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Du franchissement des frontières académiques
Luc de Heusch   La Transe et ses entours - La sorcellerie, l'amour fou, saint Jean de la Croix, etc.
Complexe 2006 /  24.90 € - 163.1 ffr. / 240 pages
ISBN : 2-8048-0059-8
FORMAT : 12,5cm x 21,5cm

L'auteur du compte rendu : Emmanuel Bain est agrégé d’histoire ; il est actuellement allocataire-moniteur à l’Université de Nice Sophia-Antipolis, où il prépare une thèse en histoire médiévale.
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Et cetera. La présence d’un tel mot dans le titre d’un ouvrage a de quoi inquiéter, et laisse présager d’un assemblage très artificiel. C’est pourtant absolument l’inverse qui se produit dans ce livre qui montre comment le concept anthropologique de transe peut être une clé d’interprétation de phénomènes aussi bien amoureux que politiques ou religieux, dans des sociétés totalement diverses. Et cetera : cette formule révèle même l’ambition de l’anthropologue Luc de Heusch : reconstruire un savoir universel, qui dépasserait les barrières de la discipline, du temps et de l’espace. C’est à cet incessant franchissement des frontières que nous convie cet ouvrage.

Un premier chapitre, capital, pose le cadre épistémologique. Il définit et justifie une série de distinctions qui servent ensuite de grilles d’analyse à d’autres phénomènes. Deux distinctions sont fondamentales. D’abord, «au sein des religions de la transe deux types opposés, la possession et le chamanisme» (p.28). La première est passive, subie, même si elle a pu être recherchée ou attendue, tandis que la seconde est active, auto-induite. Ensuite au sein de la possession, deux situations différentes apparaissent : une «possession heureuse» réalisée au moyen d’un procédé d’adorcisme, et une «possession malheureuse» qui appelle en réponse un exorcisme libératoire (pp.30-31). Naturellement, entre les pôles opposés de la possession et du chamanisme, existent diverses manifestations intermédiaires, comme le médiumnisme ou le prophétisme. Dans ce premier chapitre, l’auteur nuance prudemment ces oppositions ici résumées et répond aux diverses objections qu’elles ont suscitées. Les chapitres suivants sont autant de déambulations qui illustrent l’intérêt de ses concepts pour l’interprétation de phénomènes qui paraissent au premier abord très hétérogènes. Le lecteur y rencontre la psychanalyse, l’hypnose, l’Islam, le mysticisme, la Grèce ancienne, la poésie romantique, la littérature médiévale, l’amour, Max Weber ou même Hitler.

Deux thèmes, eux-mêmes liés, font l’objet d’une attention plus approfondie : l’amour et la mystique (Chapitres 3 et 5). L’auteur propose de lire la mystique espagnole comme une «étrange synthèse des idéologies de la possession et du chamanisme» (p.100), puis élargit cette position à l’ensemble des traditions mystiques jusqu’à la poésie romantique et surréaliste. De même la littérature de l’amour-passion, notamment Tristan et Yseult, fait l’objet d’une comparaison rigoureuse avec des mythes du monde entier. Deux autres thèmes sont abordés plus rapidement : la sorcellerie (Chapitre 4) et le charisme (Chapitre 6). La psychanalyse, quant à elle, est presque omniprésente dans un débat toujours ouvert avec les thèses de Freud.

Ce livre est donc le témoin de la réflexion d’un homme ouvert à diverses disciplines et diverses cultures. Il constitue presque un manifeste en faveur de la comparaison et de la pluridisciplinarité : «Je n’ai d’autre ambition que d’œuvrer à ouvrir les portes, de faire circuler le grand vent de la recherche qui, contrairement aux ambitions métaphysiques, est vouée à un perpétuel inachèvement» (p.220). Cette démarche est particulièrement stimulante, mais laisse aussi parfois sur sa faim. La brièveté des études ne les rend pas toujours très satisfaisantes, à la fois à cause des inévitables simplifications, mais surtout à cause d’un manque d’approfondissement des questions. Le risque est donc que les défenseurs des «interdits académiques qui dressent des frontières arbitraires entre diverses disciplines comme autant de chasses gardées où règnent en maîtres un certain nombre de spécialistes» (p.220) ne puissent facilement contester ces analyses.


Emmanuel Bain
( Mis en ligne le 01/06/2006 )
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