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Plaisirs ou châtiments ?
avec Nagisa  Oshima, Katsuo  Nakamura, Mariko Kaga, Yumiko  Nogawa, Toshiko  Higuchi , Masako  Yagi
Carlotta Films 2008 /  19.99   € - 130.93 ffr.
Durée film 115 mn.
Classification : Tous publics

Sortie cinéma, Pays : 1965, Japon
Titre original : Etsuraku

Version : 1 DVD 9/Zone 2
Format vidéo : 16/3 compatible 4/3, Pal
Format image : 2.35 (couleurs)
Format audio : Japonais (Dolby Digital 2.0 mono)
Sous-titres : Français

Bonus :
- L’Au-delà des interdits, un film-analyse de Jean Douchet (25 mn)

L'auteur du compte rendu : Scénariste, cinéaste, Yannick Rolandeau est l’auteur de Le Cinéma de Woody Allen (Aléas) et collabore à la revue littéraire L'Atelier du roman (Flammarion-Boréal) où écrivent, entre autres, des personnalités comme Milan Kundera, Benoît Duteurtre et Arrabal.

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Après plus de trois ans d’interruption, Nagisa Oshima réalise une nouvelle œuvre pour le cinéma avec Les Plaisirs de la chair, le cinéaste ayant réalisé entre-temps plusieurs films pour la télévision. C'est en vérité un film produit par sa propre maison de production, suite aux déboires que le cinéaste a subi avec la Shôchiku, la célèbre maison de production nippone, qui avait retiré son film Nuit et brouillard au Japon de l'affiche.

Le film raconte l'histoire de Atsushi Wakizaka, jeune homme sans fortune, qui tue un homme pour venger Shoko, la femme qu’il aime en secret. Il doit accepter le marché que lui propose l’unique témoin du meurtre, Hayami, un fonctionnaire coupable d’avoir détourné trente millions de yen : garder le butin jusqu’à sa sortie de prison en échange de son silence. Mais Shoko s’est mariée avec un autre, et Wakizaka décide de dépenser tout l’argent en un an, puis de se suicider… Il va alors de femme en femme, décidé à se livrer à tous les plaisirs de la terre, en dépensant l'argent de Hayami, et de se tuer lorsque celui-ci sortira de prison.

La première impression que laisse le film est étrange car on a du mal à croire au scénario : pourquoi ce fonctionnaire confie-t-il une telle somme d’argent à un jeune inconnu, alors qu’il aurait très bien pu la cacher quelque part ? Là, il risque de voir Wakizaka dépenser grassement son trésor, ce qui finit évidemment par arriver ! L’intrigue de départ est vraiment bancale ; on reste déconcerté. Enterrer le butin dans un terrain vague n'était-il pas plus judicieux ? À partir de là, il est difficile de suivre le déroulement du film avec sérénité...

La caméra de Nagisa Oshima exacerbe un peu artificiellement, notamment par un montage saccadé et des lumières contrastées, la tension du film, défaut de sa mise en scène déjà présent dans ses premières œuvres. Son personnage principal est toujours dans l’excès, la surenchère (il aurait fallu au contraire une mise en scène distancée, qui contrarie les convulsions du personnage) et, à vrai dire, on a bien du mal à le suivre dans ses étranges pérégrinations. Ou plutôt, on a même peur de le suivre car les relations entre les personnages sont sans cesse outrées, violentes, et expédiées, sans que le temps ne soit pris de fouiller la psychologie des personnages. Les rencontres avec les différentes femmes (Itomi, la fille de bar, Shizuko, Keiko femme libre, indépendante, moderne, classe moyenne et Mari, la «femme parfaite», femme du peuple, muette et esclave sexuelle) débouchent en quelques plans sur des relations excessives et dramatiques. Certes, on se doute que de tels personnages doivent bien exister dans la réalité mais il aurait fallu alors une mise en scène plus apte à nous faire comprendre les agissements du héros masculin.

Ce qui est plus troublant, c'est que ces "plaisirs de la chair" n'en sont guère ; ce sont plutôt des châtiments que le personnage s'inflige. On se demande si la mise en scène de Nagisa Oshima comprend vraiment cette obsession. On peut en douter. C'est la distance entre le sujet et la mise en scène qui permet de comprendre le traitement du réalisateur (pensons à Roman Polanski et à la distance ironique qu'il instaure dans chaque plan) et de savoir si celui-ci maîtrise son sujet ou si c'est son sujet qui le domine. Ici, nous sommes littéralement "jetés" dans le film sans que le cinéaste ne nous laisse un espace pour respirer et saisir ce qui se passe sur l'écran.

Nagisa Oshima établit bien le parallèle entre une sexualité excessive et les pulsions meurtrières (eros-thanatos), ce qui sera plus évident encore dans son film L'Empire des sens (1976) : à la fin, la femme tue son amant (elle le castre même). Cependant, là encore, le cinéaste ne peut s'empêcher de faire dans l'excès en montrant un coït réel alors qu'il ne devrait pas y avoir au cinéma de mise en scène d'un coït. On tombe tout de suite dans la pornographie là où il aurait fallu suggérer, ce qui est évidemment bien plus troublant et bien plus cinématographique. Ce côté excessif et voyeuriste dessert le cinéaste.

On regrette donc ce côté excessif et brutal de la mise en scène d'autant que Nagisa Oshima avait un sujet d'envergure à traiter. Ceci étant, les amateurs d’érotisme seront également déçus, Nagisa Oshima n’étant pas encore tombé dans la facilité à cette époque.

En bonus accompagnant le film, L’Au-delà des interdits, le film-analyse de Jean Douchet, pense que dans ce film Oshima met en place sa théorie de la subjectivité comme témoin du réel. Il s'agit en fait de filmer objectivement un point de vue subjectif.


Yannick Rolandeau
( Mis en ligne le 03/07/2008 )
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