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Five Obstructions
avec Lars Von Trier, Jørgen Leth, Alexandra Vandernoot, Patrick Bauchau, Claus Nissen
Films sans frontières 2005 /  26.07  € - 170.76 ffr.
Durée film 90 mn.
Classification : Tous publics

Sortie cinéma, Pays : 2003, Danemark / Belgique
Titre original : Five Obstructions

Version : DVD 9/ Zone 2
Format image : 16/9 compatible 4/3
Format vidéo : 1.85 (couleurs)
Format audio : Danois, Anglais (Dolby Stéréo)
Sous-titres : Français

Bonus :
Manifestes de Lars von Trier et Jørgen Leth
A lÂ’origine de lÂ’homme parfait
Note d’intention du réalisateur
5 poèmes de Jørgen Leth
Biographies
Film annonce
Collections Films du Siècle et Auteurs

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Que se passe-t-il donc dans la tête de Lars von Trier ? A voir ses films et leur façon de jouer avec les personnages et les réactions des spectateurs, on se doutait bien que le fameux cinéaste danois est plutôt du genre tordu. Pour ceux qui cherchaient encore une preuve formelle à cette hypothèse, voici Five Obstructions, un étrange objet filmique co-réalisé avec son compatriote Jørgen Leth. Celui-ci a sorti en 1967 un court métrage en noir et blanc de 13 minutes intitulé The Perfect Human, que Lars von Trier adore et prétend avoir vu « au moins vingt fois ». A présent, il défie son réalisateur d’en tourner cinq remakes, en lui imposant à chaque fois des « obstructions » (un terme issu du football), c’est-à-dire des restrictions, des ordres et des interdictions, qu’il cherche à rendre les plus pénibles possibles…

Nous voilà donc face à un jeu plutôt pervers, où un réalisateur accepte de se faire manipuler et agresser par un autre, dans le but d’obtenir des œuvres inédites, qu’il n’aurait jamais créées de lui-même. Une sorte de parcours initiatique explorant les rapports complexes entre la créativité artistique et les contraintes, et une expérience psychologique menée par Lars von Trier sur le cobaye Jørgen Leth, pour voir si l’aventure le transformera. « Je veux passer du parfait à l’humain, te banaliser, lui explique-t-il, c’est comme une thérapie. » On commence alors à bien voir le rapport entre Five Obstructions et les autres films du docteur von Trier : Jørgen Leth devient un simple acteur qu’il secoue dans tous les sens pour lui faire dépasser ses limites, l’équivalent de ce qu’il avait entrepris avec Björk sur le tournage de Dancer in the Dark. « Je veux le même genre de cadeau que me fait un acteur quand il joue une scène qui lui répugne vraiment. A travers la machine que devient l’acteur, on produit de bonnes choses. » Un bon résumé de ses méthodes controversées…

Ce petit jeu entre réalisateurs aurait facilement pu donner lieu à un film trop intellectuel, abstrait et ennuyeux, mais il s’avère au contraire assez passionnant, à condition bien sûr d’être sensible à l’humour très spécial du Danois. D’abord, les obstructions ne concernent pas que Jørgen Leth : alors qu’ils revoient ensemble The Perfect Human avant de se mettre au travail, nous ne voyons cette oeuvre originelle que par morceaux dispersés tout au long du film, ce qui nous enlève la possibilité de la comparer objectivement avec ses différents remakes. Autrement dit, nous sommes également « obstrués » dès le début ! Mais comme d’après Lars, les remakes seront forcément moins bons, ces comparaisons sont inutiles, n’est-ce pas ? Un bon exemple de son humour pince-sans-rire, qu’il utilise aussi souvent que possible, ce qui rend parfois les dialogues hilarants. Alors que Jørgen revient pour lui montrer l’Obstruction n°1, il s’étonne : « Tu as l’air en forme. C’est mauvais signe ! Tu devrais avoir l’air effondré…» Et dès que le réalisateur se plaint du nombre de contraintes qu’il a dû affronter, Lars s’engouffre dans la brèche : « Alors, il en faudra plus la prochaine fois…» A l’inverse, quand Jørgen veut que Lars décide de la punition qu’il doit subir (pour ne pas avoir rendu un film conforme aux règles), le diabolique Danois réplique : « Alors, fais un film où je ne décide de rien. Tu es entièrement libre. » Ce qui constitue la pire des vacheries…

Face aux obstructions tordues imaginées par son chef, Jørgen Leth se montre créatif et imaginatif, réalisant contre toute attente des remakes intéressants, même s’il doit en souffrir : « On échange des balles, mais il a un service de tueur. Il faut une force incroyable pour le renvoyer… » En voyant les résultats, Lars von Trier s’agace de plus en plus : « Tu es trop talentueux, tout ce que je te dis t’inspire ! » Il croit enfin coincer son adversaire en lui commandant un dessin animé : « Ca ne pourra être que de la merde ! » Peine perdue… Et s’il s’avoue finalement vaincu, c’est d’une manière particulièrement tordue : une sorte de mise en abyme du film qui vaut à elle seule le détour, et où chacun en prend pour son grade… Exercice instable sur la création, la liberté, les contraintes et la manipulation, Five Obstructions est un prolongement des autres films du provocateur Danois, une extension de son œuvre peut-être mineure mais réussie, qui permet de mieux la cerner.

Quant aux bonus, on peut regretter l’absence d’interview des auteurs, ensemble ou séparément, et celle de commentaires sur le parcours de Jørgen Leth, peu connu du grand public. On doit se contenter de textes : origine du projet, « manifestes » et notes d’intention des auteurs, leurs biographies, et cinq poèmes de Jørgen Leth à propos de leurs entretiens. Quelques vidéos (voire même The Perfect Human en entier et sans coupures) auraient été les bienvenues…




Ludovic Ligot
( Mis en ligne le 05/12/2005 )
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