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C’est terrible la politique (N. Sarkozy)
Bruno Le Maire   Des hommes d'Etat
Hachette - Pluriel 2008 /  9.50 € - 62.23 ffr. / 449 pages
ISBN : 978-2-01-279458-0
FORMAT : 11cm x 18cm

Première publication en janvier 2008 (Grasset).
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Après la déferlante des ouvrages politiques au moment des élections, voici venir le ressac des analyses, souvenirs, plaidoyers ou réquisitoires… Si Ségolène Royal reste l’indiscutable vedette féminine de l'actualité, le couple Villepin-Sarkozy valait bien un livre de souvenirs, c’est chose faite, et bien faite, avec le journal de Bruno Le Maire, sobrement, et scientifiquement intitulé Des hommes d’Etat.

Bruno Le Maire est un hiérarque original : diplomate de carrière, embarqué dans le navire Villepin quand celui-ci passe du Quai à la place Beauvau, puis à Matignon, il est alors conseiller, puis directeur du cabinet Villepin (et intermittent à l’UMP, de temps en temps…), et également assez sarko-compatible pour demeurer député UMP de l’Eure, après avoir refusé l’ambassade de France à Rome (peut-on refuser le palais Farnèse ?)… Alors un journal, tenu par un personnage aussi haut et bien placé, en première ligne dans le combat Sarkozy-Villepin, forcément, on salive…

Le livre est en effet constitué d’un journal, tenu au jour le jour, et qui nous dévoile beaucoup de la vie à Matignon, ainsi que des vacances et de la vie de famille de Mr Le Maire (ou plutôt de ses difficultés à en maintenir une). Passons sur les méditations familiales ponctuées de culture bobo, sans grand intérêt ; restent les souvenirs professionnels, bien plus excitants. Certains attendent sans doute un brulôt, une charge au vitriol contre X ou Y, des remarques acides, un coup de poignard… Passez votre chemin : Bruno le Maire est un observateur courtois, un témoin neutre qui ne cherche pas la phrase assassine (pas de verbatim ici) mais plutôt la description d’une ambiance un peu crépusculaire, celle des dernières années du quinquennat Chirac… avec, il est vrai, quelques scènes d’anthologie (le choix d’un ministre de l’environnement, les entrevues avec Sarkozy…). Le président se traîne, maussade, fatigué, las, déconnecté (jusqu’à confondre jogging et strip tease lors d’une conversation surréaliste avec Dominique de Villepin) dans ce livre que les estocades des dauphins (officiel et de fait) rythment. On se vouvoie, on déjeune ensemble, on se tape dans le dos, on se fait des politesses, on s’exaspère, on court, on tente d’éviter les casseroles des copains… «On est entre soi et on s’ennuie»…

Le lecteur aussi par moment, qui ressort de cette promenade en coulisse avec l’impression (partagée par l’auteur, lequel confie son émerveillement premier et sa lassitude finale) shakespearienne qu’il se fait là beaucoup de bruit pour rien. La croyance des uns et des autres en la vertu des seuls mots, face à une population qui attend des gestes, a quelque chose d’inquiétant, et parfois, on a très envie que le mot «vacuité» tombe (à la énième relecture d’un discours, au récit d’une réunion où chacun fait assaut de velléités prononcées d’une voix sûre).

Heureusement, le «déluge de Matignon» (traduction : la cascade des ennuis) veille et une vie politique agitée masque donc ce naufrage lent : l’avènement difficile de Villepin et le poids obsessionnel des opinions (publique et parlementaire), la rivalité plus ou moins construite entre «Nicolas» et «Dominique» comme un vieux couple en difficulté (axiome : «ne pas commettre l’irréparable»), les problèmes des banlieues et de l’apologétique banlieusarde, les diverses réformes et leurs contrecoups, la politique étrangère (avec quelques portraits inspirés : Poutine, Blair)…

En contrepoint, les querelles internes de l’UMP et autres passes d’armes sont assez distrayantes, et quelques apartés valent leur pesant d’or, comme ce plaidoyer de Sarkozy pour une double candidature stratégique Villepin-Sarkozy, ou bien ce jugement de Villepin sur la nature même de l’homme politique. Villepin en sort conforté dans la figure de l’homme d’Etat consciencieux, plutôt bon analyste mais pas assez politique. Sarkozy persiste en accroc au changement et aux montres de marque, ainsi qu’en stratège habile de la rupture. Constat : les deux hommes se rejoignent dans une commune «capacité de perturbation du jeu politique». De fait !

On peut être un peu déçu par les remarques très consensuelles et politiquement plus que correctes de l’auteur, lequel ne cherche ni à faire de l’esprit, ni à pousser des positions originales. Mais on sera forcément séduit par le ton sobre de l’ensemble et les réflexions mi-ironiques, mi-désabusées, de B. Le Maire ainsi que par une objectivité raffinée qui laisse le lecteur juger «sur pièces». Le récit froid de cette cohabitation entre deux personnalités politiques aussi dissemblables vaut un bon ouvrage d’histoire naturelle. «C’est terrible, la politique» !


Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 25/11/2008 )
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