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Les nouveaux programmes au piquet | | | Michel Leroux De l'élève à l'apprenant - Et autres pamphlets Bernard de Fallois 2007 / 18 € - 117.9 ffr. / 155 pages ISBN : 978-2-87706-637-2 FORMAT : 13,0cm x 20,0cm
Lauteur du compte rendu : Arnaud Genon est docteur en littérature française (PhD). Professeur de Lettres Modernes, il est aussi membre du Groupe «Autofiction» ITEM (CNRS-ENS) et auteur, chez lHarmattan, de Hervé Guibert. Vers une esthétique postmoderne. Imprimer
Michel Leroux, professeur agrégé de lettres, a longtemps enseigné en lycée et en collège. Il a ainsi suivi lévolution des programmes de français du collège et du lycée qui, rénovés entre 1996 et 2001, ont redessiné le contenu de ce que devaient enseigner les professeurs de lettres et apprendre les élèves, désormais appelés, selon le jargon en vigueur, les «apprenants».
Depuis 1999, à travers les différents articles réunis dans le présent recueil, Michel Leroux ne cesse de sinsurger «contre le caractère irrationnel» de la politique pédagogique responsable de lapparition, voire de linvasion des lettres, par un jargon techniciste hérité du structuralisme, de la narratologie et de la linguistique. Ce jargon légitime dans le milieu universitaire pose problème dans lenseignement secondaire. Ainsi, les collégiens et les lycéens se confrontent rapidement aux questions de lénonciation, aux repérages des champs lexicaux, des champs sémantiques, à la construction de schémas actantiels ou autres schémas narratifs alors que pour beaucoup, la langue est encore mal maîtrisée : «Mieux vaudrait veiller, avant toute chose, à munir les élèves des outils nécessaires à qui désire penser, jentends le maniement dune syntaxe élémentaire et du vocabulaire le plus courant», déclare logiquement lauteur.
Comment alors expliquer ce décalage entre les difficultés des élèves à maîtriser leur langue et les exigences des programmes ? Outre les pressions dassociations et autres lubies duniversitaires siégeant dans diverses commissions, il semble surtout daprès lauteur que lun soit la conséquence de lautre. Les élèves, privés de plus en plus dheures de français, et ce depuis le primaire, sont souvent démunis face aux textes auxquels ils sont confrontés. Les outils qui leur sont donnés par les nouveaux programmes leur permettent ainsi de dégager les grandes structures du texte, de repérer des ensembles de mots, de relever des indices linguistiques
alors même que le sens de ce quils ont à lire leur échappe. Ainsi, on «équipe de béquilles des êtres à qui lon na pas appris à marcher». Autre problème soulevé tout au long des articles, est lidée quà techniciser la littérature, on en oublie sa dimension existentielle. Et à oublier cette dimension, on pourrait occulter le plaisir de la lecture à une époque où elle se trouve sérieusement concurrencée par la télévision ou les jeux vidéo.
Les constats faits par Michel Leroux sont souvent durs. Mais ils reflètent la réalité dune profession tiraillée entre les impératifs des programmes et la confrontation avec un «public» souvent désarmé. Aussi, les propositions faites ici sonnent parfois le retour à une querelle entre les anciens et les modernes, entre les partisans des «bonnes vieilles méthodes» et les réformateurs. Cet ouvrage a le mérite de poser de vrais problèmes et de souligner certains des abus commis ces dernières années. Mais il faut faire attention : à trop forcer le trait, à insister fréquemment sur les aspects les plus jargonnants des programmes on pourrait quelquefois sombrer dans la caricature. Et faire des programmes les seuls responsables du malaise actuel occulterait finalement les raisons profondes des difficultés rencontrées : le passage dune société de lécrit à une société de limage et les nouvelles relations entretenues entre les jeunes générations et les codes écrits.
Arnaud Genon ( Mis en ligne le 28/09/2007 ) Imprimer
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