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Histoire & Sciences sociales  ->  Période Contemporaine  
 

Une excellente synthèse
Pierre Laborie   Denis Peschanski   Guerre mondiale, guerre totale
Gallimard Mémorial de Caen 2010 /  26 € - 170.3 ffr. / 173 pages
ISBN : 978-2-07-012964-5
FORMAT : 18,5cm x 23cm

L'auteur du compte rendu : Antoine Broussy est agrégé d'histoire et enseigne dans un lycée des Yvelines.
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Issu de la rénovation de la muséographie du Mémorial de Caen, ce livre nous guide à travers les nouveaux espaces d’exposition consacrés à la «Guerre mondiale, guerre totale», inaugurés le 12 mai 2010. Excellente synthèse d’un épisode de notre histoire encore brûlant dans les mémoires, ce livre devrait intéresser tous les lecteurs désireux de trouver une information étayée sur des problématiques récentes, bien illustrée et très pédagogique. Dans l’introduction, Denis Peschanski évoque le souhait exprimé par le conseil scientifique du musée de répondre à deux enjeux majeurs : «comment articuler mémoire et histoire ?» – sous-entendu sans dévoyer la seconde au profit de la première ; «comment inscrire dans un musée, et donc diffuser à un très large public, les connaissances les plus récentes ?» (p.8). Gageons, avec lui, que le pari a en effet été gagné.

Car, en vérité, ce petit livre a tout pour séduire, tant par sa forme que par son fond. Une page de contexte, qui offre une bonne mise en perspective des événements, introduit chaque chapitre. Les thèmes abordés sont étayés ensuite le plus souvent par des chronologies ou des cartes tandis que les illustrations complètent bien à propos les textes. Ces derniers sont synthétiques, accessibles et très clairs. Deux chapitres ouvrent la partie centrale de l’ouvrage consacrée à la Seconde Guerre mondiale proprement dite : l’un portant sur la faillite de la paix, l’autre sur la France des années noires. Le dernier chapitre du livre concerne plus précisément le Débarquement et la bataille de Normandie. Si les épisodes clés de notre histoire nationale ne sont donc pas oubliés, ce choix évite de développer ailleurs une approche trop franco-centrée des faits, redonnant ainsi à la Guerre sa caractéristique principale, à savoir sa dimension justement mondiale.

C’est en effet l’un des principaux intérêts de l’ouvrage que de donner sa juste part aux événements qui se déroulent en Europe sur le front de l’Est mais aussi au Moyen-Orient et dans le Pacifique. Pierre Laborie entame ainsi l’étude de la guerre par un chapitre consacré à l’extension des fronts et ses causes. L’élargissement inédit des territoires de la guerre rend ensuite plus claire la compréhension des phénomènes de violences de masse et du génocide traités au chapitre suivant. En effet, l’expansion du Reich allemand accroît pour les nazis le problème de la «question juive». Pierre Laborie montre ainsi parfaitement les tâtonnements dans la mise en œuvre de la «solution finale», d’abord en revenant sur le phénomène de «shoah de proximité» ou «shoah par balle», puis en exposant le glissement vers l’extermination méthodique et industrielle des Juifs d’Europe. Le sort des Tsiganes n’est par ailleurs pas oublié, révélant, par comparaison, la spécificité de chaque entreprise d’extermination qui, pour les nazis, répondait à des critères idéologiques précis. Cette analyse historienne permet donc de sortir de la posture du seul «devoir de mémoire» qui repose fréquemment sur l’émotion et aboutit trop souvent au constat de l’horreur incompréhensible. La mise en relation du phénomène génocidaire avec les violences de masse complète ce mécanisme d’élucidation en éclaircissant les différences dans les pratiques et les buts de la violence perpétrée tant sur les théâtres d’opération qu’à l’encontre des civils (notamment en Asie ou sur le front de l’Est).

Dès lors que la violence est partout, la notion de guerre totale prend tout son sens puisque les sociétés sont entièrement mobilisées pour se défendre et pour écraser totalement leurs adversaires. Violence qu’il convient par ailleurs d’appréhender à l’aune des idéologies. Reste que la guerre est également une affaire d’individus qui choisissent de s’engager, d’entrer dans les mouvements de résistance (abordés à l’échelle européenne), ou qui prennent le parti de la collaboration. Pierre Laborie nous rappelle ainsi que la guerre est aussi rupture des trajectoires individuelles ou collectives liées aux expériences extrêmes auxquelles les sociétés sont confrontées. Les derniers chapitres abordent ensuite, toujours à l’échelle mondiale, les étapes des reconquêtes et des libérations, en présentant la joie des peuples libérés sans masquer pour autant les désirs de vengeances et de représailles qui n’éteignent donc pas la violence. Le bilan de la guerre est au final très lourd, tant sur le plan humain, que sur le plan moral. Les préparatifs pour la paix sont évoqués tout en rappelant que les divisions entre les Alliés sont déjà perceptibles comme en témoigne le télégramme de Winston Churchill à Harry Truman qui évoque, dès le 12 mai 1945, «un rideau de fer [qui] s’est abattu sur le front soviétique» (p.130). Dans le même temps, le traumatisme moral lié à la libération des camps appelle un besoin de justice qui se traduit dans les procès de Nuremberg et de Tokyo. Ce dernier est d’ailleurs mis en valeur pour montrer ses limites face à celui de Nuremberg et rappeler que les vainqueurs développent au sortir de la guerre des stratégies éminemment politiques. On appréciera également que les effets de la guerre sur les colonies n’aient pas été oubliés puisqu’ils ouvrent un chapitre essentiel de l’histoire du XXe siècle.

Le chapitre rédigé par Jean Quellien sur le débarquement de Normandie a enfin retenu notre attention en ce qu’il fourmille, malgré le format contraint du livre, de détails intéressants sur les modalités des préparatifs d’attaque des Alliés, comme sur la défense des Allemands. Sans sacrifier à la qualité scientifique du propos, Jean Quellien parvient à faire revivre ces jours cruciaux où les hasards de la météorologie, la détermination et le sacrifice des hommes ont permis de consolider l’avancée des armées alliées malgré la résistance acharnée des Allemands. Il n’oublie pas non plus de rappeler le lourd tribu payé par les Normands pris sous le feu des bombardements terribles qui se sont déroulés.


Antoine Broussy
( Mis en ligne le 16/11/2010 )
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