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L’Apôtre du Verbe incarné
Pierre de Bérulle   Pierre de Bérulle - Oeuvres complètes - Tome 4, Correspondance, Lettres 1-205
Cerf 2006 /  47 € - 307.85 ffr. / 505 pages
ISBN : 2-204-08150-7
FORMAT : 13,0cm x 20,0cm

L'auteur du compte rendu : Françoise Hildesheimer, conservateur en chef aux Archives nationales, est professeur associé à l'université de Paris I. Elle a notamment publié Fléaux et société. De la Grande Peste au choléra. XIVe-XIXe siècles (Hachette, 1999), et, récemment, un Richelieu chez Flammarion (2004).
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Le «premier» XVIIe siècle est en France un temps de hautes eaux de spiritualité, du plus haut degré de rayonnement de la Réforme catholique ; on réédite les mystiques du Moyen Age, on dispose des chefs-d’oeuvre de la spiritualité espagnole (Sainte Thérèse, Louis de Grenade, Pierre d’Alcantara, Luis de la Puente, Saint Jean de la Croix) ; la France apporte au mouvement le produit de ce qu’on appelle traditionnellement son «école» avec de grands noms comme Bérulle, Saint François de Sales, Condren, Olier... Le christocentrisme est la caractéristique le plus souvent mise en avant pour caractériser cette école française qui s’attache à la contemplation du Verbe incarné ; la vie spirituelle du chrétien est centrée sur cette communion au Christ, il vit de la vie de Jésus en lui, laquelle est produite par l’Esprit-Saint.

Au tout premier rang de ce mouvement, Pierre de Bérulle, le fondateur de l’Oratoire, a ainsi été appelé «l’Apôtre du Verbe incarné» ; homme d’action politique et authentique mystique, il ne dissocie pas la théologie et l’expérience spirituelle, pratiquant une théologie mystique et transformant l’expression en contemplation, il développe et modifie constamment sa pensée sans guère se soucier d’y apporter de preuves ; Bérulle estime en effet les choses de la foi inconnaissables du fait de leur nature et part de la constatation de la grandeur et de la sainteté de Dieu en face de qui l’homme se trouve en situation d’adoration aimante qui débouche sur la notion de servitude, abandon volontaire de la créature ; son style aux longues périodes dans le goût de l’époque, jugé difficile et parsemé de figures rhétoriques et de métaphores, peut être assimilé à une démarche de contemplation, sa fonction est de dévoiler l’indicible, la présence incompréhensible de Dieu.

On a également pu créditer d’une théologie politique celui qui fut aussi, avec Michel de Marillac, l’un des grands adversaires de Richelieu avec qui il partageait profondément le souci de réforme de l’Église. En effet, si portés à la spiritualité qu’ils aient été, Bérulle comme Marillac n’envisageaient pas un retrait du monde, mais bien une participation active à la vie de l’État ; davantage, ils considéraient cette activité comme un choix de Dieu, une participation au plan de la providence divine sur leurs personnes. Le caractère pénible de cette action politique est un topos de leurs correspondances où ils déplorent de devoir participer à un monde déchu et corrompu, de ne pouvoir se dérober à une mission qui leur est imposée avec la même finalité d’assurer l’avènement du règne de Dieu.

Ne pas s’opposer à l’Espagne catholique et à poursuivre, à l’intérieur de la France, l’œuvre de restauration catholique en achevant de réduire la rébellion protestante dans le Midi, puis à mettre en action la réforme intérieure du royaume, tel est le programme des ces catholiques zélés, qui comptent sur le jeune et dévot Louis XIII et sa mère régente Marie de Médicis pour le mettre en œuvre : «Toute la chrétienté a les yeux ouverts sur Votre Majesté et attend des merveilles de votre piété, et, vous voyant avoir succédé comme miraculeusement à de si grands États, se promet que vous restituerez la paix et la tranquillité à l’État de Dieu qui est son Église», écrit Bérulle au roi (Discours de l’État et des Grandeurs de Jésus, dédicace au roi). Sur le point fondamental de la situation du protestantisme dans le royaume de France, Bérulle est persuadé de la nécessité d’une solution politique radicale, «que l’hérésie qui a pris naissance dans les brouilleries de l’État, ne peut prendre fin que par quelque coup d’État» (Habert de Cérisy, La Vie du cardinal de Bérulle, 1646). À terme, Richelieu décevra ce «parti dévot» qui l’estimait apte à réaliser ce programme ; mais on n’en est pas encore là avec les 205 lettres ici publiées pour les années 1590-1618.

Cette nouvelle édition de la correspondance reprend et enrichit celle donnée en 1937-39 par Jean Dagens, qui se bornait aux lettres de Bérulle ; elle leur adjoint la correspondance passive, permettant au lecteur d’entrer plus avant dans le dialogue épistolaire et nous faisant entendre des voix aussi spirituellement autorisées que celles de François de Sales, Madame Acarie, Michel de Marillac, André Duval… Bérulle qui, on l’a compris, n’est pas un auteur facile, a bénéficié de nombreux travaux historiques, ceux de Jean Orcibal et de Jean Dagens jadis, ceux d’Anne Ferrari et de Stéphane-Marie Morgain naguère. Prenant place dans l’édition des œuvres complètes commencée en 1995, sa correspondance, où se trouvent évoqués de manière plus concrète les problèmes spirituels qui le préoccupaient, permet de le suivre en Espagne à la recherche des religieuses destinées à introduire en France le Carmel, traitant avec Rome de la fondation de l’Oratoire, exerçant des fonctions de négociateur politique et-ou de directeur spirituel, et d’entrer ainsi dans l’esprit d’un temps, l’«Ancien régime», où spiritualité et politique se conjuguent, où affaires religieuses et politiques s’interpénètrent sans cesse, rendant normale la vocation des hommes d’Église à une carrière politique.


Françoise Hildesheimer
( Mis en ligne le 12/03/2007 )
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