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Underground
avec Emir Kusturica, Miki Manojlovic, Lazar Ristovski, Slavko Stimac
TF1 Vidéo 2005 / 25 € - 163.75 ffr.
Durée film 155 mn.
Classification : Tous publics |
Le film a reçu la Palme d'or au Festival du film de Cannes en 1995 et a été élu Meilleur film en langue étrangère de la Boston Society of Film Critics en 1997.
Sortie Cinéma : Yougoslavie, 1995
Version : DVD 9 / Zone 2
Format image : 1 .85 - 16/9 compatible 4/3 - Couleurs
Format audio : français et anglais, Dolby Digital 5.1
Sous-titres : français
Edition collector
DVD 1
Le film en VF
DVD 2
Le film en VO sous-titrée
DVD 3 : Bonus
Making of : Shooting days – Alexander Manic(75 min.).
Interview de Emir Kusturica : Kusturica, 7 ans plus tard (27 min.).
Bande-annonce.
Lien Internet.
Livret de 48 pages.
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10 ans. C’est le temps qu’il aura fallu patienter avant que ne soit édité en coffret DVD Collector le chef d’œuvre d’Emir Kusturica. 10 ans et l’imminence pour son réalisateur d’une présidence du jury du Festival de Cannes où il se vit décerner la palme d’or à deux reprises, d’abord pour l’inattendu Papa est en voyages d’affaires puis pour le grandiose Underground, qui nous préoccupe ici.
1993. Un conflit fratricide commence à faire rage en Yougoslavie tandis que, résident américain, il achève de filmer Arizona Dream. S’en suivront des dizaines de versions du scénario – adapté d’une pièce de Dusan Kovasevic -, deux ans de tournage sous haute tension entre Prague et Belgrade, et l’envenimement constant de la guerre qui met à feu et à sang la terre natale du réalisateur.
1941. Marko et Blacky arrosent dispendieusement l’adhésion du second au parti communiste. La fanfare tzigane est déjà là pour planter le décor de la démesure, aux portes de l’apocalypse. A défaut d’apocalypse, le déluge s’abat sous peu et dévaste le zoo dont Ivan, le frère de Marko, Noé simple d’esprit, est le gardien. Il faut trouver refuge sous terre, à l’abri des bombardements arbitraires, de la folie guerrière comme des dommages collatéraux… La fanfare illumine de sa constance nostalgique les parois denses de la cave. Vingt ans durant, la petite communauté de résistants reste cloîtrée, heureuse, habitée par l’espoir d’un monde meilleur ; inlassablement, on fabrique les armes du sacre de Tito et de sa propre émancipation, en fait celles de la fortune de Marko, le résistant de la première heure, le frère, le protecteur, le geôlier.
50 ans. C’est le temps qu’avec Underground, Emir Kusturica entreprend de narrer de l’histoire de son pays à travers un triangle amoureux tragique et volubile : deux hommes, deux amis, deux frères d’armes, éperdument amoureux d’une même femme, comédienne sans pudeur ni morale, pétrie d’humanité. Servi par trois comédiens fervents – dont Miki Manjolovic, célèbre en France pour ses rôles dans Un week-end sur deux ou Les Amants Criminels - le trio oscille constamment de l’amour à la haine à l’instar des peuples qu’une même terre déchire autant qu’elle unit.
1995. A la veille du festival, la Croisette relève les paris : les bobines définitives arriveront-elles en temps voulu, et quand bien même, seront-elles le support du montage qu’a rêvé Kusturica ? Lui seul n’en aura jamais douté. Le public rendu à la projection reçoit de plein fouet sa fresque baroque et sulfureuse qui recycle les images entraperçues la veille au JT et leur permet enfin de prendre sens, de faire écho dans l’inconscient collectif trop blasé. Le conflit bat son plein, agresseur et agressé se confondent et l’occident se contente de brandir un soupir de désappointement inopérant. Jeanne Moreau remet la palme d’or au réalisateur serbe. Ce n’est qu’après le massacre de Srebrenica – entre autres - et l’identification définitive du régime serbe comme agresseur qu’Alain Finkielkraut déclenche une polémique autour d’un film qu’il n’a pas pris le temps de voir. Elle enflera et occupera les rubriques rebonds des journaux tout l’été au point de décourager un temps Kusturica de poursuivre son œuvre de cinéaste.
Certes, Kusturica ne prend pas le recul nécessaire pour faire œuvre d’historien. Mais c’est à dessein, car il revendique de n’en posséder ni l’envie ni les moyens d’expression. Son projet est tout autre, il fait œuvre – et quelle œuvre ! - de cinéaste. Tantôt il rêve, tantôt il cauchemarde son histoire et celle son pays. Il échafaude une tragédie baroque et métaphorique, souvent visionnaire, pétrie de références et d’une parfaite maîtrise des outils d’un cinéma spectaculaire et universaliste. La musique exaltée de Goran Bregovic porte cette véritable odyssée dans les tréfonds de l’âme humaine dont l’expression destructrice a traversé le vingtième siècle jusqu’à le définir.
L’initiative d’une édition collector de ce film indispensable était déjà bien tardive. On n’en est que plus frustrée du sort relativement anodin qui lui a été réservé. Si, outre le poids des ans, le transfert du film, d’un point de vue sonore notamment, est très honorable, on attend toujours la sortie de la version longue. Par ailleurs, les bonus ont une fâcheuse tendance à nous laisser sur notre fin. Quoique la personnalité de Kusturica nous invite à toujours boire ses paroles, son interview est des plus brèves voire relativement anecdotique. Par contre, Shooting days, le making-of d’Alexander Manic est beaucoup plus éclairant. Il constitue de fait un véritable documentaire, qui ambitionne avec intelligence d’extraire du travail de Kusturica sa vision du monde, foisonnante et complexe.
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Pour prolonger l’odyssée : « Il était une fois… Underground » par Emir Kusturica et Serge Grunberg, aux éditions « Cahiers du cinéma »
Virginie Berthier
( Mis en ligne le 02/05/2005 )
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