctorat, Parlements et parlementaires. Bordeaux au Grand Siècle, que l’histoire du parlement de Bordeaux témoigne de l’application méthodique de cette maxime. Sa démonstration, qui s’étend de 1649 à la fin de la Régence (1723), se fait en deux temps. Elle s’attache d’abord à montrer le contrôle étroit du parlement par le pouvoir central, puis elle étudie 300 parlementaires qui se sont succédés au palais de l’Ombrière, siège du parlement, durant cette période.

Le Parlement est un rouage essentiel des institutions d’Ancien Régime. Si celui de Paris est le plus important par l’étendue de son ressort et de son rôle politique, les treize autres parlements ne sont pas à dédaigner. Ces cours sont à la fois les juridictions les plus élevées de leur province, mais aussi des instances administratives et politiques. Chaque édit, chaque ordonnance royale doivent y être enregistrés. En cas de désaccord, les parlements peuvent émettre des remontrances.

Les historiens ne sont pas d’accord sur le sort réservé à ces institutions durant le règne de Louis XIV. John Hurt insiste sur leur soumission. Il en prend pour preuve leur dépossession en 1661 du titre de cour souveraine pour celle de cour supérieure et en 1673, de la restriction de leur droit de remontrance. Cependant, William Beik insiste plutôt sur l’étroite collaboration entre le pouvoir royal et le Parlement pour l’élaboration de la loi. Caroline Le Mao adopte une position médiane.

Trois moments principaux témoignent de l’abaissement de l’autorité parlementaire à Bordeaux. Si l’institution fut à la tête de la Fronde bordelaise commencée en mars 1649, l’arrivée dans la ville du prince de Condé en septembre 1651 lui fit perdre de son influence sur la population. Bordeaux devenait alors un pion sur un échiquier national complexe. En 1675, le soutien du parlement à l’agitation populaire contre une pression fiscale accrue et la reconstruction du château Trompette, symbole de la soumission de la ville au Roi, se solda même par un exil de quinze ans pour les parlementaires. Enfin, après la mort du Grand Roi, en 1718, devant un refus d’enregistrement de lettre patente, le Régent réaffirma sévèrement sa domination par un lit de justice.

Il n’en reste pas moins que le Parlement conserva un prestige indéniable dans la ville, bien supérieur à celui du gouverneur, de l’intendant, ou de la jurade (dirigeants de la municipalité). Il demeure le canal privilégié dans l’expression de la contestation. Les prélèvements fiscaux excessifs et la défense des coutumes locales sont les thèmes dont il continue à se faire le porte parole. D’ailleurs, les remontrances n’ont jamais cessé durant le XVIIe siècle. Il arriva même au roi de donner raison aux magistrats contre son intendant. L’auteur rejette ainsi l’image d’Épinal d’un régime hypercentralisé, omnipotent, capable d’imposer par "diktat" les réformes. Bien au contraire, la loi est souvent le résultat de négociations.

La conjoncture économique aura sans doute joué un rôle plus décisif dans la perte d’influence des magistrats. Rien de mieux pour le comprendre que l’évolution des prix des charges parlementaires. Après une augmentation continue de leur valeur jusqu’en 1660, l’auteur constate une nette diminution tout au long du XVIIe siècle. Si entre 1643 et 1660, un office de conseiller au parlement se négocie entre 70 000 et 80 000 livres, il ne vaut plus que 40 000 livres au début du XVIIIe siècle. Les accidents climatiques et la crise économique expliquent cette dépression. Remarquons que cette tendance était lourde de menace pour un régime incapable de garantir une position économique appréciable à ses interlocuteurs naturels.

En septembre 1650, aux portes d’une ville qui se refusait à lui, le jeune Louis XIV, au milieu de ses larmes se serait écrié : «Ces coquins de Bordelais ne me feront pas longtemps la loi». Il paraît évident que tout au long de son règne, Louis XIV a tout fait pour contenir les velléités de contestation du parlement. Il ne l’a cependant jamais humilié. La cour est toujours restée un lieu de discussion, une cheville ouvrière indispensable entre la volonté royale et la réalité locale.


Matthieu Lahaye
( Mis en ligne le 20/03/2007 )
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