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Dossier Justice
Sept ans de solitude
Sans instructions
Notre affaire à tous
Notre Justice
Mouvements N° 29 septembre-octobre 2003

Les minutes d'un juge d'instruction
Eva Joly   Notre affaire à tous
Gallimard - Folio Documents 2002 /  4.5 € - 29.48 ffr. / 256 pages
ISBN : 207042376X
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Avant de créer l’événement en claquant la porte du TGI de Paris, bien avant de devenir le symbole de la justice financière en France, Eva Joly a grandi « dans le ciel », dans « le pays où l’homme est le plus proche des Dieux » : la Norvège. Des figures merveilleuses émaillent son enfance : ancêtres producteurs de framboises, agriculteurs de montagne, grand-mère – « une femme magnifique » - propriétaire d’un salon de coiffure et chanteuse d’opéra à ses heures, père fabricant de costumes militaires… Gro Farseth, qui allait devenir Eva Joly, en gardera un goût prononcé pour les étoffes riches, et une confiance absolue dans la vie.

Elle débarque à Paris en 1964 comme jeune fille au pair, « tombe en amour » avec Paris, puis s’enamoure du fils de la famille Joly. Elle a vingt ans, lui vingt et un. Comme il n’a pas fini sa médecine, elle sera secrétaire. Les cours du soir mènent Eva à un premier poste de conseillère juridique dans un hôpital psychiatrique de l’Essonne qui la marque à jamais : « la vie n’a pas de sens si on n’ouvre pas chaque jour de nouvelles portes en soi. » Un concours exceptionnel d’accès à la magistrature lui ouvre la porte, en 1981, du parquet d’Orléans où elle devient substitut du procureur. Deux ans plus tard, elle rejoint le TGI d’Evry, où la confrontation quotidienne avec la petite déliquance lui démontre avec violence l’inadaptation du système judiciaire à la misère sociale. Un passage au Ministère des Finances (1989), dans le cadre du Comité interministériel pour la reconstruction industrielle, l’initie enfin à la « culture d’action ». Promotion au mérite, absence de bruits de couloir, respect des horaires et… matériel informatique ! C’est un choc. A cet égard, l’entrée d’Eva à la Galerie financière du palais de Justice de Paris, en 1993, sera un retour à « la guerre des crayons » mais une deuxième révolution est en marche, tout juste commencée.

Notre affaire à tous n’est pas un pamphlet destiné à faire trembler de nouveaux patrons, à stigmatiser les coupables de la dérive de la justice française, ou à faire la démonstration didactique et culpabilisante de nos responsabilités « à tous ». Bien au contraire. Ecrit sous la forme d’un récit simple et au jour le jour, Eva Joly raconte son histoire de « personne ordinaire dans un contexte extraordinaire ». Avec sobriété et pudeur, elle exprimer ses doutes, ses espoirs, ses euphories dans le but de se guérir de son « double de papier » qu’a engendré sa médiatisation soudaine et excessive.

En cela, les « minutes » d’Eva Joly n’ont rien de commun avec celles de Laurence Vichnievsky ou d’Eric Halphen qui ont été publiées au même moment. Mais elles font incroyablement mouche. Au fil de la narration, personnelle et minutieuse, qui nous attache aux pages malgré nous, se compose peu à peu le tableau d’une justice vétuste en décalage abyssal avec la réalité. La justice, qui semblait déjà désarmée face à la petite délinquance, vole en éclats devant le déficit de moyens et l’anachronisme des mentalités. La démonstration est simple : notre représentation du monde reconnait un seul processus pénal, fondé sur la rédemption. Le criminel reconnaît son geste et paie sa dette par une condamnation. La société s’engage à le « rééduquer socialement ». A rebours, les personnes qui pratiquent la corruption ne sont pas des enfants battus ou des victimes de la societé. « Leur parcours reflète au contraire une suradaptation et une aisance sociale remarquable ». Par ailleurs, « un délinquant financier n’avoue jamais... » Tant que la justice n’aura pas pris acte de ce bouleversement intellectuel, elle tournera à vide, reproduisant à l’infini ce curieux article du code pénal : « La loi s’applique à tous, sauf à celles et à ceux qui détiennent un pouvoir politique ou économique. »


Florence Puech
( Mis en ligne le 25/04/2002 )
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