|
Films -> |
| | Rechercher un réalisateur/acteur | |
Films -> Drame |
Du pareil au même… avec Robert Mulligan, Uta Hagen, Diana Muldaur, Chris Connelly MK2 2007 / 19.99 € - 130.93 ffr. Durée film 105 mn. Classification : Tous publics | Sortie Cinéma, Pays : 1972
Sortie DVD : 18 juillet 2007
Version : DVD 9, Zone 2
Format vidéo : PAL, format 1.85
Format image : Couleurs
Format audio : Anglais
Sous-titres : Français
Bonus :
- Préface : "Il était une fois"
- "Le style Mulligan" : intro et scènes commentées
- La musique de Jerry Goldsmith
- Bande-annonce du film (VOST)
- Bandes-annonces MK2
L'auteur du compte rendu : Scénariste, cinéaste, Yannick Rolandeau est l'auteur de Le Cinéma de Woody Allen (Aléas) et collabore à la revue littéraire L'Atelier du roman (Flammarion-Boréal) où écrivent, entre autres, des personnalités comme Milan Kundera, Benoît Duteurtre et Arrabal. Imprimer
Quelle étrange carrière que celle de Robert Mulligan ! Auteur de deux films connus, Un été 42 (1971) et The Other (1972), il réalisa d'autres oeuvres peu connues celles-ci comme Escalier interdit (1967), L'Homme sauvage (1968), ou Le Secret de Clara (1988) et Un été en Louisiane (1991). Notons quaux Etats-Unis, un de ses films, Du silence et des ombres (1962) (To Kill a Mockingbird) est devenu une institution. Si Un été 42 est resté dans certaines mémoires par la musique de Michel Legrand et le sujet, une histoire d'amour entre un adolescent et une jeune femme qui vient de perdre son amant à la guerre, le film en lui-même était assez conventionnel et un peu sentimentaliste, malgré un traitement élégant.
Robert Mulligan est un auteur intimiste et classique, ce qui le place dans la lignée dun Sydney Pollack par exemple. A ceci près quil est plus sensible... Et discret, ce qui le rend plus attachant. Sil nest pas un cinéaste majeur, il a suffisamment de talent pour susciter notre curiosité et à ce titre, The Other est certainement son chef duvre.
Lhistoire, adaptée du roman de Tom Tryon, est simple et troublante : Holland et Niles sont deux jumeaux espiègles qui passent une enfance joyeuse dans une ferme isolée du Connecticut dans les années trente. Ils sont élevés par Ada, une grand-mère d'origine russe, avec laquelle ils entretiennent une relation intense. Elle leur fait découvrir des jeux assez étranges. Leur père est mort dans des circonstances non éclaircies et leur mère est malade... Puis des événements tragiques surgissent. Un cousin meurt dans une grange en se jetant dans le foin où se trouvait malencontreusement une fourche... Leur mère tombe dans lescalier et devient muette et paralysée. Une vieille voisine acariâtre trouve la mort brusquement
Jusquau jour où
Le film aborde surtout le thème de la gémellité, lun des plus intéressants qui soient. On sait que dans certaines peuplades, on sacrifiait l'un des deux jumeaux car il nétait pas possible davoir deux êtres si semblables
Et ce thème est évidemment lié à lidentité, au double maléfique, à la part dombre que lon suppose toujours chez lautre et jamais chez soi alors que
Thématique que lon retrouve en abondance dans la littérature avec Dostoievski (Le Double), le théâtre avec Plaute et Molière (Amphitryon), William Shakespeare (La Comédie des erreurs) ou dans le cinéma avec des films comme Le Locataire (Polanski), The Shining (Kubrick) ou Profession : reporter (Antonioni) dans des traitements différents. La liste serait sans fin même si le sujet nest pas toujours bien traité ; ce nest pas simplement une figure de style. Il est avant tout existentiel. Proche de nous. Tout proche. Ce thème du double est aussi lié à la rivalité mimétique comme en parle l'anthropologue René Girard, à ces doubles qui sentretuent comme les deux frères ennemis, Etéocle et Polynice, dans la tragédie grecque. Ils se ressemblent tant qu'ils sindifférencient dans leur rivalité sacrificielle. Car au fond, pourquoi désirons-nous tant être un autre ou pour le dire autrement, pourquoi ne voulons-nous jamais être nous-même ? Pourquoi désirer tant ce que lautre a ou possède ?...
Les deux enfants (effectivement deux vrais jumeaux au générique) sont comme deux gouttes deau, au point quil est impossible de les distinguer au premier coup dil. Pourtant, lun ressemble à une sorte d"ange" et lautre est plus
"maléfique". Sauf que
A vous de découvrir... Limage finale donne au spectateur une sensation de folie assez caractéristique de lemboîtement que veut créer le film par ricochets.
Il est bien réalisé, privilégiant une atmosphère douce et pastorale (une constante lumière dété avec ciel bleu baigne le film), un climat quasi édénique qui, au fur et à mesure que lintrigue progresse, se fissure et se lézarde. Le drame mûrit fait par touches discrètes, venant oblitérer limpression de calme qui régnait jusqualors. Le réalisateur est délicat, jouant sur la suggestion (le hors champ, les ellipses) et optant pour un contexte réaliste juste troublé par quelques faits singuliers. Par exemple, lors de la mort de la voisine, on ne voit pas son cadavre. On ne le verra jamais.
La mise en scène de Robert Mulligan nous fait entrer en douceur dans cette ambiance par des plans soigneusement composés et par une figure stylistique (de légers zooms avant) que lon a pratiquement abandonnée aujourdhui (seul, quasiment, Robert Altman lutilisait encore). Il est vrai que le film est typiquement issu des années soixante-dix avec ce côté si irisé de la lumière, ce léger flou qui berce les cadrages et certains plans densemble, cette volonté dun travail honnête et élégant quHollywood narrive plus à fournir de nos jours. Si les personnages ont une apparence un peu trop kitsch par moment (ce côté américain un peu surfait), ils participent plutôt ici (même si tout nest pas résolu sur ce plan et la grand-mère est le personnage le plus faible du film) de la façade bienséante de cette famille modèle rongée par le mal. Car cest bien de ce dont il sagit, du Mal. Du Mal qui surgit de lintérieur de soi et plus particulièrement ici de lenfant
L'autre...
Voilà donc un film avec une facture classique mais soignée, avec une intrigue bien développée qui, sans égaler les grands (Kubrick, Polanski), parvient sans peine à aborder des sujets singuliers et à nous faire rentrer dans une thématique importante. A découvrir.
Yannick Rolandeau ( Mis en ligne le 20/07/2007 ) Imprimer | |
|
|
|
|