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La nouvelle Russie
Jacques Sapir    Collectif   La Transition russe, vingt ans après
Editions des syrtes 2012 /  21.29 € - 139.45 ffr. / 232 pages
ISBN : 978-2-84545-171-1
FORMAT : 14,0 cm × 22,6 cm
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«La Russie, affirmait naguère Sir Winston Churchill, est un rébus enveloppé de mystère au sein d'une énigme». Manifestement, vingt ans après l’effondrement de l’Union soviétique, l’aphorisme du célèbre Premier ministre britannique conserve toute sa validité, tant les évolutions dont la Russie a été le théâtre paraissent inachevées. L’actualité la plus récente en témoigne : l’absence de liberté de la presse, les difficultés rencontrées par l’opposition, le rétablissement de la verticale du pouvoir, la corruption, le népotisme ainsi que le maintien de Vladimir Poutine et de Dimitri Medvedev à des postes-clés tendent à démontrer que le système russe est à tout le moins… perfectible !

Expert en économie russe, directeur d’études à l’EHESS et du centre d’études des modes d’industrialisation, Jacques Sapir a publié une kyrielle d’ouvrages dont Le Nouveau XXIe siècle, du siècle américain au retour des nations (2008) et La Démondialisation (2011). Il vient de publier La Transition russe, vingt après, ouvrage paru aux éditions des Syrtes, qui réunit des contributions de divers économistes russes, dont Viktor Ivanter, Alexandre Nekipelov et Dimitri Kouvaline. Alors que le premier est académicien et dirige l’Institut de prévision de l’économie, le deuxième est vice-président de l’Académie des sciences de Russie et le troisième chef de département à l’Institut de prévision de l’économie.

Les vingt dernières années de la Russie postsoviétique, i.e. de ce que l’on a désormais coutume d’appeler «la nouvelle Russie», furent «pleines de bruit et de fureur», ainsi que le relève d’emblée l’économiste Jacques Sapir. Le chemin parcouru par la Russie durant ces années de transition est tout à fait «unique», et ce à bien des égards. Economiquement, aucune autre expérience dans le monde ne se rapproche de la «brutalité» avec laquelle cette économie naguère centralisée a été libéralisée. Politiquement, la démocratisation d’un pays qui n’a jamais connu la démocratie libérale a suscité autant d’espoirs que de craintes. Comme le reconnait l’auteur, la construction de l’unité nationale n’a pas facilité le processus de démocratisation du pays. Socialement, l’injuste redistribution des richesses a contribué à l’émergence de nouveaux antagonismes.

La Russie a vécu un immense chambardement durant les deux dernières décennies. Restait à réaliser une synthèse sur le sujet, lacune qui vient d’être comblée avec la parution de cet ouvrage d’excellente facture. Si les approches des différents auteurs sont différentes, elles sont néanmoins complémentaires. Le premier chapitre, du professeur Ivanter, porte sur «les transformations de la Russie contemporaine pour comprendre l’économie mondiale». Il s’agit de planter le décor et, ce faisant, d’expliquer les raisons essentiellement internes de la chute de l’URSS. L’universitaire russe évoque ensuite les réformes et les erreurs qui suivirent l’arrivée au pouvoir de Boris Eltsine : l’oubli de l’importance des institutions publiques devant encadrer le marché, la libération prompte et incontrôlée du commerce extérieur ainsi que la destruction d’une large part de l’épargne des particuliers.

Dans un chapitre consacré à «la transition macroéconomique et politique», Alexandre Nekipelov s’interroge également sur les impairs commis par les réformateurs durant les toutes premières années de la transition. Il met en lumière deux points en particulier : l’absence d’institutions économiques adaptées ainsi que le manque d’instruments permettant de lutter contre l’inflation galopante de l’époque. En raison de leurs nombreuses défaillances, les institutions mises en place par les réformateurs des années 1990 souffraient d’un manque de légitimité, en ce qu’elles bénéficiaient principalement aux oligarques. Dimitri Kouvaline part quant à lui d’une perspective microéconomique pour s’intéresser à la façon dont furent vécus les changements nés entre 1991 et 2011 par les entreprises et les entrepreneurs. Les comportements ne furent pas toujours vertueux, loin s’en faut. A cet égard, sans céder à la fatalité, l’économiste évoque le règne du népotisme, de la corruption et de la collusion avec les autorités publiques.

Le dernier chapitre de cette minutieuse enquête est l’œuvre de Jacques Sapir, lequel s’efforce de replacer l’expérience russe de la transition dans le contexte plus global de la mutation économique du monde. D’une certaine façon, «c’est toujours la même histoire qui est racontée, mais d’un point de vue différent». Les causes de l’échec de cette quête - encore inachevée - de normalisation sont idéologiques et matérielles. Ce qui fait tout l’intérêt de cet ouvrage à la fois fin et précis, c’est qu’il porte sur des problèmes très contemporains pour les économies et les sociétés européennes et qu’il offre de stimulantes perspectives de réflexion au lecteur. Au cours des vingt dernières années, la Russie a en effet fonctionné comme une sorte de «laboratoire des théories économiques» : le pays a connu dès 1998 une crise de la dette souveraine ; plus spécialement, l’expérience russe met en évidence l’extrême importance d’institutions publiques fiables pour encadrer les forces du marché.

Ainsi que l’écrit Jacques Sapir, le miroir russe tend à éclairer l’Europe sur elle-même.


Jean-Paul Fourmont
( Mis en ligne le 16/10/2012 )
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