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Coffret Mai 68 : Coup pour coup
avec Marin Karmitz
MK2 2005 /  27  € - 176.85 ffr.
Durée film 86 mn.
Classification : Tous publics

Le coffret Mai 68 comporte Coup pour coup, Mourir à 30 ans et L'an 01.

Sortie Cinéma : 1972, France

Version : DVD 9/Zone 2
Format vidéo : 4/3
Format image : 1.33
Format audio : Mono
Sous-titres : anglais

Double DVD

DVD 1
Film
Préface de Serge Kaganski (3’)
Marin Karmitz parle de la sortie de Coup pour coup (7’)
Interview de Serge July, directeur de Libération (26’)
Interview de Louis Joinet, avocat général à la Cour de cassation (16’)
Interview d’Olivier Rolin, écrivain (dirigeant de la Gauche Prolétarienne à l’époque de la sortie du film) (21’)
Bande-annonce (3’)

DVD 2
Journal du tournage de Coup pour coup et commentaires de Marin Karmitz (121’)
Le conflit LIP 1973-1974 de Dominique Dubosc (59’)
Présentation de Dominique Dubosc (10’)

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Dans une usine textile en France, des ouvrières travaillent dans des ateliers de confection sous la coupe des contre-maîtres et des divers responsables qui font régner une discipline de fer. Entre les cadences infernales du travail à la chaîne, le bruit incessant des machines, les interdictions de parler et autres règlements inhumains, ces femmes vont se révolter en recourant à diverses stratégies comme le sabotage des machines ou le débrayage, ce qui va entraîner le licenciement de deux d’entre elles. Pour les réintégrer, leurs collègues décident de se mettre en grève en occupant l’usine.

DE LA SPECIFICITE DES GREVES DE FEMMES, UN PHENOMENE NOUVEAU

Ce que nous montre ce film, au-delà des conditions de travail dégradantes des ouvrières, ce sont les conditions de vie particulièrement difficiles de ces femmes, prises entre le travail à l’usine et le travail domestique (ménage, courses, cuisine…), entre le mari et les enfants et la nourrice à payer. L’axe du regard se situant à la fois sur le terrain de la sphère publique et de la sphère privée fait toute la spécificité des grèves initiées par les femmes, phénomène nouveau à l’époque. Karmitz s’est voulu le vecteur de leur parole. Dans les bonus, celui-ci commente le journal du tournage et dit s’être inspiré de toute une série de grèves de femmes dans le Nord de la France dans le contexte de l’après-mai 68. Tout commence en effet lorsqu’il travaille en tant que photographe pour le journal Libération pour suivre ces mouvements sociaux ; il a alors l’idée de réaliser un long-métrage à partir des témoignages des ouvrières. Son souci de faire émerger un « langage ouvrier », la conviction que « la parole ouvrière devait être portée par les ouvrières » fait naître chez lui l’idée que pour réaliser un film sur les ouvrières, il faut le faire avec les ouvrières. Ces femmes révoltées deviennent alors les actrices du film au sens propre comme au sens figuré : elles ne constituent pas seulement la quasi-totalité du casting mais prennent également une part très active dans l’écriture du scénarii. Au début des années 1970, cela fait l’effet d’une petite révolution tant dans le monde du cinéma qu’au sein d’une société en proie à de multiples conflits sociaux.

EN PLEINE MOUVANCE DE MAI 68, LE FILM RELANCE LE DEBAT SUR LE ROLE DES INTELLECTUELS DANS LA SOCIETE

Ce procédé est la résultante du débat sur le rôle des intellectuels et des artistes dans la société qui a émergé en mai 68. Coup pour coup fit l’objet d’un remake de Godard intitulé Tout va bien avec une démarche totalement opposée. Selon Karmitz, son propre film relatait le point de vue des ouvrières relayée par sa caméra alors que celui de Godard relayait sa propre pensée de cinéaste sur les conditions de vie ouvrière en employant des actrices professionnelles telles Jane Fonda. Le point de vue de Karmitz rejoint celui de Michel Foucault qui disait en substance que « l’intellectuel n’a pas à faire valoir son discours sur celui des autres. Il essaie de donner place au discours des autres (…) Son rôle est d’ouvrir des possibilités de discours, et de mêler le sien aux autres, d’entrelacer son discours avec celui des autres, comme un support » (1), de donner la parole à ceux à qui ne l’avaient pas jusqu’alors, à ceux qu’on nécoutait pas, en l’occurrence la classe ouvrière.
LE CONFLIT LIP EST REVELATEUR DE L’ACTIVISME DES OUVRIERS FACE A UN SYNDICALISME DEPASSE

Le documentaire de Dominique Dubosc sur le conflit Lip et son extraordinaire longévité met en lumière la spécificité des grèves de l’après-mai 68 où la prise de parole et la liberté d’action deviennent collectives. En tenant compte des réflexions de chaque salarié, les syndicats se voient dépossédés de leur souveraineté dans les rapports de force avec les dirigeants, et pour la première fois, « les ouvriers se sont sentis être quelque chose dans l’usine ». Avec le film Coup pour coup, cette revendication du droit au travail dans la dignité humaine devient universelle – son incroyable succès national et international et les effets que le film a provoqué en témoigne – en portant la parole de ceux qu’on oublie trop souvent, les ouvriers.

La richesse des bonus rend justice à l'impressionnant travail entrepris par Marin Karmitz qui a contribué à son échelle, par sa détermination et avec ses armes - le cinéma - à la réappropriation d’une parole et d’une dignité par le corps ouvrier. En ces temps troublés par les délocalisations et autres restructurations de multinationales, le cinéma français redevient, à l’instar de son frère britannique, une conscience politique et sociale. Il suffit pour s’en convaincre de citer des films comme La vie rêvée des anges, Violence des échanges en milieu tempéré, Trois huit, Ressources humaines ou encore Rosetta pour le cinéma belge. On ne peut conclure le sujet sans mentionner le travail conséquent de Karmitz en tant que producteur et distributeur de films qui constitue, à travers sa société MK2, un beau prolongement de son militantisme social et culturel.

(1) Dits et écrits de Foucault, Gallimard


Tiphaine Rochereuil
( Mis en ligne le 16/05/2005 )
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