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Histoire & Sciences sociales  ->  Biographie  
 

Mac Mahon, le soldat légal
Gabriel de Broglie   Mac Mahon
Perrin 2000 /  22.75 € - 149.01 ffr. / 459 pages
ISBN : 2-262-01143-5
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Membre de l’Institut et auteur de plusieurs biographies primées par les Académies, Gabriel de Broglie nous offre ici une vision renouvelée de la vie du maréchal Mac Mahon, militaire haut en couleurs et premier président de la Troisième République. Dans un style à la fois superbe et agréable, cette biographie utilise les mémoires du maréchal mais aussi des documents inédits tels que les lettres de la maréchale de Mac Mahon à sa mère et les papiers d’Emmanuel d’Harcourt, membre du cabinet du maréchal. Elle permet surtout de faire la part entre la réalité du personnage et l’image d’Epinal. La vie du maréchal, duc de Magenta, est détaillée en deux parties principales mettant en scène la carrière militaire et la carrière politique. La seconde est particulièrement fouillée et on appréciera la clarté de l’exposé de cette période où tout était encore politiquement possible.


Descendant des anciens rois d’Irlande, les Mac Mahon servirent dans les armées du roi de France dès le XVIIe siècle. L’un d’eux s’illustra à Fontenoy dans les rangs de la brigade irlandaise. Maurice de Mac Mahon ne pouvait donc que se tourner vers les armes. Commencée sur une plage d’Algérie lors du débarquement de juin 1830, sa carrière militaire est une longue suite de faits d’armes. L’Algérie reste le lieu privilégié de cette épopée. Jeune lieutenant participant à la conquête, il se distingue comme un officier de première valeur, un excellent cavalier et un meneur d’hommes exceptionnel. Il inaugure un style de commandement proche des hommes, leur demandant beaucoup tout en étant soucieux de leur confort matériel et moral. Surtout, il a de la chance et échappe à plusieurs reprises à la mort. Dès le 21 novembre 1830, il reçoit la Légion d’honneur. C’est aussi un administrateur d’une grande probité dans un pays où règnent les petits trafics. Lors de son dernier séjour africain, il occupe le poste de gouverneur général de l’Algérie. Respecté par les populations, il ne peut cependant imposer l’idée d’un royaume arabe à l’administration impériale.


En 1848, il est général. La prise de la redoute de Malakoff à Sébastopol en 1855, les victoires de Magenta et de Solférino en 1859 le consacrèrent comme un des grands chefs militaires du Second Empire. Il est fait maréchal et duc en 1859. Affronté en 1870 à une armée prussienne mieux organisée et plus manœuvrière, il est débordé et subit des échecs à Woerth et Sedan. Mac Mahon est un guerrier d’élite, mais un piètre stratège. Blessé dans une reconnaissance inconsidérée, il échappe à la honte de la capitulation. De retour à Paris, il est nommé à la tête de l’armée de Versailles et participe à l’écrasement de la Commune en mai 1871.


Placé dans l’ombre de Thiers, il le seconde dans la réorganisation de l’armée. Adopté par le comte de Chambord et les bonapartistes, poussé par les députés monarchistes, il accepte de succéder à Thiers démissionnaire le 19 mai 1873, pour continuer "l’œuvre de libération du territoire et de rétablissement de l’ordre moral dans notre pays". Face à la montée des républicains, il est déchiré entre sa sympathie pour la monarchie et son loyalisme pour le régime en place. Ce dilemme le place d’abord dans une attitude de neutralité favorable à la droite de l’assemblée. Devant les conditions posées par le comte de Chambord et conscient de l’état d’esprit de l’armée, il ne peut que constater l’échec de la tentative de restauration des monarchistes en octobre 1873 et accepte le principe du septennat de sa fonction comme un pis-aller. Il en fut de même des lois constitutionnelles de 1875 où les conservateurs divisés durent abandonner toute idée de retour à la monarchie et les républicains accepter un régime parlementaire modéré.


La fonction présidentielle en sort grandie : monopole de l’initiative de la révision constitutionnelle, irresponsabilité devant l’Assemblée, droit de dissolution de celle-ci. Sous Mac Mahon, beaucoup de prérogatives présidentielles encore existantes aujourd’hui se mettent aussi en place : présidence du Conseil des ministres, domaine réservé du chef de l’état, qualité de chef des armées. Lors des élections de février 1876, la Chambre bascule à gauche. Mac Mahon doit gouverner avec celle-ci ; c’est la cohabitation. Lassé de cette situation, Mac Mahon renvoie le gouvernement le 16 mai 1877 et dissout l’Assemblée le 25 juin, dans une dernière tentative personnelle pour stopper la progression des républicains. Mais les élections du 14 octobre 1877 désavouent cette implication personnelle et électoraliste de la présidence et confirment la majorité républicaine modérée, tout en donnant quelques sièges supplémentaires aux conservateurs.


Mac Mahon reste pour achever la reconstitution de l’armée et comme garant de l’ordre public, mais il doit composer avec un gouvernement de centre gauche. Il mène un combat d’arrière-garde sur tous les projets de réformes sociale ou religieuse. Après les élections du 5 janvier 1879, la majorité républicaine s’attaque au dernier ministère qui lui échappe, celui de la Guerre. Mac Mahon refuse de révoquer plusieurs généraux et présente sa démission le 30 janvier 1879. A son départ, il laisse au pays un régime politique stabilisé, une place retrouvée sur la scène internationale et des forces militaires reconstituées. Jusqu’à sa mort en 1893, il partage son temps entre le cheval, la chasse, l’écriture de ses mémoires et la présidence de sociétés patriotiques ou de secours, refusant toute nouvelle fonction officielle.


Comme le fait remarquer Gabriel de Broglie, Mac Mahon fut toute sa vie en décalage avec la société dans laquelle il évolua : militaire héroïque dans une société où la bourgeoisie industrieuse dominait, monarchiste sous l’Empire, conservateur sous la République, chef d’état inexpérimenté au milieu des ténors de l’assemblée. Il apparut parfois comme drapé dans la posture du héros antique. Ce fut pourtant un officier plein d’entrain et un politique curieux des choses de son temps, favorisant personnellement l’organisation de l’exposition universelle de 1878.


Son intelligence politique et son aptitude aux compromis étaient certes limitées. Son image souffrait d’erreurs de langage que la presse grossissait à dessein. Mais il compensait ses faiblesses par un travail acharné, un grand pragmatisme et une rare ténacité une fois sa décision prise. Il sut s’entourer de collaborateurs de talent pour lesquels il n’avait malheureusement pas plus d’égards que pour lui-même. Il avait surtout un sens inné de la fonction présidentielle et du lustre à lui donner, ce qui facilita la reconnaissance de la République française par les monarchies européennes.


Respecté de ses adversaires, admiré pour sa prestance, modéré dans son discours, il resta, toute sa vie, un militaire, même égaré au sommet de l’état pour servir sa patrie. Il fut, selon l’expression d’Albert de Broglie, le soldat légal qui facilita le passage, sans révolution ni coup d’état, d’une société à l’autre. Il demeure une des grandes figures militaires et politiques du XIXe siècle.


Martin Barros
( Mis en ligne le 02/03/2001 )
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