|
Histoire & Sciences sociales -> Période Contemporaine |
| Olivier Landron La Vie chrétienne dans les prisons de France au XXe siècle Cerf - L'Histoire à vif 2011 / 35 € - 229.25 ffr. / 686 pages ISBN : 978-2-204-09420-7 FORMAT : 13,7cm x 21,4cm Imprimer
En France, le système pénitentiaire fait régulièrement débat. Très dernièrement, le Président de la République a par exemple affirmé que le pays a besoin de «80.000 places de détention», rien de moins, pour assurer une «exécution normale des peines». Pour ce faire, lobjectif annoncé est de construire 30.000 places dici 2017.
Ces chiffres ne laissent pas de donner le tournis. Surtout quils contribuent à dissimuler des individus souvent en grande détresse. Pourtant, ils sont fort symptomatiques des évidentes faiblesses de lunivers carcéral français, auquel Olivier Landron vient de sintéresser. Maître de conférences à lUniversité catholique de lOuest, il a en effet consacré un ouvrage érudit sur La Vie chrétienne dans les prisons de France au XXe siècle.
Paru aux éditions du Cerf, ce livre à la fois passionnant et très complet retrace les grandes évolutions de la vie chrétienne dans le système pénitentiaire français. De longue date, lEglise a investi les lieux de détention. Dailleurs, apprend-t-on au fil des pages, la peine de prison fut dabord conçue comme une pénitence. Cest donc un terme et une pratique très clairement religieux.
Ce qui traduit lengagement de lEglise auprès des détenus, lequel nest pas monolithique, mais prend des formes multiples : si laction de la hiérarchie catholique sest principalement focalisée sur la réflexion, comme en témoigne par exemple linsistance de Jean-Paul II sur la compassion et sur limportance du respect des droits de lHomme, les prêtres et les religieuses se sont montrés plus concrets en allant à la rencontre des prisonniers.
A cet égard, la naissance de laumônerie générale des prisons est évoquée. Il ressort de lanalyse de lauteur que la France est aujourdhui encore restée solidement fixée à la conception de la prison comme châtiment. Lemprisonnement est considéré comme une sanction. Dans les pays latins, la justice irait de pair avec une certaine notion de pénitence. Cest entre autres pour cette raison que le recours au vocabulaire religieux, ou imprégné de religiosité, serait si récurrent. En fait, il daterait de lépoque où lEglise rendait la justice elle-même.
A propos des acteurs de la vie chrétienne en prison, lauteur mentionne notamment le cas des congrégations féminines comme les surs Saint Joseph et des associations catholiques comme «Le bon larron». Mais ce nest pas tout : les laïcs ont eux aussi apporté leur contribution par le truchement dassociations et mouvements issus du christianisme. Avec force détails, lauteur relate lhistoire de ces engagements multiples en faveur des détenus.
Dans de savoureuses pages, Olivier Landron revient aussi sur lhistoire du système carcéral tout au long du XXe siècle. Sous la IIIe République, explique lhistorien, le travail apparaît comme lun des piliers de lunivers carcéral français. La prison sapparente véritablement à une usine. A partir de 1958, toutefois, le but de la prison évolue : ce nest plus de la moralisation des détenus dont il sagit, mais plutôt de leur formation. Ce faisant, la France se serait tournée vers le ''rehabilitative ideal'' américain, très lié au christianisme.
Finalement, observe O. Landron, il convient de ne pas confondre le curé avec lassistante sociale. Si lEglise a eu une influence sur le système judiciaire français, cela va en samenuisant. Il y aurait en effet une disjonction entre le légal et le moral.
Jean-Paul Fourmont ( Mis en ligne le 29/11/2011 ) Imprimer | | |
|
|
|
|