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| Qui a peur de la République des juges ? |
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Dans une entrevue postérieure à lédition de son livre pamphlet, le juge Halphen devait déclarer que la justice dont «le but premier [nest pas] dessayer de réduire les inégalités, de donner sa chance à chacun et de prêter un peu plus dattention à ceux qui ont moins de pouvoir [
] manque à son devoir.» Selon le juge démissionnaire, le Droit est au service de la Justice sociale. Il sagit là pour certains dune véritable méprise, sur laquelle il convient de se pencher pour comprendre la crainte relayée par de nombreux politiciens se sentant, à juste titre, menacés - de voir sinstituer une «République des juges» établie au nom dune idée de la justice discutée, sinon discutable. La Justice est-elle un pouvoir politique ou un moyen daction au service du Politique incarné par lEtat ? La Justice a-t-elle pour vocation de réparer les inégalités («injustices») qui caractérisent le corps social, ou doit-elle uniquement garantir légalité des citoyens devant la Loi de la République ?
Au-delà de «lécume des jours» problèmes budgétaires entravant le fonctionnement de linstitution, affaires juridico-politiques défrayant les chroniques et effrayant lopinion on constate une véritable réification de la Justice. Laquelle est passée du statut dinstrument, plus ou moins transcendant, de pacification sociale, à celui dun but en soi. Autrefois inspirée par les dieux, elle tend aujourdhui à devenir une entité autonome. Par ailleurs, la place toujours plus importante de la Justice et du Droit ce que daucuns appellent «juridiciarisation» de la société rendent le Citoyen soumis à la Loi sensible aux aspects les plus mineurs comme les plus abstraits de ce pouvoir en pleine mutation.
Que juger, et comment ? Quels moyens pour quelle institution et selon quels principes ? Soulignons limportance de ces enjeux, et souhaitons que les «affaires» néclipsent pas lessentiel, à savoir la compréhension de lévolution juridique de notre société. Si voici plus dun siècle, Victor Hugo décrivait leffort détablissement de lEtat de droit avec limage du «rocher de Sisyphe», peut on aujourdhui parler, avec Laurent Cohen -Tanugi, dune révolution copernicienne de «Notre Justice», allant dans le sens de plus de droit pour plus de démocratie ? Les ouvrages présentés dans ce dossier apporteront sans aucun doute un début de réponse.
Vianney Delourme ( Mis en ligne le 25/04/2002 ) Imprimer | | |
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