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Musique Classique &Opéra -> Musique instrumentale |
Variations Goldberg et autres oeuvres pour piano et clavecin Johann Sebastian Bach (1685-1750) Claudio Arrau( piano ) Wanda Landowska( clavecin )
RCA / BMG 2001 ffff Télérama 2001 Diapason d'or 2001 TT : 152 mn. 74321 8450932 Réédition 2 CD | Variations Goldberg, Invention n° 8, Sinfonia n° 6, Fantaisie chromatique et fugue en ré mineur (Claudio Arrau)
Concerto en ré majeur d’après Vivaldi, Prélude, fugue et allegro en mi bémol majeur, Caprice sur le départ de son frère bien-aimé, Partita n°2 en ut mineur (Wanda Landowska)
Enregistrement (studio) : 1942, 1945, 1946, 1957. Mono AAD. Prise de son très terne, parfois du bruit de fond (Arrau); décente mais un peu trop bruyante (Landowska)
Notice : minimaliste, passe-partout et peu lisible.
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Commençons par être désagréable. Il est très choquant de voir Wanda Landowska (mentionnée en tout petit sur la pochette et qui n’a pas droit à une photo) servir de simple complément à un programme Arrau certes copieux, mais dont l’esthétique musicale est sans rapport avec la sienne. Est-il d’ailleurs bien décent de juxtaposer, sans grande réflexion, trois enregistrements isolés de la claveciniste, de surcroît d’époque différente ? J’entends bien qu’on peut toujours faire comme s’il s’agissait de contraster piano et clavecin, mais une telle désinvolture agace – sans beaucoup étonner. Quant aux dates d’enregistrement, elles ne sont, bien entendu, indiquées qu’à l’intérieur du boîtier !
La version qu’Arrau donna en 1942 des Variations Goldberg n’a pas bonne réputation. L’aria du début, étonnamment heurté et fragmenté, voire savamment arythmique, ne peut que surprendre à première écoute. Pourtant, l’audition des trente variations montre que leur exécution obéit, sinon à des principes assurés, du moins à une volonté de recherche. Près de soixante ans plus tard, je crois qu’on peut y voir, de la part d’Arrau, un effort colossal pour sortir de la tradition « XIXe siècle » et tourner le dos à ce Bach en fer forgé qu’elle imposait souvent : parfaitement lissé et maîtrisé mais qui ne respirait plus. Le problème est évidemment que le Chilien fait usage de l’instrument même de cette tradition, à savoir le piano moderne, dont la structure et la technique sont sans rapport avec celles du clavecin. Arrau ne résout pas la difficulté (il y a dans cette version des chutes de tension, des brusqueries, des passages à vide), mais il l’affronte crânement. Sans l’avoir prévu, il ouvre un chemin que, beaucoup plus tard, Glenn Gould arpentera avec majesté.
La musique ancienne doit tant à Wanda Landowska qu’on se sent un peu gêné d’émettre des réserves. Elles tiennent, là encore, à l’instrument dont elle jouait, réplique moderne un peu incongrue d’un clavecin dont Leonhardt et les autres nous ont fait, depuis, redécouvrir l’extraordinaire richesse sonore. Celui qu’elle touche ici est, de ce point de vue, assez accablant : dès que le rythme s’accélère, on a l’impression d’entendre une guitare passablement sèche. Il manque de puissance, d’où sans doute un jeu martelé d’autant plus dérangeant que le son est pris d’assez près. Les choses s’arrangent avec la Partita n° 2, enregistrée plus tardivement (1957). Et, bien entendu, Landowska fait preuve d’une noblesse de ton et d’une pureté de ligne exemplaires qui peuvent survivre à tout. Je crains toutefois que l’avenir de ce double CD ne se présente mal : trop pointu pour les simples mélomanes, il ne saurait retenir les amateurs d’enregistrements historiques qui ont de quoi se satisfaire ailleurs, y compris par les mêmes interprètes.
Baptiste Ajamet ( Mis en ligne le 06/07/2001 ) Imprimer | |
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