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Le mystère de l’horreur avec Kevin Macdonald Wild Side Video 2008 / 19.99 € - 130.93 ffr. Durée DVD 121 mn. Durée film 85 mn. Classification : Tous publics | Sortie Cinéma, Pays : France, 2007
Sortie DVD : 7 mai 2008
Version : DVD 9, Zone 2
Format vidéo : PAL, format 1.66
Format image : Couleurs et N&B, 16/9 compatible 4/3
Format audio : Anglais, Français, Dolby Digital 2.0
Sous-titres : Français
Bonus :
- Au coeur du procès Barbie : documentaire mêlant interviews, témoignages, images darchives (47 mi.)
- Extrait du déroulement du procès Barbie (disponible en intégralité en partie Rom)
- Filmographie de Kevin MacDonald
- Biographies Klaus Barbie & Jean Moulin
- Présentations des intervenants
- Repères historiques : la Seconde Guerre Mondiale
- Après la guerre : les crimes en jugement
- Bibliographies thématiques
L'auteur du compte rendu : Essayiste, romancier, Jean-Laurent Glémin est titulaire dun troisième cycle en littérature française. Ayant travaillé notamment sur les sulfureux Maurice Sachs et Henry de Montherlant, il se consacre aujourdhui à lécriture de carnets et de romans. Il na pas publié entre autres Fou dHélène, LImprésent, Fleur rouge, Chair Obscure, Continuer le silence. Imprimer
Auteur entre autres dun film sur le tyran ougandais Amin Dada, Le Dernier roi dEcosse, réalisé en 2006, Kevin Macdonald revient sur le triste parcours du tortionnaire nazi Klaus Barbie (1913-1991) dans ce documentaire dont la principale qualité est la sobriété du traitement. Lorsque lon sattaque à un tel sujet, il faut rester le plus humble possible en tentant de distinguer le vrai du faux, et cest ce que fait Macdonald en construisant à la fois une enquête solide et en laissant sexprimer ses témoins. Ce documentaire sur le cas Barbie pose les bonnes questions, interroge nos consciences, et annonce des faits pour le moins saisissants, notamment sur sa vie après 1945.
Si lexistence de Barbie avant guerre est expédiée de façon un peu brutale, le spectateur assiste à un parcours politique et idéologique qui samplifie avec les années. De sous lieutenant, il passe au grade dofficier et devient vite le numéro 3 de la Gestapo lorsquil est envoyé à Lyon pour chasser les résistants et les Juifs. Bien quil ait contribué à des milliers darrestations et de déportations, et que sa signature apparaisse sur des décrets de rafles et dexécutions en tout genre, on retient essentiellement deux choses : Il est lhomme qui a torturé Jean Moulin en 1943, ce qui a conduit à la mort du résistant lors de son dernier voyage vers les camps, et il est le commanditaire direct de la rafle dIsieu où 44 enfants juifs furent embarqués pour Drancy puis vers les chambres à gaz allemandes. Ce sont, pour faire vite, ces deux chefs daccusations qui seront retenus contre lui en 1987 lors de son procès à Lyon où il sera condamné pour crimes contre lhumanité.
La question que pose Macdonald est simple. Pourquoi Barbie na été extradé (en fait échangé par la Bolivie contre quelques faveurs à la France sous limpulsion de Régis Debray
) de la Bolivie où il vivait paisiblement vers la France quen 1983 alors que ses activités nazies pendant et après guerre étaient connues dun certain nombre de gens ? Et bien parce quil était un agent important de la CIC (Services de renseignements américains) qui avait pour but de lutter contre le communisme durant la Guerre froide en imposant quelques bonnes dictatures militaires. En 1948, il est convoqué pour le procès de René Hardy, ce résistant accusé davoir trahi Moulin, sans être inquiété ! Pourtant en 1949, la France prend conscience du rôle quil a joué durant la guerre, mais le CIC le cache et Barbie échappe à la justice.
En 1957, il sinstalle à La Paz où il sera cueilli en 1982 suite au long travail des «chasseurs de nazis», Beate et Serge Klarsfeld. Il participe au coup dEtat militaire de René Barrientos en 1964 avec la CIA, toujours dans loptique dinstaller des dictatures militaires en Amérique du Sud afin de contrer lexpansion communiste. Il aurait même contribué à larrestation du Che. Infatigable travailleur, il continue de prôner lidéologie nazie en voulant créer un quatrième Reich en Bolivie. Il fonde la Transmaratima Boliviana, une compagnie maritime bolivienne pour laquelle il fera un voyage en France en 1970 où il se fait reconnaître par Serge Klarsfeld sur des photos prises lors dune réunion daffaires. Ladislas de Hoyos, journaliste français, interroge celui qui se fait passer pour Klaus Altman sur son passé de nazi mais ce dernier nie tout et refuse dadmettre quil était officier de la Gestapo à Lyon en 1943. On apprendra plus tard que lhomme daffaire Barbie fera une petite halte durant ce fameux voyage de 1970 au Panthéon, déposer un bouquet de fleurs sur le tombeau de Jean Moulin. Mitterrand aurait piqué lidée à Barbie ? Toujours est-il que dans cet acte, Barbie passe du tortionnaire banal, du nazi sadique, à lhomme complexe que personne na pu réellement analyser.
Durant son procès tardif, il ne pipera mot jugeant quil nétait pas à sa place ici et quil était victime dun enlèvement par lEtat français. Comme il niera son passé dofficier nazi durant la guerre à chaque fois que lon lui demandera. La lâcheté, lignominie, linhumanité du personnage sont montrées au travers des témoignages des juifs et des résistants qui ont survécu à ses tortures (Barbie participait lui-même à ces actes de barbarie.). Lextrait où Ladislas De Hoyos lui soumet la photo de Jean Moulin - il la regarde à deux fois et dit avoir découvert lexistence et la vie de cet homme dans Paris-Match - renseigne plus sur lhumanité que nimporte quel traité danthropologie ! Barbie est un gouffre de mensonges digne des plus grands psychopathes, mensonges quil parvient à dominer dans une carapace inspirant interrogations, douceur et sincérité. Cette apparence opaque, ce regard vide, bien connu chez le requin blanc par exemple, à lintérieur duquel on ne lit rien, il les conservera des années après lors de son procès où la seule chose personnelle dont on pourra tirer de lui résidera dans ces quelques mots quil prononcera à la cour: «Quelques mots en français. Je nai pas commis la rafle de Isieu. Je nai jamais [eu] le pouvoir de décider des déportations. Jai combattu la Résistance, que je respecte, avec dureté. Mais cétait la guerre. Et la guerre cest fini. Merci.»
Au cur du procès Barbie, réalisé par Camille Ménager, dans les suppléments du DVD, revient sur le procès de Klaus Barbie qui fut jugé symboliquement à Lyon en 1987, là même où il officia durant la guerre. La question est de savoir sil était légitime de condamner un vieillard quarante ans après les faits et de se donner bonne conscience en en faisant un bouc émissaire quand tant dautres ont échappé à la justice et, pire, se sont reconvertis et sont morts sans avoir été inquiétés. Barbie nétait pas la crapule nazie numéro 1 et il est devenu le bourreau le plus tristement célèbre de lhistoire du nazisme en France. Certains, dans léchelle des horreurs les plus inconcevables, ont fait pire... Mais le but de ces procès fut avant tout éthique. Barbie confie à un journaliste dans lavion qui le conduit en France quil a oublié ses crimes et que la France devrait en faire autant. Cest en cela aussi quil représente le tortionnaire sans remord, sans pitié, sans âme presque, quil fallait juger pour des crimes qui dépassent lentendement, ces questions de légitimité et le temps.
Jean-Laurent Glemin ( Mis en ligne le 08/05/2008 ) Imprimer
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