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Charles de Gaulle / Bibliographie

''Un personnage falot'' ?
Frédérique Neau-Dufour   Yvonne de Gaulle
Fayard 2010 /  27 € - 176.85 ffr. / 585 pages
ISBN : 978-2-213-62750-2
FORMAT : 15,3cm x 23,5cm

L'auteur du compte rendu : Grégory Prémon est agrégé d'histoire-géographie.
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«Yvonne est parvenue jusqu’à nos jours dans son habit terne d’épouse docile et traditionnelle, humble assurément, mais plus versée dans l’art des confitures et du tricot que dans celui de la politique» : telle est l’image que la majorité d’entre-nous a d’Yvonne de Gaulle. Comment dès lors imaginer cette femme mariée avec le général de Gaulle ? Frédérique Neau-Dufour a su surmonter les difficultés auxquelles elle a dû faire face, pour nous offrir aujourd’hui une biographie originale, écrivant ainsi de nouvelles pages de l’histoire du gaullisme et de l’histoire des femmes.

Jusqu’à aujourd’hui, Yvonne de Gaulle n’avait fait l’objet que de trois biographies - chiffre bien maigre comparé à la prolifique production historique sur le gaullisme –, qui ne sont «au mieux [que] des témoignages intéressants, au pire des successions d’anecdotes peu avérées et agencées selon une trame fantaisiste». Le travail est en effet difficile tant les sources sont, a priori, peu nombreuses. Que penser en effet du témoignage de Philippe de Gaulle, le propre fils d’Yvonne de Gaulle, qui nous décrit une mère des «plus banales» ? Quant à sa fille, Élisabeth, son mutisme n’a d’égal que la discrétion dont a su faire preuve tout au long de sa vie sa mère. Tout le mérite de Frédérique Neau-Dufour est d’avoir su retrouver la trace d’archives jusqu’alors inexploitées, notamment les archives de la Fondation Anne de Gaulle. Elle a su faire appel aux témoignages d’hommes et de femmes qui ont côtoyé celle qui fut la première «Première Dame de la Ve République», qu’il s’agisse de personnalités publiques tel l’écrivain et journaliste – ancien secrétaire du Général de Gaulle -, Claude Mauriac ou de membres de l’entourage familial, notamment ceux de la famille d’Yvonne de Gaulle, la famille Vendroux.

Yvonne naît en effet dans une famille bourgeoise de province qui possède une biscuiterie à Calais et passe ses vacances dans le château de Septfontaines, propriété de ses grands-parents maternels dans les Ardennes. Jolie jeune fille, Yvonne Vendroux est loin de l’image qu’elle léguera à la postérité : vive et épanouie, elle n’hésite pas à se lancer, d’excursions en ascensions, à la conquête des Alpes à la faveur des séjours que la famille passe dans les Alpes.

Sa vie bascule en octobre 1920 lors de la rencontre avec un jeune officier de retour de mission en Pologne : Charles de Gaulle. Bien que la rencontre soit arrangée par les parents d’Yvonne, très vite, le jugement de cette dernière sur son futur mari est arrêté : «Ce sera lui ou personne». Commence alors pour Yvonne de Gaulle ce que Frédérique Neau-Dufour intitule justement «Le bonheur à l’épreuve» : à l’épreuve de la naissance de leur fille Anne, trisomique, à l’épreuve de la vie itinérante que le métier de Charles impose à sa famille, et à l’épreuve – bien sûr – de la guerre : elle rejoint Londres seule avec ses enfants où elle retrouve son mari. La vie est alors rude : Yvonne s’est éloignée de Londres et ne voit guère le général de Gaulle, tout occupé qu’il est à entretenir la flamme de la résistance française.

C’est paradoxalement à la Libération et durant les longues années au cours desquelles le général de Gaulle s’exclut de la vie politique que son épouse réalise ce qui est sans doute son «œuvre» : la fondation Anne de Gaulle. Il s’agit pour elle de créer un lieu de vie pour les jeunes handicapées qui, contrairement à sa fille, ne bénéficient pas de la bienveillance protectrice de leur famille et se retrouvent encore souvent enfermées dans les asiles psychiatriques. C’est au château de Vertcoeur à Milon-la-Chapelle que le projet voit le jour : les jeunes filles y sont encadrées – c’est le souhait d’Yvonne de Gaulle - par des religieuses. L’attachement de la femme du général de Gaulle à cette œuvre est si fort qu’elle n’hésite pas à écrire qu'à Vertcoeur, «un bon morceau de [s]on cœur se trouve».

En 1958, le retour au pouvoir du général de Gaulle ne réjouit pas son épouse. Elle regrettera longtemps la Boisserie qu’elle préférera toujours au Palais de l’Elysée. Son influence politique est alors mince mais non négligeable et plus que surprenante pour ceux qui imaginent une «Tante Yvonne» bigote et pétrie de conservatisme. Elle soutient ainsi en 1967 la «loi Neuwirth» car – selon le témoignage de l’amiral Philippe de Gaulle – «la pilule pouvait éviter des drames dans certains cas». 1969 voit commencer «le temps des deuils», de la fin de l’histoire qui unissait le général de Gaulle aux Français à la mort de ce dernier le 9 novembre de l’année suivante. La générale se retire alors de la vie publique et mourra dix ans plus tard.

Que retenir du très beau livre de Frédérique Neau-Dufour ? Elle parvient à happer son lecteur, à lui faire connaître à travers lettres et témoignages comment cette figure de l’histoire qu’est le général de Gaulle s’est uni à cette femme trop souvent caricaturée de manière grossière. Au-delà, elle participe au renouvellement historiographique, qu’il concerne la biographie ou les gender studies. Son regard se porte avec minutie et attention sur l’un de ses seconds rôles si essentiels dans l’histoire. Elle apporte ainsi sa pierre à une histoire des femmes en politique en train de s’écrire.


Grégory Prémon
( Mis en ligne le 30/11/2010 )
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